La définition de Ed Snyder, l'influent président du conseil d'administration des Flyers de Philadelphie, sur le terme marché libre est simple et directe.

"Bob Goodenow désire un marché libre pour ses syndiqués. Parfait, je suis prêt à lui consentir un marché libre."

Mais, attention, et ses propos résument bien la théorie des propriétaires, une théorie tout à fait à l'opposé de Bob Goodenow.

"Il veut un marché libre, a-t-il répété devant les membres de la presse de Philadelphie, lundi, alors qu'il devait en principe parler de SON équipe de basketball, les 76ers, nous lui accordons un marché libre mais il doit comprendre une chose. Un marché sans aucune restriction, comme il le voit et comme il le vend à ses syndiqué, signifie aussi abolition de l'arbitrage, abolition des contrats garantis. C'est ça un marché libre."

Snyder n'avait pas terminé son monologue. " Il ne cesse de parler d'un plafond salarial, il associe toutes les offres des propriétaires - et nous en avons déposées six - à un plafond salarial. Il a sa propre définition du terme et les joueurs le croient. Mais, ce que nous disons, nous propriétaires, c'est qu'il y a une somme totale des revenus. Nous proposons aux joueurs un pourcentage de cette somme des revenus. Un pourcentage réaliste et répondant aux exigences de nos entreprises. Moi, je dis que c'est ça un partenariat. Lui, il dit que c'est un plafond salarial. La NBA partage ses revenus avec les joueurs. Curieusement, les salaires ont connu une augmentation substantielle parce que les revenus ont atteint de nouveaux sommets. "

Et en guise de conclusion, Snyder tire une autre flèche en direction de Goodenow. " Il ne veut rien entendre d'un sujet que nous n'avons même pas encore cherché à négocier. Il faut croire que les joueurs et le syndicat ont dressé une ligne dans le sable et qu'ils n'ont pas l'intention de passer cette ligne. "

Le problème, c'est que les propriétaires ont aussi dressé une ligne et qu'ils n'ont pas l'intention de la passer.

Ce qui nous amène à l'option de l'impasse, un sujet qui reviendra de plus en plus dans les discussions puisqu'à écouter les propriétaires et devant la position prise par l'Association des joueurs de la Ligue nationale. L'impasse, comme on le précisait récemment dans cette rubrique, est l'option qui s'offre aux proprios pour imposer unilatéralement un plafond salarial. Pour y arriver, Gary Bettman et son groupe devront prouver devant la Cour, aux Etats-Unis, qu'ils ne peuvent venir en à un accord avec les joueurs, qu'il n'y a pas de volonté de la part des athlètes à trouver des solutions pour la création d'un nouveau système économique.

Si la Cour donne raison aux propriétaires, ils pourront alors décréter que le lock-out est terminé et que les joueurs qui veulent revenir au boulot, aux conditions de la nouvelle convention collective des proprios, seront les bienvenus. En principe, dans une telle situation, l'Association des joueurs conteste la décision de la Cour et déclare la grève. Comme l'avait fait la NFL en 1987.

Au cours des derniers jours, plusieurs joueurs évoluant dans les ligues mineures ont affirmé qu'ils ne refuseraient aucune invitation de la part des équipes de la Ligue nationale. Plusieurs d'entre eux mentionnent qu'ils ne seraient pas des scabs parce qu'ils n'appartiennent pas à l'Association des joueurs de la Ligue nationale.

Ici, dans la Ligue nord-américaine, les joueurs ne sont pas insensibles à ce qui se passe actuellement dans le hockey professionnel. Mathieu Benoit, par exemple, repêché par les Devils du New Jersey en 1997, maintenant avec les Dragons de Verdun, ne cache pas qu'il accepterait une offre d'une formation de la Ligue nationale. " Tu penses à jouer dans cette ligue depuis que tu joues au hockey. Je regarde des gars comme Lecavalier, Richards et compagnie, et je me dis que je pourrais tenir mon bout dans cette ligue. Serais-je un scab? Non, parce que je ne suis pas un membre de l'AJLNH. "

Benoit a 25 ans et ils sont nombreux ceux qui se retrouvent dans le même contexte que lui. David St-Pierre, ex-joueur de l'organisation des Flames de Calgary, n'hésiterait pas non plus si jamais une offrait lui était présenté. Dans la Ligue américaine, plusieurs joueurs ont exprimé le même désir. On dira que les propriétaires n'iront jamais jusque là, qu'ils ne pourraient offrir un spectacle relevé à une clientèle habituée aux meilleurs patineurs du monde. Sauf que les propriétaires savent très bien que la NFL défia cette théorie, il y a plusieurs années, qu'elle força les joueurs de premier plan à réviser leurs positions et à franchir les lignes de piquetage. Et les propriétaires ont un gros avantage, ils ont les contrats de télévision en poche et ils possèdent les amphithéâtres.

Et ils savent très bien que la solidarité s'amenuiserait rapidement parmi les membres du syndicat.