Je l’ai dit souvent déjà et plusieurs fois écrit : si j’étais DG dans la LNH je ne toucherais pas à Alexander Semin avec « une pôle de 100 pieds ». J’ai donc grimacé quand l’annonce de l’embauche de l’attaquant russe par le Canadien est tombée peu avant midi vendredi.

Le pari de donner à ce vétéran droitier aussi talentueux que paresseux le mandat de relancer l’attaque anémique du Tricolore et son attaque massive plus anémique encore me semblait risqué. Mais parce que Marc Bergevin a profité du fait que les 29 autres équipes le boudaient pour le mettre sous contrat à ses conditions, ce pari méritait d’être tenté.

À 1,1 million $ pour un an, Semin ne coûte vraiment pas cher. S’il profite du tremplin que lui offrent Bergevin et le Canadien pour faire ce qu’il fait de mieux, marquer des buts, et ainsi relancer sa carrière, ce pari sera même très rentable. Autant pour le Canadien que pour l’ailier droit.

S’il se traîne les savates comme il l’a fait l’an dernier en Caroline, forçant les Hurricanes à racheter après trois ans seulement le contrat ridicule de 35 millions $ pour cinq ans qu’ils lui avaient consenti, le Canadien fera du surplace sur le plan offensif. Mais ça ne lui coûtera que 1,1 million $ ou 950 000 $ si jamais Michel Therrien demande à son patron de se débarrasser de Semin en l’envoyant dans la Ligue américaine.

En ce sens, ce pari sera beaucoup moins dispendieux pour le Canadien que l’a été l’expérience tentée l’an dernier avec P.-A. Parenteau qui a marqué huit buts et récolté 22 points en 56 matchs et qui touchait 4 millions $. Les Maple Leafs de Toronto ont d’ailleurs utilisé la même stratégie pour mettre Parenteau sous contrat – un an à 1,5 million $ – que Marc Bergevin l’a fait avec Semin. Les Leafs, comme le Canadien, ont profité de la position de faiblesse de Parenteau et Semin à la table des négociations pour les mettre sous contrat à très bon prix.

Alexander Semin et son agent Mark Gandler ont passé les 48 dernières heures à Montréal en compagnie de Marc Bergevin. Le patron du Tricolore s’est assuré de faire miroiter à Semin et son agent tout le potentiel de son offre.

Bien sûr que Semin et son agent reluquaient un contrat plus riche et plus long en se basant sur les 187 buts et 386 points qu’il a récoltés en six saisons avec les Capitals de Washington, dont une année de 44 buts et 84 points en 73 rencontres en 2009-2010, sa meilleure saison en carrière. Mais Bergevin pouvait aussitôt répliquer avec le fait que Semin a sombré lentement mais sûrement en trois saisons en Caroline pour se contenter de six buts et 19 points en 57 matchs l’an dernier. En plus, Bergevin a sans doute rappelé à Semin qu’il n’arrivait pas à Montréal les poches vides puisque les Hurricanes lui donneront un salaire de 2,333 millions $ l’an prochain et pour les cinq suivantes dans le cadre de son rachat de contrat.

Où jouera Semin?

À cause de son talent, de son potentiel et de son expérience, le Canadien offrira sans doute à Alexander Semin le poste d’ailier droit au sein du premier trio dès le début de la saison. Ça donnerait à David Desharnais ou Tomas Plekanec une deuxième cible de choix en plus de Max Pacioretty. Il va sans dire que Semin devrait aussi être de la première vague de l’attaque massive.

Si Semin occupe encore ces deux postes à Noël, à la date limite des transactions et une fois en séries, on saura que Marc Bergevin a gagné son pari. Un pari qui serait doublement gagnant puisque Brendan Gallagher, aussi bon et teigneux soit-il, occuperait un rôle beaucoup plus à sa taille au sein d’un deuxième trio plutôt que d’évoluer au sein du premier trio. Ce qu’il a fait l’an dernier, parce que personne ne pouvait le chasser de ce poste.

Mais attendons!

Car s’il est capable du meilleur comme il l’a prouvé à maintes reprises depuis son arrivée dans la LNH en 2006. Semin est aussi capable du pire. Et c’est d’ailleurs au pire qu’il nous a habitués au cours des trois dernières saisons. J’ai donc bien hâte de voir comment Michel Therrien arrivera à composer avec un joueur aussi à l’opposé de ses valeurs sans perdre patience et sans s’arracher les cheveux qu’il lui reste sur la tête.

Mais bon! Si Semin gaspille la chance offerte par le Canadien, c’est lui qui sera le grand perdant. Car pour relancer sa carrière et prouver qu’il peut encore, à 31 ans, marquer des buts dans la LNH et obtenir un long contrat, il doit impérativement connaître une grosse saison à Montréal. Rien ne dit qu’il la connaîtra. C’est vrai. Mais on doit donner à Marc Bergevin le mérite d’avoir pris ce pari.