LAVAL – Christopher Clapperton avait 14 ans quand ses parents ont pris la décision de quitter la Gaspésie pour se rapprocher des grands centres afin de favoriser son développement sur la patinoire. La famille s’est établie à Rivière-du-Loup, où l’adolescent a évolué pendant deux saisons avec les Albatros du Collège Notre-Dame au niveau Midget AAA.

À 17 ans, Clapperton s’est engagé pour un stage de trois ans avec l’Armada de Blainville-Boisbriand. Il a ensuite terminé son stage junior avec l’Océanic de Rimouski, puis est passé chez les professionnels avec les Solar Bears d’Orlando, dans la ECHL. Là, il a commencé à se poser des questions.

Cédric Paquette, son complice gaspésien, amorçait déjà sa deuxième saison dans la Ligue nationale. Danick Martel, Marc-Olivier Roy, Nikita Jevpalovs et Daniel Walcott commençaient à s’établir dans la Ligue américaine. Clapperton, qui avait marqué 113 buts durant son stage junior, n’avait que cinq petits points en 17 rencontres dans la ECHL lorsqu’il est arrivé à la conclusion qu’il n’était pas à sa place.

« Ce qui me stressait, à 20 ans, quand je suis arrivé chez les professionnels, c’est ce que j’allais faire après mon hockey si ça marchait pas, se remémorait le natif de Chandler cette semaine dans les coulisses de la place Bell. Je voyais que je ne jouais pas beaucoup. J’étais dans la ‘East Coast’ et ça n’allait pas super bien. J’avais de la misère à voir mon futur avec le hockey. »

Le choix de cinquième ronde des Panthers de la Floride en 2013 a donc décidé de mettre ses ambitions sur la glace et d’accepter l’invitation du programme de l’Université du Nouveau-Brunswick à Fredericton. Il ne peut se retenir de sourire quand il repense à la réaction de ses parents quand il leur a annoncé qu’il renonçait, pour un bout de temps en tout cas, au hockey professionnel.

« Je ne te le cacherai pas, j’étais pas un gars d’école en partant. Je pense que mes parents ont été surpris que j’aille à l’école, ça c’est sûr. Mais ils m’ont toujours supporté et aujourd’hui ils sont super fiers de moi. Ça n’a pas été facile [comme décision], mais il a fallu que je détermine mes priorités. »

Les quatre années suivantes ont été une bénédiction pour Clapperton. Le calendrier moins chargé du circuit universitaire lui a permis de soigner les petites blessures qu’il avait accumulées et le calibre de jeu lui a permis de retrouver la touche offensive qui lui permettait de se démarquer au niveau junior. À sa troisième saison, il a été élu sur la deuxième équipe d’étoiles au pays. À sa quatrième, la consécration : en plus de mériter sa place sur la première équipe d’étoiles à l’échelle nationale, il a remporté le titre de joueur par excellence du réseau universitaire canadien avec une récolte de 47 points en 30 matchs. En mars 2019, il a quitté les bancs d’école avec deux titres nationaux et un diplôme en poche.

À 25 ans, le temps était venu de refaire du hockey sa priorité.

« Ça a été un très long détour. Ce n’est pas un chemin super facile, mais je suis rendu. L’universitaire m’a permis de beaucoup travailler sur ma game. Maintenant, je suis à la même place qu’eux autres », réfléchit-il en pensant à ses anciens compagnons du junior.

Une potentielle menace offensive

En mars dernier, Clapperton a signé un contrat d’un an avec les Senators de Belleville, le club-école des Sénateurs d’Ottawa. Après avoir débuté la saison dans la ECHL, il a fait ses débuts dans la Ligue américaine le 8 novembre. Il y a disputé son quatrième match en six jours quand les B-Sens ont rendu visite au Rocket à Laval mercredi dernier. 

Puis, au lendemain d’une victoire de 5-4 en prolongation, les Senators l’ont renvoyé à l’échelon inférieur. Après les matchs du week-end, il totalise 13 points en dix parties avec le Beast de Brampton.

« J’ai hâte de voir sa progression, disait Troy Mann, le superviseur de la relève ottavienne à Belleville, avant le match contre le Rocket. Parce qu’il est si rapide et qu’il n’a peur de rien, je vois en lui une potentielle menace offensive dans la Ligue américaine. Il doit encore améliorer son jeu de position – il lui arrive de se faire prendre parce qu’il veut trop en faire – mais c’est un vrai lapin Energizer. Je crois qu’il ne peut que continuer de s’améliorer. »

« Je suis certain que je suis de calibre, s’encourageait quant à lui Clapperton, mais ce n’est pas moi qui décide en bout de ligne. Il y a beaucoup de blessés en haut et il y en a tout autant ici. Quand ils vont revenir, il va falloir que je m’assure de rester. »

Les bons souvenirs de Joël

Clapperton a fait partie de la toute première édition de l’Armada. Joël Bouchard, qui faisait partie du personnel d’entraîneurs de la nouvelle concession, dit ne garder que de bons souvenirs du rouquin gaspésien.

« C’est un gars qu’on a repêché, qu’on aimait beaucoup, avec une personnalité extraordinaire, beaucoup d’enthousiasme. J’ai eu beaucoup de bonnes discussions avec lui. Il a fait partie de beaucoup de beaux matchs avec nous et de belles séries éliminatoires. J’adore Clapper. »

« Autant j’ai été dur avec, j’ai des belles histoires de Christopher. Des fois, il venait dans le bureau après la première période et me disait : ‘Je trouve que je joue bien’ et je lui disais ‘Ok, je vais te montrer quatre séquences’. Il regardait et disait : ‘Ok, c’est beau’. Il avait beaucoup de fire in the belly. Le feu, il l’a. Des fois, il fallait juste le guider, mais ça n’a jamais été le genre à se braquer. J’adore ce petit gars-là. »

Bouchard dit avoir étudié la possibilité d’amener Clapperton avec lui à Laval, mais le Rocket ne pouvait rivaliser avec l’offre que Belleville était prêt à lui faire.

« Toutes les équipes ont leur réalité, leur propre bassin d’espoirs. Je laisse les dirigeants faire leur travail. On en a parlé, mais on aime beaucoup Jevpalovs, Joe Cox, des gars à qui on a offert des nouveaux contrats.  À moment donné, tu ne peux pas signer des gars pour signer des gars. »