HAMILTON - Ils ont beau mentionner - en tout cas la plupart - qu'ils ne franchiront pas la ligne de piquetage, qu'ils ne défieront pas les membres de l'Association des joueurs de la Ligue nationale, les joueurs qui évoluent dans la Ligue américaine, ceux qui vivent constamment dans l'incertitude, ceux qui ont un contrat des ligues mineures, suivront avec un intérêt particulier la rencontre entre les joueurs de la LNH et Bob Goodenow, la semaine prochaine, à Toronto.

Plusieurs sondages ont été réalisés auprès des patineurs qui gagnent leur vie dans les circuits inférieurs et, dans la grande majorité, on ne veut surtout pas animer les discussions mais n'allez pas croire qu'ils sont indifférents à la possibilité que la Ligue nationale adopte le système des joueurs de remplacement.

Ils devront attendre à mardi alors que Bob Goodenow proposera aux membres de l'association, un autre cocktail Jim Jones. Depuis son arrivée à la tête de l'AJLNH, le directeur exécutif a réussi l'impensable. Il a signé l'improbable. Jamais on avait pensé que les joueurs s'enliseraient de la sorte pour des questions de principe et encore moins qu'ils avaient décidé de suivre un leader qui, en cours de route, a vu sa stratégie échouée lamentablement. Une stratégie qui a entraîné les joueurs au cœur d'un conflit sans précédent avec les propriétaires.

Donc, mardi, Goodenow fera le bilan des négociations qui n'ont jamais été des négociations. Il fera le bilan d'une confrontation qu'il a menée de toutes pièces face cette fois-çi à un Gary Bettman mieux préparé et solidement appuyé par ses employeurs. Comment présentera-t-il ce bilan aux membres du syndicat, c'est une chose. Ce sont surtout les perspectives d'avenir pour l'association qui ne manqueront pas d'attirer l'attention.

Les joueurs veulent savoir dans quelle direction ils se dirigent.

Ils veulent savoir ce qui leur pend au bout du nez.

Ils veulent connaître quelle sera la prochaine stratégie du leader syndical.

Ils vont demander des explications sur la réduction de 24% des salaires.

Ils poseront des questions sur la volte-face de l'association au sujet du plafond salarial.

Pourquoi avoir attendu en février pour finalement reconnaître le plafond salarial?

Goodenow leur servira alors son cocktail Jim Jones. Va-t-on le boire cette fois-çi? Si on se base sur les expériences du passé, le grand patron de l'Association des joueurs possède un sens inné de la persuasion, il pourrait, dit-on, vendre un frigo aux Esquimaux. Aura-t-il cependant assez d'arguments pour convaincre l'auditoire qui vient de laisser tomber $1 milliards en salaire dans cette bataille avec les propriétaires?

Les conclusions de cette rencontre entre les joueurs et leur leader syndical et les membres du comité exécutif, présidé par Trevor Linden, auront une influence déterminante sur les athlètes évoluant dans les marchés inférieurs. Les joueurs de la Ligue américaine peuvent y voir une opportunité unique de réaliser un rêve et surtout d'améliorer leurs revenus. Autre point également : y aura-t-il une grande vedette, parmi les plus hauts salariés du hockey professionnel, qui osera défier l'autorité?

Je suis persuadé que le discours que l'on entend actuellement chez les joueurs qui travaillent dans la Ligue américaine ou encore dans la Eastern Coast League ou tout autre circuit mineur changera si jamais les membres de l'AJLNH durcissent leur position au niveau des négociations et surtout au niveau du plafond salarial. Également, si les membres décident d'accentuer la provocation, combien d'entre eux accepteront le risque d'une autre importante perte de revenus.

Et, il y a la menace des joueurs de remplacement. Il s'agit bien entendu de la pire des solutions pour les propriétaires mais si elle doit conduire le hockey à un système économique semblable à celui de la NFL, ne croyez-vous pas que ça vaut le coût de tenter l'expérience? Ne croyez-vous pas que les propriétaires pourraient alors semer le désaccord chez les joueurs en leur offrant un poste permanent, enfin pour quelques saisons, selon les nouvelles normes implantées par Gary Bettman et son groupe?

Les joueurs des ligues mineures se sentent encore en transit mais ils auront peut-être le choix de devenir des joueurs de remplacement ou encore moisir dans les ligues mineures. Devant une telle possibilité, ils tiendront un discours passablement différent de celui qu'ils prononcent aujourd'hui.