Le rôle de deuxième gardien d'une équipe en est un négligé dans la Ligue nationale de hockey.

Je crois fortement qu'un gardien de but mérite un statut de numéro un, mais je crois aussi qu'une bonne utilisation du deuxième gardien peut permettre à une équipe de remporter quelques victoires supplémentaires au cours d'une saison.

Il est important pour un entraîneur de reconnaître les situations lorsque son gardien numéro un - l'homme qui va gagner la majorité des matchs - est fatigué ou qu'il est dans un zone de confort malsaine. Il n'y a pas de secret sur l'utilisation des gardiens auxiliaires, sauf que ceux-ci peuvent aller chercher quelques points importants au classement qui peuvent faire la différence.

Lundi face aux Flyers, Mathieu Garon a remporté une deuxième victoire en autant de départs cette saison pour les Blue Jackets de Columbus. Au cours des dernières campagnes, Garon a accepté son rôle. Il n'a peut-être jamais été le gardien de but numéro un qu'il aurait aimé devenir. Cependant, un peu comme un bon marqueur au niveau junior ou dans la Ligue américaine, il a su adapter son jeu pour faire sa niche et connaître une longue carrière dans la LNH. Comme comparaison, le premier nom qui me vient en tête est Ian Laperrière. Ce dernier a inscrit plus de 70 buts dans le circuit junior majeur québécois. Il a trouvé son identité dans la LNH comme étant un joueur fiable en défensive, au niveau des mises en jeu…c'est un guerrier.

C'est quand même difficile à transposer pour un gardien, mais peut-être que Mathieu a compris qu'il devait jouer ce rôle. C'est une qualité exceptionnelle que d'avoir des départs espacés, sauter dans la mêlée et ne pas ressentir de séquelles de ce temps d'inactivité.

Depuis deux saisons à Columbus, Garon a participé à 37 matchs. Dans la plupart des cas, les gardiens réservistes obtiennent plusieurs de leurs départs à l'étranger. Scott Arniel devrait faire confiance à Garon plus souvent à domicile puisqu'il n'a jamais perdu au Nationwide Arena en temps réglementaire depuis deux saisons! Lorsque qu'un entraîneur sait qu'il peut employer son second à la maison, c'est un atout dans son jeu de carte.

Une foule intriguée à Columbus

Lors des cinq premières saisons de l'équipe que j'ai disputées à Columbus, je ne pense pas avoir vu un seul banc vide dans l'amphithéâtre. C'est un building où j'adorais évoluer. C'est assez formidable puisque l'aréna où l'équipe s'entraîne est situé dans le même complexe où elle dispute ses matchs. On ne quittait jamais le Nationwide Arena, alors on se sentait vraiment à la maison. Nous ne remportions pas nécessairement beaucoup de victoires à cette époque, mais nous présentions des dossiers respectables à domicile.

C'est une foule intriguée, énergique, qui s'installait lors de nos matchs à la maison et qui s'émerveillait lors d'un bon jeu ou un gros arrêt. Les gens étaient prêts à accueillir un sport des ligues majeures et ont appris à aimer le hockey au fil des ans.

L'importance d'un bon vétéran

J'ai déjà abordé ce sujet au cours de mes chroniques précédentes, mais je réaffirme qu'il est important de bien encadrer un jeune gardien de but numéro un.

À l'instar de Garon, Brent Johnson est un vétéran qui a roulé sa bosse dans la LNH. Au cours de sa carrière, il a connu ce qu'est être un gardien de but numéro un. Johnson a aussi accepté son rôle de réserviste. Avec une équipe qui aspire aux grands honneurs, c'est important de compter sur la présence d'un vétéran de sa trempe.

À Pittsburgh, Johnson peut être une solution de rechange parfaite lorsque Marc-André Fleury connaît des problèmes. Et Fleury n'est pas à la hauteur depuis le début de la saison, il ne faut pas se cacher.

En raison des bonnes performances qu'offrent Johnson, ça donne le temps à Fleury de retrouver son niveau d'excellence. Ça donne aussi le temps à l'équipe de continuer d'enregistrer des victoires. Pittsburgh est peut-être l'exemple parfait qui prouve la théorie que j'énonce lorsqu'on parle de l'utilisation adéquate des gardiens auxiliaires.

Du côté de Vancouver, c'est un peu l'inverse qui se produit, mais c'est tout aussi important. Corey Schneider a bien fait à ses débuts lorsqu'il a été appelé en relève à Roberto Luongo. Ce dernier est l'homme de la situation à Vancouver et jouit d'un statut particulier. Des gardiens de la trempe de Luongo et Martin Brodeur ont l'expérience et le statut pour le faire.

Ça faisait longtemps qu'il n'y avait pas eu un jeune gardien jouant le rôle de second violon. Lorsqu'un vétéran gardien numéro un prend énormément de place, la solution de rechange doit être tournée sur l'avenir. Il est rare qu'un vétéran encadre un autre vétéran. La même chose était survenue dans le cas de Patrick Roy au Colorado vers la fin de sa carrière; j'étais là et David Aebischer également.

Quel début de saison pour Tim Thomas

La plus grande qualité du gardien des Bruins de Boston Tim Thomas, c'est vraiment son désir d'arrêter les rondelles et non sa technique! Chose certaine, il présente d'incroyables statistiques depuis le début de la présente saison.

Parfois, Thomas va se retrouver dans des positions abracadabrantes pour effectuer ces arrêts! Lorsqu'il est sorti des rangs collégiaux, il était tout un espoir. Il n'a pas été en mesure de faire sa place rapidement dans les rangs professionnels, après avoir été repêché par les défunts Nordiques. Il a quitté pour l'Europe, avant de revenir dans la LNH. C'est tout en son honneur. C'est un peu de la même manière dont il garde les filets; c'est un battant, un atout important pour un gardien. Dans son cas, même si Tuukka Rask lui a ravi le poste de numéro un la saison dernière, on ne peut parler de lui comme un réserviste puisqu'il est un ancien gagnant du trophée Vézina.

De son côté, Rask vit ses premiers moments d'adversité dans la LNH. Pour son apprentissage à long terme, je pense que le fait que Thomas ait repris le dessus sera plutôt positif pour la suite de sa carrière.

Premier départ pour Alex Auld avec le CH

Si la tendance se maintient, Alex Auld n'obtiendra pas beaucoup de départs cette saison avec le Canadien. Par contre, il aura certainement la chance de débuter un premier match au cours de la fin de semaine. C'est une opportunité pour lui et pour le Canadien de voir ce dont il est capable.

Ça fait un bon bout de temps qu'il n'a pas participé à un match, mais c'est son rôle. Même s'il ne faut pas mettre énormément de pression sur Auld, son prochain départ dictera quand même son utilisation future, surtout lorsque le calendrier sera plus chargé.

Lorsqu'un jeune gardien de but va très bien - comme Carey Price en ce moment - le rôle du numéro deux est tout aussi important. Un gardien auxiliaire doit "flirter" avec une fiche de ,500. C'est un peu le chiffre magique à atteindre pour un second gardien. Les performances de Auld peuvent donner confiance à son personnel d'entraîneurs. Il faudra l'utiliser pour donner un répit à Price.

Ceci dit, j'ai confiance en Price, mais inévitablement, il va connaître une baisse de régime cette saison. Il faut choisir un moment dans le calendrier où Price profitera d'un repos salutaire. Le rôle de Auld est de donner confiance à ses coéquipiers lorsqu'il est devant le filet.

Si Auld connaît un mauvais match, il ne faut pas avoir peur de l'utiliser lors des séquences de trois matchs en quatre soirs, par exemple. Il faudra faire appel à ses services pour ne pas hypothéquer le reste de la saison. Jacques Martin et son équipe porteront une attention particulière à la situation.

Propos recueillis par Luc Dansereau