Jonathan Toews peut compter sur les doigts d'une main le nombre de fois où il n'arrivait pas à se détendre avant un gros match.

Reconnu pour son tempérament d'acier, Toews connaît ça, la pression. Il en a vécu lors de championnaux mondiaux juniors. En finale de la coupe Stanley. Lors de matchs numéro 7.

Mais à la fin de février en 2010, Toews était nerveux, quelques heures avant la finale opposant le Canada aux États-Unis, aux Jeux olympiques de Vancouver.

« Il y a peut-être deux ou trois matchs dans ma carrière où je n'ai pas pu dormir la nuit précédente, se souvient le natif de Winnipeg. Et c'est l'un d'eux. »

La tension a perduré jusqu'au but en or de Sidney Crosby à 7:40 de la prolongation, à l'aide d'un tir vif, entre les jambières de Ryan Miller. Il procurait au Canada une victoire de 3-2, plongeant le pays dans une euphorie rarement vue au nord du 49e parallèle.

Moments rassembleurs

Vendredi, ce sera le 10e anniversaire du fameux but, l'un des moments sportifs les plus rassembleurs de l'histoire du pays.

« Vous essayez simplement de gagner un match de hockey, s'est rappelé Crosby plus tôt ce mois-ci, au sujet de l'importance du filet à cette époque. Vous voyez les Jeux comme une grande opportunité. Au Canada, plus jeune, vous rêvez d'être dans une telle situation. Ce n'est qu'après que vous en saisissez l'ampleur. »

Le Canada menait 2-0 à mi-chemin du match grâce aux buts de Corey Perry et Toews qui, à 21 ans, était déjà le capitaine des Blackhawks de Chicago.

Ryan Kesler a répliqué en premier, au deuxième vingt. Puis, avec la foule prête à exploser, Zach Parise a créé l'égalité en glissant un rebond derrière Roberto Luongo, avec 24,4 secondes à disputer au troisième tiers.

« Je me souviens du sentiment, a dit Crosby, maintenant âgé de 32 ans. Vous êtes si proches et nous avons joué un si bon match, puis il faut recommencer. Ce sont de grandes situations à vivre, surtout à un jeune âge. Mais j'étais heureux qu'on trouve un moyen de gagner. »

En 2015, Miller a été questionné à propos de la séquence cruciale où Crosby, le capitaine des Penguins de Pittsburgh, a crié 'Iggy' à Jarome Iginla avant de saisir la passe et de faire mouche.

« J'ai décidé d'anticiper d'une telle façon, a dit Miller. Il a fait un autre type de jeu. Je pensais qu'il allait miser sur son solide revers. »

« Je ne pouvais pas vraiment voir la rondelle passer sous Miller, a mentionné Toews. Mais voir Crosby bondir comme ça en jetant les gants... c'est gravé dans mon esprit. »

Le défenseur canadien Chris Pronger, qui était placé sur le banc pour être témoin du but, a déclaré que le triomphe était encore plus savoureux en raison de l'adversité.

« Ce que l'équipe a traversé pour accéder à l'opportunité, ça en dit long, a confié Pronger, qui a fait son entrée au Temple de la renommée en 2015. Beaucoup de gens ne croyaient pas nous voir aller si loin.

« On pouvait entendre une épingle tomber (après le but de Parise). C'était très calme. Une fois que Crosby a marqué, les gens pouvaient respirer à nouveau. On pouvait voir qu'il y avait beaucoup de visages tendus dans la foule. »

Souvenir indélébile

Bien avant de devenir le capitaine des Oilers d'Edmonton, Connor McDavid a été un adolescent de 13 ans, en banlieue nord de Toronto.

« Tout Canadien qui regarde le hockey peut probablement vous dire où il était, a dit McDavid, dont le joueur préféré en grandissant était Crosby. J'étais avec un groupe de coéquipiers dans le sous-sol de quelqu'un. Quand il a marqué, tout le monde s'est levé et s'est donné l'accolade. C'était spécial. »

Le centre Auston Matthews, des Maple Leafs de Toronto, a regardé le match de chez lui, en Arizona.

« Je me souviens juste d'avoir été stupéfait, a dit le joueur de 22 ans. C'est arrivé si vite. »

« C'est fou que ça fait déjà 10 ans, mentionne Toews, maintenant âgé de 31 ans. Vous savez que c'est spécial à l'époque, mais avec le recul, c'est encore plus incroyable, juste l'expérience unique de faire partie de l'équipe olympique du Canada, ici au pays, et de remporter la médaille d'or. »

Plusieurs souvenirs liés au « but en or »

Sidney Crosby

« Nous devions oublier (le but de Parisé) assez rapidement. Quand une équipe marque aussi tardivement, vous n'avez pas beaucoup de temps pour y penser. Nous comptions sur un bon groupe de leaders et avons su garder notre calme. Je m'en souviendrai toujours.»

Jonathan Toews

« Tout le centre-ville refusait d'aller au lit (la veille du match). Dans le Village olympique, on pouvait tout entendre. Toute la ville a fait la fête toute la nuit. Ça a été difficile de se calmer et de ne penser qu'au hockey cette nuit-là. »

Chantal Petitclerc

« Je m'en rappelle très bien, car mon conjoint est un grand amateur de hockey et je suis une grande partisane du Canada. Nous portions des chandails du Canada. Je les avais eus lors de Jeux précédents. Je me rappelle les cris dans la maison même s'il n'y avait que nous deux.»

Auston Matthews

« Assurément, j'appuyais les Américains. Mais ça ne s'est pas produit. Je me rappelle avoir eu beaucoup de plaisir à regarder ces Jeux. Ce match était très stressant. »

Doug Ford, premier ministre de l'Ontario

« J'étais si fier d'être Canadien à ce moment-là. Je me rappellerai toujours être monté en voiture avec ma conjointe et mes filles après ce match. Les filles faisaient voler leurs drapeaux canadiens de la fenêtre. Les rues étaient remplies de partisans, tout le monde était très fier d'être Canadien. »

Chris Cuthbert, descripteur

« C'est le plus grand match que j'aurai décrit dans ma carrière. La tension dans l'aréna, je ne pense jamais ressentir cela. »

« Je me souviens aussi qu'avec environ deux minutes à faire, je me suis dit: 'Il va falloir que tu te trouves une façon de décrire cette victoire, parce qu'elle s'en vient." Puis, avec une trentaine de secondes à jouer, les États-Unis ont créé l'égalité. »

Gilles Courteau, commissaire de la LHJMQ

« Je me souviens très bien du but. J'étais chez moi avec ma famille. Ç'a été un match extraordinaire et nous ne pouvions pas nous attendre à une meilleure fin. Nous étions heureux pour Équipe Canada, mais aussi pour Sidney. C'est toujours plaisant de voir des anciens de notre ligue se démarquer lors de moments semblables. »

Dawson Mercer, Saguenéens de Chicoutimi

« Les membres de ma famille sont de très grands amateurs de hockey alors j'étais avec eux dans le salon. C'était toujours une grosse histoire de regarder le Canada jouer dans des événements internationaux. Nous étions anxieux de connaître le résultat et quand Sidney a marqué, nous avons bondi hors de nos sièges. Je pense que ç'a dû être la même réaction pour tout le monde au Canada. »

Brett Kissel, chanteur country

« Je me souviens d'être tellement nerveux pour ce match. En route vers la maison de mon frère, je me souviens avoir vu des centaines de drapeaux canadiens sur les fenêtres des voitures. Je me souviens m'être dit, en arrivant chez mon frère: "c'est le plus grand match de notre vie" ».

Nick Suzuki

« Je me souviens exactement où j'étais. Ce match est probablement mon favori.»

Jim Balsillie, cofondateur, BlackBerry

« Plus le match avançait, plus la tension était étouffante dans l'amphithéâtre. Puis, j'ai entendu la plus grande explosion sonore de ma vie. Le but de Crosby était un moment parfait, digne des contes de fées. Je ne l'oublierai jamais. Après, j'ai pu mettre la main sur une des rondelles authentifiées de cette rencontre. Elle est bien en évidence au chalet, afin de démontrer à tous que le Canada peut jouer dans la cour des grands.»