Chaque mardi, le RDS.ca vous offre Le Carnet LHJMQ, un assemblage des faits marquants du week-end précédent dans le circuit Courteau.

Le dilemme du Phoenix

Pendant que ses homologues des Maritimes attaquaient la période de transactions hivernale comme s’ils venaient de se réveiller dans le dortoir de Squid Game, le directeur général de la meilleure équipe au classement de l’Association Ouest se demandait encore s’il allait vendre ou acheter.

L’étonnant rendement du Phoenix de Sherbrooke (19-7-2) en première moitié de saison a placé Stéphane Julien devant un dilemme qu’il n’avait pas nécessairement vu venir. À gauche, rester fidèle au plan initial et monnayer quelques vétérans afin de renforcer son effectif pour 2023. À droite, corriger légèrement le tir et colmater les brèches les plus flagrantes afin de récompenser un groupe qui offre un rendement au-dessus des attentes

« Ça aurait été facile d’échanger un [Xavier] Parent ou un [Julien] Anctil. J’avais 3-4 joueurs pour lesquels il y avait de l’intérêt. Mais avec le début de saison qu’on a eu et la culture qu’on a montée depuis le début de l’année, je me sentais mal de reculer pour l’année prochaine », a conclu Julien.

L’architecte sherbrookois a finalement décidé de favoriser l’option B, qui s’est manifestée par l’ajout des défenseurs Kaylen Gauthier et Tyson Hinds. Le premier est un arrière résolument défensif qui quitte Drummondville pour venir rejoindre son jeune frère, le tout premier choix du dernier repêchage Midget Ethan Gauthier. Le deuxième est une réelle prise d’envergure : Hinds, un choix de troisième ronde des Ducks d’Anaheim l’été dernier, en impose physiquement et peut apporter sa contribution offensivement. Il avait 16 points en 23 matchs avec l’Océanic de Rimouski.

« On avait marqué beaucoup de buts depuis le début de la saison. Notre attaque a de l’expérience et est bien diversifiée avec un bon groupe d’âge. Je trouvais que c’était à la défense qu’il fallait que j’améliore notre équipe, justifie Julien. [David] Spacek et [Maxime] Blanchard nous avaient donné beaucoup de bon hockey, mais je les sentais fatigués en décembre. Ils jouaient chacun entre 25 et 27 minutes par match. »

Les deux transactions ont nécessité un sacrifice substantiel – un total de cinq choix au repêchage, dont un droit de parole au premier tour de l’encan de 2023, en plus du jeune défenseur de 17 ans Zachary Lessard – mais elles remplissent le double objectif de renforcer le Phoenix pour le dernier droit de la saison actuelle ainsi que pour le pic de son cycle prévu pour l’an prochain. Gauthier devrait rester à Sherbrooke comme joueur de 20 ans tandis que Hinds n’a que 18 ans.

Et Julien a complété ce boulot tout en gardant un œil attentif sur ses rivaux à Gatineau et Shawinigan, où on n’a rapporté aucun coup d’éclat majeur. La lutte entre ce trio de tête promet dans l’Ouest.

« On est contents de ce qu’on a fait. C’est sûr que si j’avais eu la chance de m’améliorer raisonnablement en attaque, je l’aurais fait, mais on n’en a pas eu l’opportunité tant que ça avec les prix qui ont été payés dans les Maritimes. Ils ont frappé fort au début. Saint John cherchait un peu partout et faisait monter les prix. Ça a shaké le marché, mais ça fait partie de la game. »

Le calcul de l’Océanic

« Donne-moi cinq minutes de meeting, ça va être réglé! », lance en riant le toujours convaincant Serge Beausoleil lorsqu’on lui demande s’il s’attend à avoir des explications à donner à ses joueurs pour les décisions qu’il a prises sur le marché des transactions.

L’Océanic représente l’une des plus belles surprises de la première moitié de saison dans la LHJMQ. Sans véritable vedette à son bord, il a jusqu’ici maintenu une fiche de 16-10-2 qui lui confère le troisième rang du classement de l’Association Est. Ce succès, l’équipe du Bas-St-Laurent le doit à une défensive impénétrable, l'une des meilleures du circuit Courteau. Elle n’a accordé que 73 buts en 29 matchs, un rendement auquel seuls les puissants Remparts de Québec peuvent se comparer.

Pourtant, lorsque les DG de la Ligue ont eu le droit de transiger, Beausoleil a décidé de soustraire trois imposants morceaux de sa brigade défensive. En plus d’envoyer Hinds à Sherbrooke, il a cédé Jérémie Biakabutuka, 19 ans, aux Islanders de Charlottetown et Gabriel Jackson, 20 ans, aux Voltigeurs de Drummondville.

« Quand on a vu aller les clubs comme Bathurst, Charlottetown, Saint John et Québec qui sont tous de notre côté du tableau, explique Beausoleil en faisant référence aux puissances – établies et attendues – dans l’Est– on se rendait bien compte qu’on allait affronter dans la première portion des séries un club qui aurait été très agressif au niveau des échanges. Alors nous, on a décidé de continuer de miser sur notre croissance interne en monnayant des joueurs qui avaient plus de valeur chez nous et continuer à solidifier nos bases pour ce qui s’en vient dans un futur proche. »

De l’Île-du-Prince-Édouard, Beausoleil a déraciné Mathis Aguilar, un gaucher de 6 pieds 3 pouces qui n’a aucun point et un différentiel de -2 en 27 matchs. « Il jouait derrière la parade à Charlottetown, mais il a un très beau potentiel. Un gros défenseur avec un bon bâton qui joue une game qu’on adore. Il va venir stabiliser beaucoup de choses en défensive », prédit son acquéreur.

Lessard, un droitier de plus petit gabarit, avait été un choix de deuxième ronde du Phoenix en 2020. « Il débutait tous les matchs en jouant avec [Joshua] Roy, Anctil et Parent. C’est un beau vote de confiance pour un 17 ans qui mangeait 20 minutes de jeu par match. Il ressemble beaucoup au profil de Tyson Hinds quand on était allés le chercher, à la différence près qu’il joue 20 minutes au lieu d’en jouer 12-13 », décrit Beausoleil.

Il serait injuste d’attendre de ces nouveaux venus qu’ils comblent immédiatement le vide laissé par le départ des vétérans. Mais quand vient le temps de juger les succès défensifs de l’Océanic, Beausoleil nous prévient contre l’utilisation de raccourcis.

« Personne ne va nier que les gars qui sont partis étaient importants dans notre formation. Mais ultimement, on fait fausse route si on pense que la défensive de l’Océanic de Rimouski se résume au travail des défenseurs. C’est une façon de jouer au hockey, c’est une façon d’impliquer les attaquants, c’est une façon commune de défendre. C’est là-dessus qu’on va travailler encore, c’est ce qu’on va continuer à marteler aux gars. »

« On a laissé partir des morceaux très importants, mais il n’en demeure pas moins qu’on va encore avoir une équipe avec beaucoup d’ascendant sur la glace. Moi je pense que ça ne sera pas très long avant que tout le monde soit aiguillé dans le même sens », promet Beausoleil.

Le ménage est complété à Victoriaville

Le suspense était inexistant à Victoriaville. Les Tigres alignaient encore quelques vétérans qui les avaient aidés à soulever la Coupe du Président le printemps dernier. C’était un secret de polichinelle qu’ils allaient être offerts au plus offrant dans les jours précédents la date limite des transactions.

À l’heure des bilans, le directeur général Kevin Cloutier sort de l’opération avec le sentiment du devoir accompli. Pour un quatuor composé de Vincent Sévigny, Conor Frenette, Olivier Coulombe et Nikolas Hurtubise, Cloutier a raflé un total de huit choix au repêchage, dont cinq dans les deux premières rondes.

« L’année passée, on a payé pour des gars de 20 ans. On était allés chercher Shawn Element, Alexis Arsenault et Benjamin Tardif. Avec Sévigny, on a récupéré ce qu’on avait payé pour Element. Avec Frenette, on a obtenu exactement ce que nous avait coûté Arsenault », note Cloutier avec satisfaction.

S’il était passé par le marché des transactions pour apporter la touche finale à son équipe championne, Cloutier avait majoritairement utilisé le repêchage pour en construire la base. En remontant à l’encan de 2017, on recense pas moins de neuf joueurs découverts par les Tigres qui se sont éventuellement retrouvés avec une bague au doigt. Du groupe, seul Pier-Olivier Roy, issu de la cuvée 2020, a été un choix de première ronde.

En 2017, les défenseurs Sean Larochelle (20^e choix au total) et Sévigny (29^e) ainsi que le gardien Fabio Iacobo (47^e) avaient pris la direction de Victo. L’année suivante, Frenette (53^e), Hurtubise (55^e) et le défenseur Massimo Siciliano (101^e) avaient été ajoutés au noyau. Zachaël Turgeon (62^e) et Loïck Daigle (79^e), repêchés en 2019, ont aussi eu un petit rôle à jouer dans la conquête.  

Engagé dans un nouveau cycle, Cloutier entend suivre la même manière d’opérer pour retourner au sommet.

« On a beaucoup de joueurs qui sont entrés dans le lineup cette année qui ont été repêchés il y a deux ans. Du repêchage de cet été, on a [Justin] Gendron et [Justin ] Larose qui sont rentrés aussi. C’est déjà en marche. On a des gars là-dedans qui ont déjà joué de bonnes minutes avant les Fêtes. Ils vont avoir encore plus de responsabilités au retour au jeu et c’est autour d’eux qu’on veut repartir la machine. On mentionne souvent les noms de Pier-Olivier Roy et Maxime Pellerin, qui sont nos deux derniers choix de première ronde. Ils ont 17 et 18 ans. C’est autour d’eux qu’on veut rebâtir la suite. »

Parmi les autres joueurs qui auront la chance de s’insérer dans la conversation cet hiver, on compte le défenseur Benjamin Vigneault, qui terminera la saison avec l’équipe après l’avoir amorcée au niveau M18AAA. Les Tigres ont aussi annoncé qu’Alexis Jacques, un défenseur de 16 ans qui évoluait jusque-là aux États-Unis, joindrait les rangs de l’équipe.

« Il y a moyen de revenir le plus rapidement possible à ce qu’on était l’année passée, conclut Cloutier, optimiste. C’était le but et on s’en va tranquillement par là. »

Aux quatre coins de la « Q »

-Pour ceux qui l’avaient raté, on s’entretenait la semaine dernière avec le directeur général des Sea Dogs, Trevor Georgie, qui a volé le show lors du sprint final de la période des transactions.

-Parmi les autres échanges de dernière heure dignes de mention, notons l’acquisition de l’attaquant de 20 ans Simon Pinard par les Olympiques de Gatineau, qui cèdent en retour à l’Armada de Blainville-Boisbriand l’attaquant Kieran Craig. À Shawinigan, les Cataractes ont conclu une entente avec le Drakkar de Baie-Comeau pour les services du vétéran Pierrick Dubé.  

-Sorti de Québec à la suite de l’arrivée de Conor Frenette chez les Remparts, Christophe Farmer s’en va jouer avec les Warriors de West Kelowna dans la BCHL. L’équipe a annoncé le transfert sur son site internet. Farmer s’en va y rejoindre un autre ancien des Conquérants des Laurentides, Félix Trudeau. Merci à Benoît Larivière (@bentheriver71) de nous avoir mis sur cette piste sur Twitter.

-Inactif lors de la période des transactions de la LHJMQ, les Mooseheads de Halifax ont bougé en embauchant l’attaquant Evan Boucher, un franc-tireur de 19 ans qui évoluait avec les Braves de Brockville au niveau junior A en Ontario.

-Victime mathématique des nombreux ajouts effectués par les Sea Dogs, le défenseur de 20 ans Christopher Innis a été réclamé au ballottage par les Saguenéens de Chicoutimi, avec qui il ira terminer sa carrière.

-Les Eagles du Cap-Breton ont un nouvel entraîneur. Il s’agit de l’Américain Chadd Cassidy, qui avait quitté dans la controverse les Lancers d’Omaha, une équipe de la USHL, plus tôt cette saison.

Dans vos oreilles

Pour le retour du balado Sur la glace cette semaine, Stéphane Leroux discute avec l’adjoint au commissaire de la LHJMQ, Martin Lavallée, et le directeur général des Sea Dogs de Saint John Trevor Georgie. Bonne écoute!  

La citation de la semaine

« Il y a eu plusieurs conversations, mais plus on y pensait et plus on se disait que le fait de le garder nous donnait deux très bons trios et du précieux leadership pour aider nos jeunes à grandir » - Cam Russell, directeur général des Mooseheads de Halifax, à Willy Palov du site Saltwire.com au sujet de sa décision de retirer Elliot Desnoyers du marché des échanges.