MONTRÉAL – Daniel Sprong n’est pas différent des autres joueurs de hockey, il aime marquer. Mais rares sont ceux qui, comme lui, traversent l’Atlantique à l’âge de 7 ans pour en faire une spécialité, voire même un métier.

Dix ans après son départ d’Amsterdam pour Montréal, l’attaquant des Islanders de Charlottetown continue de faire rager les gardiens adverses et de parfaire son expertise.

Si bien qu’après une campagne recrue éclatante au cours de laquelle il a enfilé 30 buts à l’âge de 16 ans seulement, le jeune Néerlandais pourrait entendre son nom dès le premier tour du prochain repêchage selon la Centrale de recrutement de la LNH (CSS).

Or, aussi talentueux soit-il, Sprong n’est pas dupe. S’il cogne aux portes de la grande ligue, il le doit avant tout à ses parents.

 « Ils ont renoncé à leur vie aux Pays-Bas pour que mon rêve se réalise. Sans eux, je ne serais pas dans la situation où je me retrouve aujourd’hui », observe Sprong.

En quittant Amsterdam, où on ne comptait alors qu’un seul aréna, les parents de Sprong étaient déterminés à offrir à leur fils le meilleur des environnements pour son développement.

« Le niveau de jeu était si bas que j’évoluais avec des gars plus vieux de cinq ou six ans. [...] J’ai réalisé que j’étais meilleur que les autres joueurs néerlandais », se souvient Sprong, dont le paternel a brièvement évolué en première division néerlandaise avant d’y occuper un poste de directeur général.

« Chaque fois que nous en avions l’occasion, on en a profité pour travailler mes habiletés et mon coup de patin. Mon père voulait d’abord m’enseigner la base afin que je puisse me rabattre là-dessus une fois plus vieux. Il a eu la chance d’observer plusieurs séances d’entraînement de l’équipe russe quand elle était de passage aux Pays-Bas, je suis choyé qu’il m’ait transmis tout ce savoir. »

Une fois les fondements du hockey maîtrisés, Sprong a d’abord passé quelques étés à Montréal afin de prendre part à diverses écoles de hockey, avant de se joindre au Ice Storm de Montréal. Comme l’ont notamment fait Jonathan Drouin, Jeff Skinner, Sean Couturier et Brendan Gallagher avant lui au sein de cette équipe élite, Sprong a alors pu participer à plusieurs tournois printaniers et estivaux au Québec, en Ontario et aux États-Unis.

C’est ainsi qu’à force de faire et défaire ses valises à répétition, la famille Sprong a finalement décidé de les ranger au placard.

« On a d’abord décidé de s’établir à Montréal pendant un an pour voir à quel point nous allions aimer ça, raconte Sprong. On est tombé en amour avec le Canada et on y réside depuis ce temps. Mon père a décelé un certain talent en moi et il a voulu m’offrir la chance d’une vie. Il croyait en moi. »

Daniel SprongUn catalyseur

Une décennie plus tard, Sprong entame sa deuxième campagne dans le circuit Courteau, décidé à donner raison à ses parents.

« C’est sûr que je transporte un peu de pression sur mes épaules. Je veux les rendre fiers car ils ont tout sacrifié pour moi. Je veux leur prouver qu’ils ont pris la bonne décision. »

Jusqu’à maintenant, papa et maman ont vu juste.

Visage des Islanders depuis sa sélection au premier tour du repêchage 2013 de la LHJMQ (13e au total), Sprong incarne le virage jeunesse dans lequel la formation de l’Île-du-Prince-Édouard s’est engagée il y a un an.

Fort d’une récolte de 68 points (30 buts et 38 passes), Sprong a conclu la dernière campagne au deuxième rang des meilleurs marqueurs du circuit parmi les joueurs recrues, derrière Nikolaj Ehlers, attaquant des Mooseheads de Halifax et choix de première ronde des Jets en juin dernier.

« C’est le catalyseur de notre attaque, résume l’entraîneur-chef des Islanders Gordie Dwyer. Il a les habiletés pour être l’un des meilleurs joueurs offensifs dans cette ligue. C’est ce qu’il a été pour nous l’an dernier. »

Une triple menace

Doté d’une dextérité hors du commun en possession de rondelle, d’un tir des grandes ligues, d’une vision de jeu exceptionnelle et d’une aisance à frustrer ses couvreurs, Sprong a tout pour affoler les défenses adverses.

« Ses habiletés le distinguent des autres joueurs, mais Daniel Sprong, c’est plus qu’un joueur agile, insiste Dwyer. Son lancer, sa dégaine rapide et son intelligence sur la patinoire font de lui une triple menace. »

« Je pense être capable de prendre contrôle de n’importe quelle situation en possession de rondelle et d’en faire un jeu positif, que ce soit en ralentissant ou en accélérant le jeu, ou encore en y allant d’une feinte inattendue », dépeint Sprong.

Le talentueux ailier droit n’est toutefois pas parfait. « Comme tout jeune joueur, il doit travailler son jeu sans la rondelle. Quand il obtient une opportunité en attaque, il brille, mais Daniel est déterminé à devenir un joueur plus complet et fiable sur 200 pieds », souligne Dwyer.

« Je ne dois plus tricher en zone défensive dans l’espoir de partir en échappée, convient Sprong. Je dois m’assurer de rester bas dans mon territoire afin de reprendre possession de la rondelle et d’effectuer la relance plutôt que de tenter un jeu hasardeux. J’y ai consacré beaucoup de temps l’été dernier. »

Daniel Sprong

À l’aube d’une année déterminante pour la suite de sa carrière, Sprong a également profité de la dernière saison morte pour gagner en force musculaire sous la supervision d’Andy O’Brien, un préparateur physique qui compte aussi Sidney Crosby, Nathan MacKinnon et Matt Duchene, entre autres, parmi ses clients.

« On s’est assuré que le bas de mon corps soit suffisamment fort et stable pour encaisser les coups et ne pas être bousculé d’un bord ou de l’autre », précise Sprong, qui affiche dorénavant un gabarit de 6 pieds et 192 livres.

Épaulé par le nouveau venu Filip Chlapik et Alexandre Goulet, Sprong a tel que prévu repris son rôle de meneur offensif des Islanders cette saison avec 9 points (4 buts, 5 mentions d’aide) en dix rencontres.

Attirant plus que jamais le regard des éclaireurs de la LNH, Sprong se dit déterminé à propulser les Islanders vers de plus hauts sommets, mais il ne perd pas de vue l’objectif suprême.

« On peut dire que c’est la plus importante saison de ma carrière, mais ce n’est aussi que le début de celle-ci. C’est ici qu’elle prendra ou non son envol. Je dois aborder mon rêve un match à la fois et ce qui arrivera, arrivera. Je suis fier de mes parents et je leur serai reconnaissant jusqu’à ma mort pour ce qu’ils ont fait. À moi maintenant de terminer le travail. »