MONTRÉAL – Les souvenirs de la saison 2020-2021 se bousculent et s’entrechoquent dans un concert de contrastes dans la tête de Zachary L’Heureux.

Statistiquement, l’attaquant des Mooseheads de Halifax a augmenté le rythme de production qu’il avait maintenu à son année recrue. La confirmation de ses talents de marqueurs, combinée à la consolidation de son identité de joueur physique et perturbateur, l’a mené au point culminant de sa jeune carrière. En juillet, il a été un choix de première ronde des Predators de Nashville, le 27e au total du repêchage de la Ligue nationale.

Mais cette réputation d’agitateur a fini par lui coller à la peau au point de devenir lourde à porter. Ses écarts de conduite ont été bien documentés. L’Heureux a été suspendu pour quatre offenses différentes qui lui ont fait rater un total de 13 matchs, dont trois qu’il a dû purger au début de cette saison. Quand les fils se touchaient, ça pouvait vite devenir laid.

Le mot a commencé à se passer. Il a entendu des choses à son sujet dont il aurait pu se passer.

« C’est facile à dire que je suis une tête brûlée, que je me faisais suspendre tout le temps sans raison, se remémore le jeune homme de Mercier en entrevue avec RDS. Mais je sais que la plupart de ceux qui disaient ça n’avaient probablement vu aucun de mes matchs. Ils faisaient juste voir des chiffres sur des papiers, ils ne comprenaient pas les circonstances et les raisons pour lesquelles je me faisais suspendre. Je peux me défendre pendant des heures sur ce sujet-là, mais en même temps, c’est pas quelque chose que j’ai besoin d’aborder non plus. »

« Le monde peut avoir leur opinion, poursuit-il. Je me connais, je sais ce que je suis capable de faire sur la glace, ce que je suis capable d’amener à une équipe. C’est pas quelque chose qui me dérange non plus. »

L’été a toutefois permis à L’Heureux de prendre du recul et de réaligner sa vision des choses. Il a compris qu’il pouvait rester la peste qui empoisonne l’existence de ses rivaux sans en faire aussi payer le prix à ses propres coéquipiers.

« Cette phase-là d’être suspendu tout le temps, je veux vraiment la laisser derrière et passer à autre chose, met-il au clair. Avec la maturité, avec l’âge, je pense que je suis capable de le réaliser et de me contrôler un peu plus aussi. Je pense que cette année, ça va être une bien meilleure année comparée à l’année passée. Je pense que je vais être capable de tourner la page pour de bon et me concentrer sur moi-même au lieu de me laisser déranger par des petites affaires. »

Nuance

La saison est encore jeune, mais L’Heureux semble respecter sa résolution. Après trois matchs, il a déjà récolté cinq points – le trio qu’il forme avec Elliot Desnoyers et Jordan Dumais est l’un des plus productifs de la LHJMQ – et n’a passé que deux minutes au cachot.

« Ultimement, je ne veux pas changer la façon dont je joue. Tout le succès que j’ai eu jusqu’à date, c’est relié à ça. Je pense que c’est vraiment juste de reconnaître les bons moments », nuance le joueur de 18 ans.

« C’est quand le moment de tester un peu plus la limite pour apporter un peu plus d’énergie? C’est quand le temps de lâcher la pédale parce que je ne veux pas mettre mon équipe dans le trouble non plus? Je pense que c’est une des affaires que je suis capable de comprendre un peu plus en ce moment. Mais je ne vais pas changer ma game. Je vais parler aux gars de l’autre équipe, je vais essayer de rentrer dans leur tête, ça ne va pas changer. Je le sais aussi que je vais m’asseoir dans la boite une couple de minutes! C’est quelque chose qui est naturel. Mais je veux garder ça entre les sifflets. Des petites affaires qui ne sont pas nécessaires, je peux me replacer et comprendre que je ne suis pas obligé de le faire. »

 « Il faut qu’il garde ce edge, insiste l’entraîneur-chef des Mooseheads, Sylvain Favreau. Le monde le compare à Brad Marchand. Ça serait comme dire à Brad Marchand d’arrêter d’être dans la face de ses adversaires. Ça ne marcherait pas son affaire. Il faut qu’il le garde. Sauf qu’en même temps, Zach a fait des gros pas au niveau de sa maturité. Un edge sur la glace et un edge d’indiscipline, ce sont deux choses différentes. »

En arrivant de son premier camp avec les Predators, L’Heureux a retrouvé un « A » cousu à son chandail. C’est l’une des façons qu’a trouvées Favreau, un adjoint de longue date qui vient de succéder à Jean-Jacques Daigneault à la barre des Mooseheads, pour responsabiliser sa volcanique vedette et en contrôler les éruptions.   

« On ne l’a pas nommé assistant parce qu’il est un choix de première ronde. C’est à cause qu’on croit en lui. Zach, c’est tellement une bonne personne. Des fois, il est peut-être jugé sur certaines erreurs qu’il a faites dans le passé, mais on veut lui donner l’opportunité de se prouver comme leader. Jusqu’à maintenant, il fait une job incroyable. »