Jaromir Jagr touchera cette saison la somme de $11,483,333.

Et pourtant ses statistiques perdent autant de valeur que les actions de Nortel, il y a quelques années. Pas étonnant qu'au cours de l'entre-saison, Ted Leonsis, le propriétaire des Capitals de Washington, qui croyait avoir réalisé un coup fumant en cédant des joueurs ordinaires aux Penguins pour les services de Jagr, meilleur pointeur de la Ligue nationale à ce moment-là, ait tenté par tous les moyens de l'échanger aux Rangers de New York.

Tellement certain d'aboutir avec le « Country Club » de New York, Jagr avait même vendu sa maison et son ameublement. « Aussi, disait-il à son arrivée au camp d'entraînement de son équipe, je suis étonné d'être encore ici. » Leonsis fit chou blanc.

Il doit maintenant assumer ses responsabilités de propriétaire parce que le grand responsable de cette gaffe monumentale, c'est Leonsis lui-même. Il croyait avoir obtenu le meilleur joueur au monde mais il n'avait pas fait ses devoirs. Sa réaction fut celle d'un propriétaire qui, soudainement, se découvre des qualités d'homme de hockey. Il croit tout connaître alors que, dans le fond, il ne fait que polir son ego.

Un problème majeur pour les Penguins

Il aurait dû savoir que Jagr était devenu un problème majeur pour les Penguins. Son appétit vorace pour le « gambling », son indifférence à la compétition, ses actions inquiétantes avaient même poussé le grand Mario à sortir l'uniforme des boules à mite afin de sauver la concession qui lui devait la somme de $26 millions.

Non seulement n'a-t-il pas poussé son enquête mais il se permit même de compléter la transaction pendant que son directeur général, George McPhee, était en voyage de pêche.

Leonsis aurait dû savoir que Jagr n'avait plus le feu sacré, qu'il était un joueur difficile à satisfaire. Plutôt que de prendre des informations pertinentes sur son comportement, il lui glissa dans la poche une entente de six ans évaluée à près de $72 millions.

On comprend un peu mieux pourquoi le hockey est malade. Pourquoi sur le plan financier, certains propriétaires perdent la tête et plongent leur entreprise et celle des autres dans un marasme épouvantable. On comprend aussi pourquoi le hockey d'aujourd'hui a de la difficulté à recruter une nouvelle clientèle.

On peut dire que Jagr a été loin de livrer la marchandise, qu'il n'a jamais répondu aux attentes de Leonsis, c'est vrai. Il a vite compris qu'en regardant à droite, il n'y avait pas de Mario Lemieux. Qu'en regardant à gauche, il n'y avait pas de Ron Francis ou encore de Martin Straka. Il a vite baissé le bouclier et a causé le départ de Ron Wilson comme entraîneur.


Conséquente avec elle-même

À la défense de Jagr cependant, il faut admettre qu'une organisation doit être conséquente avec les gestes qu'elle pose. Quand on embauche un joueur comme Jagr, ce n'est pas pour « l'enfermer » dans un système défensif. Or, les Capitals ont toujours été reconnus comme une équipe qui prônait la défense. Est-ce que l'Avalanche du Colorado va pratiquer le système de la trappe avec l'arrivée de Teemu Selanne et de Paul Kariya?

Qu'a-t-il fait pour l'aider à exploiter son talent offensif? Pas certain qu'il va fracasser le livre des records en compagnie de Boyd Gordon et Kip Miller. Ted Leonsis doit payer maintenant pour son manque de jugement. Il est le propriétaire, il peut faire ce qu'il veut, mais il faut aussi avoir un sens de l'expertise. Leonsis est génial quand vient le temps de brasser des affaires dans le monde fascinant de la technologie. Il s'est bâti une solide réputation avec America Online.

Aujourd'hui, il doit payer plus cher que tous les autres patineurs de la Ligue nationale, un joueur qui a connu ses meilleures années. Même si l'ailier de la République Tchèque a baissé son poids de 18 livres, qu'il semble en meilleure forme que jamais, il évolue néanmoins avec une formation dont le système ne lui convient pas.

Et ne lui conviendra jamais.

Le Country Club

Peut-être que le - Country Club - de New York, lamentable en début de saison lui fasse une proposition. Leonsis sera très heureux de l'expédier dans une autre ville. A souhaiter qu'il consultera son directeur général cette fois-çi.