Du meilleur, au pire... au meilleur
Canadiens mercredi, 28 mai 2014. 08:18 mercredi, 11 déc. 2024. 15:30Le Canadien et Dustin Tokarski auraient pu s’écrouler deux, trois, quatre, voire cinq fois plutôt qu’une dans cette partie. Après avoir bousillé une avance de 4-1 en deuxième période, ils auraient même pu facilement se réveiller en vacances.
Mais parce que le jeune gardien a fait preuve de caractère, de beaucoup de caractère, et que l’équipe devant lui ne l’a pas abandonné, ou complètement abandonné comme elle l’avait fait lors de ses deux dernières sorties, le Canadien mettra plutôt le cap sur New York où il tentera d’éviter l’élimination pour une deuxième fois de suite face aux Rangers. Pour une quatrième fois depuis le début de séries -- les deux premières face aux Bruins de Boston - alors que le Canadien et les Blueshirts se croiseront jeudi au Madison Square Garden.
Si vous n’avez pas vu le match, vous avez raté l’une des parties les plus mouvementées de la saison. Un match de fou pour dire la vérité. Et si vous avez raté cette rencontre, le score de 7-4 favorisant le Canadien vous laisse sans doute croire que la soirée a été facile.
La vérité est toute autre.
En fait non. Prêt à tout donner pour éviter l’élimination, le Canadien a amorcé la partie avec l’énergie du désespoir. Une énergie vite récompensée alors que les Rangers ont écopé une pénalité 20 secondes après la mise en jeu initiale et qu’Alex Galchenyuk a fait dévier un tir de la pointe de P.K. Subban pour donner les devants au Tricolore après seulement 108 secondes de jeu.
Le ton était donné.
Le Canadien a maintenu le rythme. Vraiment. Histoire de récompenser ses coéquipiers qui semblaient ne pas l’abandonner sur le champ de bataille, Dustin Tokarski a ensuite réalisé un arrêt du désespoir pour maintenir l’avance. Complètement battu, le gardien s’est « garroché » sur sa droite et a volé un but certain à Carl Hagelin en faisant dévier la rondelle avec le petit bout de son bâton.
Déjà survoltés par le but de Galchenyuk, les fans du Canadien ont atteint un dangereux niveau de frénésie lors de la célébration de cet arrêt magique.
La célébration n’a pas duré.
Avant d’avoir terminé de défiler tous les superlatifs faisant de Tokarski un mélange de Patrick Roy et de Jacques Plante, le pauvre gars a accordé un bien vilain but. Tokarski a cédé sur un tir de loin décoché par Derek Stepan, de retour en dépit d’une fracture de la mâchoire qui l’a gardé à l’écart du jeu dimanche à New York.
Ce but a fait mal. Vraiment. Il a plongé le Centre Bell dans un silence lourd qui minait l’excellent début de rencontre du Canadien et de son jeune gardien.
Dès cet instant, le Canadien se devait de marquer le prochain but. Après un tel cadeau, Tokarski et ses coéquipiers ne pouvaient se permettre de donner l’occasion aux Rangers de prendre les devants.
Le premier point tournant s’est alors produit.
Après quatre matchs très difficiles depuis le début de la série face aux Rangers, Tomas Plekanec a secoué sa guigne offensive. Bon! Il a profité de la complicité d’Henrik Lundqvist qui s’est montré aussi généreux, peut-être même davantage, que Tokarski en offrant à Plekanec un but qui redonnait l’avance au Canadien moins de deux minutes après le but des Rangers.
Autant le but des Blueshirts avait fait mal au Canadien et à ses fans, autant celui de Plekanec a ravivé les espoirs.
En deuxième, le Canadien s’est offert deux buts de plus. Deux buts de Max Pacioretty et Rene Bourque marqués en tout juste trois minutes. Deux buts qui ont chassé Henrik Lundqvist qui semblait tellement chancelant depuis le début de la rencontre que la décision de le retirer s’imposait.
Bien, très bien, trop bien!
À 4-1, tout allait bien. Très bien. Trop bien.
Signe que les joueurs du Tricolore n’affichent pas la même confiance en Tokarski qu’il ne l’assure en entrevue, les joueurs du Canadien se sont alors mis à se regrouper autour de lui pour tenter d’effectuer les arrêts à sa place. Le genre de comportement qu’ils n’afficheraient pas devant Price.
Josh Gorges, qui a connu un match affreusement difficile encore mardi, a fait dévier un tir anodin de Rick Nash derrière son gardien. C’était le troisième but de Gorges aux dépens de son jeune gardien. Comme le dit le proverbe : qui aime trop, mal étreint!
Bon! Ce n’était pas encore grave. Ou pas trop. Même quand Derek Stepan – encore lui – avec une fois encore la complicité de Chris Kreider a ramené les Rangers à un but du Canadien.
Après un revirement affreux dont Andrei Markov s’est rendu coupable à la gauche du filet de Tokarski, le jeune gardien a effectué un bel arrêt pour racheter la bévue de son vétéran défenseur.
Regroupés autour de leur gardien, les joueurs du gardien se sont ensuite transformés en observateurs laissant les Rangers profiter du retour pour marquer.
C’est soudainement devenu moins drôle.
Plekanec s’est alors transformé en joueur de soccer. Il a feint d’être atteint au visage par un bâton – le sien lui est passé près de la visière, mais pas celui du joueur des Rangers – et l’arbitre qui a tout vu l’a aussitôt chassé. Plekanec s’est sorti sans pénalité d’un geste similaire à New York dimanche. Le genre de geste que les arbitres ne peuvent blairer. Le genre de geste dont ils parlent entre eux, ce qui n’a certainement pas aidé la cause de Plekanec hier soir.
Après avoir récolté trois passes, Chris Kreider a profité de la pénalité décernée à Plekanec, mais surtout d’une passe parfaite de Ryan McDonagh pour niveler les chances.
En 4 minutes 24 secondes, en concédant trois buts sur quatre tirs seulement, le Canadien qui avait été si bon depuis le début du match était soudainement devenu très mauvais.
Quand j’écris que le Canadien est soudainement devenu très mauvais, je ne parle pas du gardien. Loin de là. Très ordinaire sur le premier but, Tokarski ne pouvait être blâmé sur les trois autres buts.
Vrai qu’il s’est compromis sur le quatrième but en défiant un tir qui n’est jamais venu, mais avec ses coéquipiers qui nuisaient plus qu’ils n’aidaient, le pauvre gardien devait bien tenter quelque chose.
L’éveil de Bourque
C’est là que le deuxième point tournant en faveur du Canadien est survenu.
Comme il se devait de le faire après le premier but accordé par Tokarski, le Canadien se devait de marquer après la remontée des Rangers.
Il l’a fait.
Après un bel arrêt de Tokarski – il fallait bien qu’il fasse sa part – au terme d’une montée orchestrée par Bryan Boyle, Rene Bourque a déjoué Cam Talbot d’un tir précis dans la lucarne.
Talbot n’a pas été aussi mauvais sur ce but que Lundqvist l’avait été sur les premiers du Canadien. Mais il n’a pas été fort non plus. Pas question toutefois de minimiser le crédit à verser au compte de Bourque sur ce jeu. Car en jouant comme il le faisait depuis le début de la partie, en patinant, en s’impliquant autant offensivement que défensivement, Bourque rachetait bien des matchs misérables disputés contre les Bruins en deuxième ronde et les Rangers depuis le début de la finale de l’Est.
Après ce deuxième but si important pour la cause de son équipe, Bourque a maintenu le rythme. Il aurait pu s’offrir un tour du chapeau avant la fin de la période médiane tant ses poussées vers le filet des Rangers étaient incisives.
Ses efforts ont été récompensés en début de troisième période. Avec la complicité de Dale Weise et d’Andrei Markov – il n’aura pas fait que du mal dans cette partie – Bourque a doublé l’avance de son équipe en marquant son troisième but du match. Son huitième des séries qui lui permet de rejoindre Jonathan Toews et Jeff Carter au deuxième rang des buteurs depuis le début des séries, deux buts derrière Marian Gaborik des Kings de Los Angeles.
C’était toutefois le deuxième but seulement de Bourque à ses 11 derniers matchs. Comme quoi quand ce nébuleux joueur de hockey décide de se mettre en marche, il est difficile à arrêter. L’ennui, c’est qu’il est impossible de savoir quand au juste il décidera de se mettre en marche…
David Desharnais et Max Pacioretty ont combiné leurs efforts pour sceller l’issue de la rencontre alors que le Québécois a marqué dans un filet désert.
Contrairement au troisième match qu’il a gagné en prolongation à New York et au quatrième qu’il a perdu en prolongation dimanche et malgré la remontée de trois buts des Rangers en deuxième période, le Canadien méritait vraiment la victoire hier.
Exception faite de Thomas Vanek qui s’est encore contenté de bien peu, tous les attaquants du Canadien ont été impliqués positivement dans cette rencontre.
À la ligne bleue, Gorges et Markov en ont arraché. Beaucoup. Mais les autres ont su prendre la relève afin d’aider Dustin Tokarski qui a effectué quelques gros arrêts sur ses 23 réalisés au cours de la rencontre. Des gros arrêts nécessaires pour signer une victoire. Des arrêts qu’ils n’avaient pas effectués en assez grand nombre lors de ses trois premières sorties.
Suspensions envisagées
Ce match de fou en ce qui a trait au nombre de buts marqués et à la façon dont ils ont été enfilés devrait avoir des conséquences disciplinaires.
La LNH, par le biais de son comité de sécurité, rencontrera John Moore qui devrait écoper une suspension pour sa mise en échec illégale aux dépens de Dale Weise en troisième période.
Sur une séquence de jeu semblable à celle qui a entraîné une suspension de deux matchs imposée à Brandon Prust, Moore a frappé tardivement l’attaquant du Canadien. Contrairement à Prust qui n’avait pas quitté la patinoire, les patins de Moore ont semblé quitter la glace avant l’impact. Le point d’impact semblait aussi la tête. Deux facteurs qui pourraient entraîner une suspension plus longue.
On verra.
Dans un geste passé plus inaperçu, Derek Dorsett a aussi asséné un coup de boule (coup de tête) au défenseur Mike Weaver qui bataillait sa position avec le joueur des Rangers devant le filet de Dustin Tokarski.
Si les arbitres ont imposé une sanction juste en chassant Moore pour cinq minutes et en l’expulsant de la rencontre – le genre de pénalité dont Prust aurait dû écoper lors de la troisième rencontre – ils n’ont pas sévi aux dépens de Dorsett.
On verra si la LNH le fera à leur place. Ce qui semble nécessaire.
Parlant de sécurité, on se demande vraiment comment et surtout pourquoi Dale Weise, malgré la commotion évidente qu’il a subie lors de l’impact suivant la mise en échec illégale dont il a été l’objet, a pu revenir au jeu en fin de match.
Entraîneur-chef du Canadien, Michel Therrien a assuré que Weise avait suivi le protocole en étant confiné à la salle de repos et en étant examiné par les médecins. Et que c’est le joueur qui avait indiqué être en mesure de revenir dans l’action.
Pas question ici de blâmer l’entraîneur-chef du Canadien qui n’a rien eu à voir dans cette décision. Mais Weise qui n’aurait jamais quitté la patinoire n’eut été de P.K. Subban qui le gardait debout et qui a eu besoin de l’aide de deux soigneurs pour retraiter vers le vestiaire, n’aurait jamais dû revoir de l’action.
Du moins pas si la LNH veut vraiment combattre avec sérieux les commotions cérébrales et surtout leurs conséquences.
Chiffres du match
3 : Rene Bourque est devenu le 21e joueur de l’histoire du Canadien à marquer trois buts dans un match de séries éliminatoires. Il est le premier depuis Andrei Kostitsyn en avril 2010 contre les Capitals de Washington…
7 : Maurice Richard détient le record du Canadien avec sept tours du chapeau en match de séries éliminatoires…
36 : Les 21 joueurs du Canadien qui ont inscrit au moins un tour du chapeau en séries en totalisent 36…