OTTAWA - Alors que Brian Burke s'apprêtait à accepter le poste de directeur général des Canucks de Vancouver au printemps 1998, plusieurs dirigeants de la LNH ont tenté de l'en dissuader et lui ont suggéré d'attendre pour un poste plus stable.

Ces gens n'en avaient pas contre l'organisation des Canucks. C'est plutôt contre le dollar canadien qu'ils en avaient. Ils estimaient alors que Vancouver, comme les cinq autres formations canadiennes, étaient menottées économiquement en raison de la faiblesse de la devise canadienne.

Bien des choses ont changé en 10 ans. Burke est demeuré à Vancouver jusqu'en 2004 et il est maintenant le directeur général des Ducks d'Anaheim.

Ce qui est encore plus significatif cependant, c'est ce qui est arrivé au dollar canadien.

Après avoir atteint le fond du baril à 61,79 cents US en janvier 2002, la pièce dorée a atteint la parité avec le billet vert américain en septembre dernier - la première fois depuis 1976 - atteignant même un sommet à 1,07 $ en novembre. Présentement, le dollar canadien fait du surplace à environ un cent du dollar américain, valeur qu'il devrait garder en raison du boom pétrolier que connaît l'Alberta.

Cette montée du huard signifie que les clubs canadiens de la LNH, qui ont déjà demandé au gouvernement fédéral de leur octroyer des bénéfices fiscaux afin de se maintenir à flots, se trouvent soudainement nez à nez avec leurs partenaires américains. Et ces clubs utilisent ces nouvelles ressources pour offrir de lucratifs contrats, une pratique qui aurait pu mettre en péril la santé financière de ces clubs il y a quelques années seulement.

"C'est bien pour nous, car on peut tenter des trucs auxquels on n'aurait pas pu penser auparavant, a expliqué le dg des Oilers d'Edmonton, Kevin Lowe. Nous serons capables de garder des joueurs, voire même de faire des offres à des joueurs autonomes que nous aurions été incapables de faire par le passé."

D'ailleurs, les Oilers été très actifs l'été dernier. Ils ont offert un contrat de 50 millions $ sur sept ans à Thomas Vanek, des Sabres de Buffalo, alors joueur autonome avec compensation. Les Sabres n'ont pas eu le choix que d'égaler cette offre pour garder Vanek au sein de leur alignement. Loins d'être découragés, les Oilers ont ensuite offert un contrat de 21,25 millions $ sur cinq ans à Dustin Penner, qui se trouvait dans la même situation contractuelle que Vanek. Cette fois, les Ducks ont décidé de ne pas égaler l'offre.

Cette vigueur n'est pas ressentie que dans la LNH. Les Blue Jays, du baseball majeur, et les Raptors de Toronto, de la NBA, profitent aussi de cette hausse du dollar, dans une moindre mesure, puisque la majeure partie de leurs revenus - les droits de télévision et les revenus marketing - est récoltée en dollars américains.

Néanmoins, l'impact est bien réel.

Le président des Blue Jays, Paul Godfrey, a déclaré que chaque fois que le dollar canadien gagne un cent, les profits de son équipe grimpent de 750 000 $. En comparaison, Burke a expliqué que les Canucks perdaient 400 000 $ de profits à chaque fois que le dollar perdait un cent.

Contrairement aux équipes du baseball majeur et de la NBA, les clubs de la LNH dépendent plus des revenus locaux en raison de contrats de télédiffusion considérablement moins lucratifs. C'est cette réalité qui a forcé le déménagement des Nordiques de Québec au Colorado, où ils sont devenus l'Avalanche, et des Jets de Winnipeg, devenus les Coyotes de Phoenix.

L'an dernier, cette tendance a failli être renversée quand le milliardaire canadien Jim Balsillie a tenté de se porter acquéreur des Predators de Nashville et de les déménager à Hamilton.

Cette tendance se remarque aussi au niveau du plafond salarial, instauré au retour du lockout. De 39 millions $ lors de la saison 2005-06, il est passé à 56 millions $ pour la prochaine saison.

Selon le sous-commissaire de la LNH, John Daly, les revenus de la ligue ont progressé de 12 pour cent la saison dernière, dont 25 pour cent sont directement liés à la vigueur du dollar canadien.

Bien que certains clubs aient exprimé des réserves vis-à-vis de ce plafond de 56 millions $, Daly - qui admet que la ligue ne l'avait pas prévu - ne croit pas que ce soit un problème.

"Le plafond augmentera toujours et ce sera toujours une bonne chose, puisque ça exprime la vigueur de notre entreprise, a-t-il dit. La LNH se porte bien. Et ça, c'est une bonne chose."