TORONTO - Si La Ligue nationale de hockey et l’Association des joueurs s’entendent sur des paramètres qui permettraient de revenir avec une Coupe dès 2020, les têtes dirigeantes de USA Hockey devraient sérieusement songer à remplacer Dean Lombardi à titre de directeur général.

Pas seulement pour une éventuelle Coupe du monde, mais également pour les Jeux olympiques, voire toute forme de rendez-vous internationaux.

À la tête d’une équipe qui a été incapable de générer quoi que ce soit en attaque, Lombardi a claironné jeudi matin que si c’était à refaire, il préfèrerait faire à nouveau appel au Brandon Dubinsky, Justin Abdelkader, David Backes et autres Kyle Palmieri plutôt que de faire une place à Phil Kessel.

Vraiment?

Lombardi n’a pas mentionné le nom de Kessel. C’est moi qui le fais à sa place. Mais il a déchiré sa chemise devant les journalistes pour vénérer le caractère des joueurs qu’il avait sélectionnés avant de les confier à John Tortorella après qu’on lui eut posé une question sur l’absence de Kessel et sur ses propos suivant la défaite des USA aux mains du Canada.

Les joueurs sélectionnés et défendus par Lombardi ont été blanchis 3-0 par l’Europe. Ils n’ont marqué que deux buts dans un revers de 4-2 aux mains du Canada. Revers qui les a exclus de la Coupe du monde après deux petites parties seulement.

Les États-Unis croiseront la Tchéquie en soirée jeudi pour clore leur tournoi. Dans un match qui ne veut strictement rien dire, ils pourront peut-être sauver la face en remplissant le filet adverse. Mais ces buts et cette victoire, si buts et victoire il y a, ne changeront rien à la dure réalité : on se souviendra de l’équipe qui a défendu les couleurs des USA à Toronto comme de la risée de la Coupe du monde 2016.

Pas seulement parce que Phil Kessel flattait son chien au lieu de se démener avec ses compatriotes sur la glace de l’Air Canada Centre. Surtout que Kessel, blessé, n’aurait pu prendre part à la compétition. Mais parce qu’outre Kessel, Lombardi a tellement écarté de joueurs capables de marquer des buts comme Tyler Johnson et Kyle Okposo, voire Chris Kreider qu’il mérite pleinement les critiques qui lui sont adressées.

Un revers et c’était fini

Dans le cadre d’un tournoi où tout se déroule à vitesse grand V, une équipe - à part peut-être le Canada qui est actuellement trop fort pour le reste de la planète hockey - ne peut se permettre de cligner des yeux sans courir le risque de se retrouver dans le trouble. C’est exactement ce qui est aux États-Unis. Lorsqu’ils ont réalisé qu’ils venaient de perdre pour l’Europe, le mal était fait. Leur tournoi était terminé.

« Je me suis rendu à la Coupe Stanley avec une équipe qui accusait un retard de 0-3 dans une ronde éliminatoire. C’était un retard bien plus imposant que ce qu’on a vécu ici. Mais après une seule défaite, après un mauvais match, un match qu’on aurait dû gagner, nous étions plus mal en point encore », a commenté Dean Lombardi.

Le DG des Kings de Los Angeles faisait ici référence à la remontée qui a permis à son club de la LNH d’éliminer les Sharks de San Jose en première ronde des séries au printemps 2014. Les Kings avaient ensuite éliminé tour à tour les Ducks d’Anaheim, les Blackhawks de Chicago et les Rangers de New York en grande finale.

Comme tous les membres de son organisation, Dean Lombardi s’est dit extrêmement déçu. Il a reconnu s’être remis en question. Il a même passé un coup de fil au « parrain » du hockey américain Lou Lamoriello pour analyser la stratégie qui l’a guidé dans la composition de Team USA.

« J’ai dressé une liste de quatre ou cinq décisions que je prendrais différemment. Peut-être que nous nous sommes trop concentrés sur le Canada et pas assez sur les autres rivaux de notre groupe. Je ne sais pas. Mais ce n’était pas évident de créer une équipe aussi rapidement. En 1996 - les USA avaient remporté la première Coupe du monde - ils avaient eu 30 jours pour se préparer. Nous en avons eu quatre. Est-ce possible d’arriver à former une équipe en si peu de temps », s’est questionné Lombardi.

Eh bien, la réponse est oui.

L’équipe Europe l’a fait alors qu’elle se retrouve en ronde éliminatoire à la place des Américains.

L’équipe des Surdoués l’a fait aussi.

Et ces deux formations avaient des défis bien plus grands à relever que les USA considérant qu’ils se retrouvaient avec des joueurs de huit équipes nationales différentes pour l’Europe et de milieux différents pour les jeunes.

Les succès obtenus sur la glace ont permis à ces groupes de joueurs de devenir des équipes. Une transition qui ne s’est pas produite avec les Américains.

Manque de talent et d’attaque

Dans un tournoi où tout se passe aussi vite, il est important de miser sur du talent, sur des structures et sur un club prêt à respecter ces structures.

Les Américains avaient du talent. Du talent qui est demeuré au vestiaire dans les matchs qui voulaient dire quelque chose, mais du talent quand même. L’ennui, c’est qu’il n’en regorgeait pas assez. Et les joueurs de caractères venus compléter le groupe avaient des rôles trop importants à remplir.

Entraîneur-chef très contesté des USA, John Tortorella a d’ailleurs reconnu que le manque à gagner au chapitre du talent disponible au sud de la frontière avec dicter la philosophie américaine en vue de la Coupe du monde.

« Je n’en peux plus d’entendre et de lire toutes les analyses sur notre sélection de joueurs et décrire notre club comme une équipe de plombiers. C’est faux. Dites que nous avons failli à la tâche, et je suis le premier responsable, et je vivrai avec ces reproches. J’avalerai la pilule parce que je n’ai pas été en mesure de trouver les bonnes combinaisons pour générer assez d’attaque pour gagner. »

Qu’est-ce qui a fait défaut alors? Dean Lombardi a gagné la coupe Stanley, son entraîneur-chef et plusieurs autres membres de l’état-major l’ont gagnée également.

« Les dirigeants de USA Hockey n’aimeront sans doute pas ma réponse, mais je ne crois pas que nous sommes en mesure de rivaliser avec le Canada en fait de profondeur sur le plan du talent. Talent contre talent, on ne pouvait pas battre le Canada. On l’a vu lors du dernier match. Un match qu’on a bien amorcé. Mais quand ils se sont mis en marche, ils ne nous ont laissé aucune chance. Nous avons des gars en mesure de gagner des matchs. Des gars en mesure de faire tourner le vent en notre faveur. Mais il nous manque du talent. Il y en a du très bon qui s’en vient. J’aurais d’ailleurs bien aimé pouvoir compter sur eux, mais les règles du tournoi ne le permettaient pas. Parce qu’on ne pouvait pas rivaliser avec le Canada sur le plan du talent, on s’est tourné vers des plans alternatifs. Je persiste à croire que nos plans étaient bons. Que la sélection des joueurs était bonne. C’est notre incapacité de générer assez d’attaque qui nous a coulés. Et je le répète : cette tâche était la mienne et c’est moi le coupable », a conclu Tortorella.

À la lumière de la plaidoirie émotive qu’il a livrée devant les journalistes quelques heures avant le duel opposant son équipe à la Tchéquie, les dirigeants de USA Hockey devraient non seulement s’assurer de non seulement trouver un successeur à Dean Lombardi à titre de directeur général, mais aussi à John Tortorella derrière le banc.

C’est Ben Bishop qui défendra la cage américaine jeudi soir face à la Tchéquie. Il sera secondé par Cory Schneider alors que Jonathan Quick, qui a encaissé les deux revers, sera dans les gradins. David Backes et Erik Johnson seront aussi laissés de côté.