Ryan White a passé la soirée à narguer les joueurs de son ancienne équipe, à les déranger, à les rudoyer à leur passer les gants au visage avec l’intention avouée de les faire sortir de leurs gonds, de les sortir de leur match.

« Tu me connais, je ne recule devant rien pour aider mon équipe à gagner », que le gentil Ryan White m’a lancé en me serrant la main lorsque je l’ai croisé à sa sortie du vestiaire des visiteurs au Centre Bell.

L’ennui pour White et aussi pour ses coéquipiers, c’est que ses actions, loin d’avoir déranger le Canadien et plus loin encore d’avoir mousser les chances de victoire de son équipe lui ont tout simplement sauté au visage.

Quand White s’en est pris à Torrey Mitchell au cercle des mises en jeu, il en a mis pas mal. Il l’a brassé avec vigueur.

Qu’est-ce que Mitchell a fait? Rien!

À ce moment, je suis convaincu – j’en ai d’ailleurs eu la preuve sur les médias sociaux – que bien des partisans ont déploré le fait que Mitchell, comme les autres membres du quatrième trio, est trop petit pour répliquer, trop petit pour se faire respecter.

Eh bien non!

Mitchell, Phillip Danault, Brian Flynn et Paul Byron lorsqu’il évolue au sein du quatrième trio sont petits. C’est vrai. Et il est sans doute vrai qu’ils ne feraient pas le poids s’ils décidaient de tomber dans les pièges tendus par les Ryan White de la LNH.

Mais c’est avec les gants dans les mains qu’on réplique aujourd’hui dans la LNH. Avec les gants dans les mains et en les utilisant pour marquer des buts.

Et c’est exactement ce que Mitchell a fait en début de deuxième période. Si sa fierté a écopé un brin lorsqu’il s’est contenté de répliquer verbalement aux invectives et invitations au combat que lui balançait Ryan White, elle s’est bien reprise avec ce but qui donnait les devants 2-0 au Canadien.

Weber frappe à son tour

Ce but, loin de refroidir les ardeurs de White, a poussé l’agitateur de métier à reprendre de plus belle quelques minutes plus tard. Après être passé d’un joueur du Tricolore à un autre avec, encore là, l’intention évidente d’obtenir le combat dont il rêvait, White s’est retrouvé au banc des pénalités pour quatre minutes.

Et qu’est-ce qui est arrivé? Eh oui, le Canadien a encore compté sur une frappe solide de Shea Weber. Meilleur marqueur de la LNH – chez les défenseurs – la saison dernière avec 14 buts, Weber a inscrit son premier avec le Canadien.

D’autres suivront. C’est certain.

Ce gars-là une garnotte pas possible. En première période, un de ses tirs a frappé le poteau à la gauche du gardien Louis Domingue avec tellement de force que j’ai eu l’impression que la tige avait plié.

OK! J’exagère un peu. Mais juste un peu…

Torrey Mitchell et Shea Weber n’ont pas eu à se battre pour se moquer de Ryan White, de ses invectives et de ces bravades répétées.

Ils ont tout simplement marqué.

Et vous savez quoi? Ces buts de Mitchell et de Weber – son filet est devenu le but gagnant – ont fait bien plus mal à Ryan White que n’importe quel crochet de la droite ou de la gauche qu’il aurait pu encaissé lors d’une bagarre. White aura peut-être plus de succès lorsque les Coyotes s’arrêteront à Philadelphie contre des Flyers qui sont plus gros et surtout moins disciplinés que le Canadien. Et peut-être que face aux Flyers ce manège servira la cause de son équipe.

Mais jeudi soir au Centre Bell, ça n’a rien donné. Rien du tout. Rien de rien.

Vitesse = arme redoutable

Torrey Mitchell et les membres du quatrième trio du Canadien ne sont pas des matamores. Loin de là. Ils sont encore moins des bagarreurs.

De fait, à part Nathan Beaulieu qui a jeté les gants avec succès à quelques reprises la saison dernière, mais qui s’est aussi fait passer un K.-O. par Nick Foligno des Blue Jackets de Columbus, je ne crois pas qu’il y ait chez le Canadien de joueur capable de faire régner la loi et l’ordre en jetant les gants.

Oui Shea Weber l’a déjà fait avec succès. Selon le site spécialisé Hockeyfights.com, Weber a 16 combats à son actif dans la LNH. Il a remporté la grande majorité. Mais ce colosse est bien plus redoutable avec son tir frappé et avec ses mises en échec percutantes – parlez-en à Tobias Rieder qui l’a appris à ses dépens deux fois plutôt qu’une hier soir – qu’avec ses poings.

« La force de notre trio est la vitesse. On s’en sert pour maximiser la qualité de notre travail en échec avant, pour déstabiliser les adversaires et quand on arrive à contribuer offensivement comme on l’a fait ce soir, c’est une prime intéressante », a indiqué Torrey Mitchell qui admet que ce n’est pas toujours facile de rester sourd aux invectives des adversaires et de tendre l’autre joue.

« C’est bien plus difficile de rester discipliné que de laisser tomber les gants. Des fois, tu voudrais répliquer pour montrer que tu n’as pas peur, mais ça donne quoi si en le faisant tu places ton équipe dans le trouble. La Ligue a changé au cours des dernières années. Les trios de soutien ne peuvent plus simplement se contenter d’apporter un aspect physique au jeu. Il faut être rapide. Il faut être efficace en échec avant. Il faut lire le jeu », a ajouté Mitchell.

Plusieurs fois au cours de la saison qui commence, on reprochera au Canadien d’être trop petit. On déplorera le fait qu’il se fait trop souvent brasser et on déplorera aussi l’absence d’un redresseur de torts pour répliquer.

Mais entre vous et moi, la meilleure façon de répliquer, c’est de marquer des buts et de gagner des matchs. Et avec Carey Price de retour devant le filet – il a eu une petite soirée facile pour retrouver son rythme avant le gros match de samedi à Boston – les joueurs du Canadien n’auront pas besoin de multiplier les buts pour se venger de leurs adversaires en accumulant les victoires.

Gardons ça en tête et suivons de près le déroulement de la saison. On devrait d’ailleurs avoir un autre bel échantillon dès samedi alors que le Canadien rendra visite aux Bruins à Boston.

Une fois l’année terminée on dressera un bilan du nombre de matchs que le Canadien a perdus en raison de son manque de poings en comparaison au nombre de matchs qu’il aura gagnés en répliquant avec des points.

Pour le moment, les points mènent 1-0 sur les poings.