LAVAL – Danick Martel a connu des séries éliminatoires du tonnerre. Quinze points en autant de matchs, dont neuf buts, c’est le genre de production qui fait vibrer le téléphone d’un agent quand elle vient d’un joueur qui se prépare à débarquer sur le marché des joueurs autonomes.

Martel risque fort d’être courtisé par le Rocket de Laval cet été. Sa fin de saison en crescendo justifierait à elle seule son retour. Mais un autre indice de sa valeur, celui-là encore plus significatif, est ressorti du bilan de fin de saison de l’équipe jeudi.

D’abord, considérez cette réponse de Jean-François Houle à une question du collègue Patrick Friolet au sujet de l’importance, pour un entraîneur de la Ligue américaine, de pouvoir compter sur des vétérans qui comprennent et acceptent leur rôle.

« Ça a une grande valeur. Un joueur qui est moindrement intelligent et qui connaît sa place dans l’organisation, qui a eu sa chance dans la LNH et pour qui la Ligue américaine, c’est rendu sa ligue et qui est prêt à aider les jeunes, ces joueurs-là sont très importants. Ce sont des vétérans qui peuvent aider énormément et faire une différence. »

Associez ces sages paroles avec la lucidité des propos tenus par Martel une heure plus tôt et vous vous retrouvez avec un « swipe » à droite qui a le potentiel de déboucher sur quelque chose de bien plus sérieux qu’une histoire d’un soir.

« Même si on n’a pas connu la fin qu’on souhaitait, j’ai eu de très bonnes séries éliminatoires. J’ai prouvé que j’étais un leader, que je peux amener une équipe à gagner. Je sais que ma carrière au niveau de la LNH est terminée, à moins que j’aie des saisons éclatantes dans les années à venir. Mais en même temps, à 28 ans, je pense que mon rôle est d’être un leader dans la Ligue américaine. C’est une ligue que je connais bien, dans laquelle j’ai toujours bien "performé". »

Jamais repêché, Martel a été détecté par les Flyers de Philadelphie à la fin d’une saison de 102 points avec l’Armada de Blainville-Boisbriand. Il a atteint la LNH trois ans plus tard pour un essai de quatre matchs. L’année suivante, il en jouait neuf autres avec le Lightning de Tampa Bay. Depuis, il a appris à façonner tranquillement son deuil.

Le Rocket est la quatrième organisation qui l’a accueilli dans les trois dernières années. Il y est arrivé muni d’un contrat qui ne lui offrait pas l’option d’être rappelé dans la LNH et il ne s’attend pas à obtenir mieux en vue de l’an prochain.  

« Avec les offres que j’ai présentement, malheureusement, c’est même pas proche de ça. Alors je pense qu’au niveau mental, j’ai décroché. Je ne dirais jamais non à ça parce que je sais que je suis encore capable. On l’a vu au camp des Canadiens, quand j’ai joué dans le match des Blancs contre les Rouges. J’étais ressorti du lot, mais je savais que ma place était dans la Ligue américaine. D’une certaine façon, je sais que c’est une "business". »

Une « business », au moins, au sein de laquelle il a retrouvé la conviction qu’il peut revendiquer une place bien à lui. Ce n’était plus nécessairement le cas avant d’arriver à Laval, alors que la réalité de la COVID avait raréfié les offres d’emploi. « C’est sûr que ça te joue dans la tête », dit-il avec l’authenticité qui lui est propre. Cette confiance fragilisée a été mise à l’épreuve en début de saison, quand son entraîneur a décidé de le laisser de côté pour un match.

« J’étais "scratch" pour la première fois de ma carrière dans la Ligue américaine. Pourtant, ça allait quand même bien jusque-là. Mais là, ça a vraiment planté dans ma tête. »

Ce n’est que vers la mi-saison, lorsqu’une pause imposée par la COVID a donné à tout le monde l’occasion de souffler, que Martel a senti qu’il retrouvait ses repères. Le regain de vie qu’il a connu dans les derniers mois de la saison lui permet, en rétrospective, d’en dresser un bilan satisfaisant.

Les séries? Ça a été la garniture sur le gâteau.

« Je pense que mentalement, j’ai pu repartir à zéro, avance l’énergique attaquant. C’est ce qui m’a aidé à produire énormément et aider l’équipe à se rendre loin. »

« Une belle victoire » pour Brandon Gignac

L’histoire de Brandon Gignac ressemble beaucoup à celle de Martel. L’ancien espoir des Devils du New Jersey arrivait à Laval après une saison presque complète passée dans l'ECHL et une carapace à refaire.

En fait, le passage dans une ligue inférieure avait été réparateur pour Gignac. C’est tout ce qui s’était passé avant qui lui avait fait vivre l’enfer. Le rapide joueur de centre a raconté que ses deux dernières saisons sous les ordres de Mark Dennehy, avec les Devils de Binghamton, ont été pénibles.

« Le "coach", je savais qu’il ne m’aimait pas et il ne se gênait pas pour me le dire. Ça, ce n’était vraiment pas le fun pour la confiance. Ce n’était pas des belles saisons pour moi là-bas. Des affaires comme ça, je ne veux pas que ça se reproduise dans ma carrière parce que ça m’a juste détruit et ça a détruit ma confiance. »

Avec Jean-François Houle et ses adjoints, Gignac a recommencé à respirer à pleins poumons. À l’instar de Martel, il a connu un départ plutôt lent avant de trouver un certain rythme. Il a connu ses meilleurs moments en séries, fournissant neuf points en 13 parties. Une blessure à un genou l’a empêché de contribuer à son plein potentiel dans la finale de l’Est.

« Quand j’étais dans l’organisation de Binghamton, je savais que j’avais un bon coup de patin, mais on dirait que je n’avais jamais été mis dans les situations pour le montrer. JF m’a tellement donné d’occasions, les vétérans me disaient de pousser le "pace". Cette année, ça a vraiment été bon pour moi de montrer ma vitesse. »

« Je savais que j’avais le talent pour jouer dans la Ligue américaine, j’avais juste besoin d’une chance. Cette année, je l’ai eue et je l’ai saisie. Je suis content, c’est une belle victoire pour moi. »