MONTRÉAL - Les gardiens de but et les botteurs sont souvent identifiés comme des « bibittes spéciales » du sport professionnel. Christopher Milo n’a pas défendu le filet du Canadien de Montréal et il n’a pas empoché des millions comme Carey Price, mais il peut s’imaginer la pression qui repose sur le gardien. S’il n’en tenait qu’à l’ancien botteur de la LCF, Price mériterait d’aller se ressourcer, loin du hockey, pendant quelques jours pour revenir en force.

 

Passionné de hockey, Milo s’emporte parfois en suivant les actualités du Tricolore. Toutefois, son vécu d’athlète lui permet de voir le portrait sportif d’un autre œil et de prendre du recul. C’est en voyant une séquence de Price, à l’entraînement, que Milo a conclu que le numéro 31 devrait justement pouvoir aller s’aérer l’esprit.
 

« Price ne s’exprime pas énormément, il semble garder bien des choses pour lui. Mais ça se voit qu’il a juste besoin d’une pause. Ça ne fait pas de lui un mauvais gardien, une mauvaise personne ou un bébé gâté. Au contraire, il doit seulement décompresser, ne pas voir une rondelle pendant quelques jours pour être avec sa famille et passer du temps avec eux loin du hockey », a proposé Milo qui présume que Price, un amoureux des animaux, a été affecté par le décès de ses deux chiens. 

 

Évidemment, cette idée en fera sursauter plusieurs. Avec le salaire qui lui est octroyé (10,5 millions par année), ce scénario serait difficile à avaler pour ses dénigreurs. Il s’agirait d’une tentative encore plus audacieuse dans le cadre d’un calendrier condensé et écourté. Mais Milo n’a rien à cirer de ces contraintes puisqu’il pense à son bien personnel et aux bénéfices décuplés à son retour.

 

« Price marche sur son nom! »

 

« Qu’il fasse ce qu’il doit faire comme aller à la pêcher ou dans la nature pour décompresser. Juste être loin du gros cirque de la LNH. Je comprends que ça n’arrivera pas, Marc Bergevin est trop all-in cette année, mais ça me fait un peu peur dans un sens. S’il en arrache à son prochain départ, c’est dangereux de ruiner son année alors que c’est lui qui t’offre la meilleure chance de mériter un championnat. Donnez-lui le temps pour qu’il revienne en force mentalement », a précisé l’ancien botteur qui a soulevé la coupe Grey avec les Roughriders de la Saskatchewan en 2013 et avec le Rouge et Noir d’Ottawa en 2016.

 

À ses yeux, le parcours de Price démontre hors de tout doute que l’argent se situe loin dans ses valeurs. Il évoque son explosion de joie en demi-finale du Championnat mondial junior de 2007 quand Jonathan Toews avait marqué trois buts en tirs de barrage en demi-finale contre les États-Unis et son triomphe olympique en 2014 pour appuyer ses dires.

 

Mais, inévitablement, il déduit que la pression de son contrat lui pèse sur les épaules quand il n’est pas au sommet de son art.  

 

« Il y a des joueurs de baseball qui empochent 25 millions par année et qui en arrachent au bâton... Sauf que Carey doit la sentir cette pression. Il sait qu’il est payé le plus cher, qu’il doit ‘performer’ chaque soir sinon le monde va s’écrouler et les gens vont lui crier après. Ça joue dans la tête d’un athlète », a-t-il admis.

 

Pour Milo, un autre signe ne ment pas. En avril 2018, quand Price a devancé Jacques Plante pour le nombre de départs avec le Canadien, il a été submergé par l’émotion en voyant la réaction de la foule malgré les insuccès de l’époque.

 

« Il avait les larmes aux yeux quand il a salué la foule qui l’applaudissait. Il a à cœur la cause du Canadien », a maintenu Milo sans hésitation.

 

Corriger le mental et retrouver le plaisir de jouer

 

Dans son rôle de botteur, Milo a composé toute sa carrière avec le sentiment d’être laissé à soi-même dans les moments clés. Il n’a pas échappé à des creux qui l’ont ébranlé psychologiquement.

 

Christopher Milo« Je n’essaie pas de trouver des excuses pour Carey, mais je sais à quoi ça ressemble. Mes performances ont été moins bonnes en 2012 et 2014. En 2012, j’avais été remplacé pour les placements. Ce n’est pas amusant quand tu en arraches, tu n’as pas envie certains jours. Mais j’ai passé toute la saison morte avec Don Sweet, l’ancien botteur des Alouettes. Oui, on a procédé à des correctifs techniques - et j’imagine que Stéphane Waite fait la même chose avec Price -  mais ce que Don m’a amené, c’est le mental. J’ai rebondi avec ma meilleure année en carrière en 2013. Probablement que tout cliquait parce que je m’amusais de nouveau », a réagi Milo.

 

Parlant du côté mental, on entend souvent dire que les botteurs et les gardiens restent dans leur bulle et que leurs coéquipiers marchent parfois sur des œufs avec eux si bien qu’ils préfèrent ne pas les déranger. Dans une situation comme celle-ci, Milo demeure convaincu que le capitaine Shea Weber s’enquiert de l’état de Price.

 

« De mon côté, quand ça n’allait pas bien, j’avais des coéquipiers qui roulaient les yeux en voulant dire ‘T’as juste un travail à faire et tu ne l’accomplis pas...’ », s’est souvenu Milo.

 

« On n’est pas des robots, on est des humains et personne n’est parfait. Price veut tellement bien faire pour le Canadien que ça tourne mal... À ce niveau, si tu n’es pas 100% à l’aise mentalement, tu n’as aucune chance d’exceller. Présentement, il n’a aucun plaisir. Il avoue qu’il réfléchit trop et c’est une évidence. Le but de Nate Thompson m’a fait dire qu’il était vraiment perdu et qu’il a besoin de temps », a poursuivi le volubile intervenant qui croit que Jake Allen peut tenir le fort quelques matchs.

 

D’ailleurs, Milo a constaté que, par les temps qui courent, Price baisse souvent la tête après avoir alloué un mauvais but ; un autre indice que sa confiance a chuté drastiquement. Ainsi, il espère que Price puisse s’appuyer sur Waite pour parler de tout ce qui le tracasse que ce soit relié au hockey ou non.

 

« Ma relation était comme ça avec Don Sweet et je lui en serai toujours reconnaissant. Il m’a ouvert le cerveau dans ce sens. Je n’avais jamais eu besoin de faire ce travail parce que ça s’était toujours bien passé avant et je ne savais pas quoi faire quand ça allait mal en 2012 », a noté Milo qui travaille désormais à titre de chauffeur d’autobus.  

 

De son siège de partisan, il ne veut pas jeter la pierre aux fidèles du CH.

 

« Ça fait tellement longtemps que le Canadien n’a pas gagné. Les gens sont frustrés et c’est facile de pointer Price du doigt. C’est comme avec un botteur qui a manqué le botté sur le dernier jeu, mais que s’est-il passé durant les 59 autres minutes? », compare-t-il.

 

Cela dit, il tient à calmer le jeu.

 

« Ça me fait halluciner de lire certains commentaires sur lui. Sa mauvaise passe ne va pas durer toute l’année ou jusqu’à la fin de son contrat ; il n’est pas fini », a assuré Milo qui rappelle que Patrick Roy avait connu une saison pénible en 1992-1993 avant de propulser son équipe aux grands honneurs.

 

« Je sais qu’il sera impossible à freiner quand il est à son meilleur. C’est lui qui peut mener le Canadien à une autre coupe Stanley », a conclu Milo qui a hâte de voir Price retrouver le plaisir de jouer. 

 

*D'après l'idée du collègue Maxime Morin

« Je ne suis pas inquiet pour Carey Price »