LONDON, Ontario – Chris Rumble ne jouera pas avec les Sénateurs d’Ottawa cette saison. En fait, à la lumière de ce qu’il a montré au camp des recrues de l’équipe la semaine dernière, les chances de le voir accéder un jour à la Ligue nationale semblent assez modestes.

Mais le défenseur de 25 ans, même si ce n’est pas ce qu’il veut entendre, ne devrait pas être jugé par ce qu’il sera en mesure d’accomplir au cours des prochains jours sur la glace du Centre Canadian Tire, mais plutôt pour les obstacles qu’il a déjà abattus et la raison pour laquelle il accepte de raconter son histoire.  

Rumble venait de recevoir une bourse d’études pour jouer avec l’équipe de Canisius College, une université de Buffalo, et s’apprêtait à célébrer son 22e anniversaire quand il a été frappé par ce qu’il croyait au départ être un simple virus.

« Après deux semaines, les symptômes persistaient et quelqu’un m’a finalement convaincu d’aller consulter un médecin. On m’a fait subir des tests sanguins et trente minutes plus tard, mon téléphone sonnait... », confie sereinement le sympathique jeune homme.

Rumble avait le cancer. Trois heures après avoir reçu le diagnostic, il s’enregistrait dans un hôpital de Seattle. Il n’en sortirait pas pour les six prochains mois.

« Quand vous êtes malade, on vous suggère fortement de ne pas aller rôder sur Google! Je souffrais de leucémie myéloïde aiguë, une variante assez menaçante de la maladie. Quand j’ai fait mes recherches, je pouvais lire le mot "mort" et des trucs assez pessimistes à propos des chances de survie. Alors évidemment, j’ai eu peur au début. Mais éventuellement, d’autres tests ont révélé que les probabilités étaient à mon avantage. J’ai été chanceux. »

À travers toutes les étapes de sa guérison, Rumble n’a jamais cessé de rêver. Affaibli par la chimiothérapie, entouré d’enfants qui ne s’en sortiraient pas, le hockeyeur fermait les yeux et s’endormait au son des lames de patins qui tranchent une surface glacée encore vierge.

« J’ai consulté tous les livres, tous les sites internet, tous les articles sur lesquels je pouvais mettre la main pour tenter de trouver un joueur professionnel qui avait vécu la même chose que moi parce que j’étais obsédé par l’idée de retourner sur la glace. Alors si aujourd’hui je peux être cette personne qui donnera de l’espoir à un jeune qui se trouve dans cette situation, j’en retire un immense bonheur. »

Admis à l’hôpital en avril, Rumble en est sorti à l’automne, et en décembre, il faisait ses débuts dans les rangs collégiaux.

« Je n’aurais probablement pas dû revenir si tôt! Je dirais que je n’ai pas retrouvé toutes mes forces avant l’automne suivant », admet-il.

Rumble a passé trois saisons dans la NCAA. Au printemps dernier, il a obtenu son diplôme d’un programme alliant multimédia et marketing en plus de se faire remarquer par les dépisteurs des Sénateurs, qui lui ont offert un essai de huit matchs dans la Ligue de la Côte Est (ECHL) et une invitation au camp des recrues à la fin de l’été. Il espère maintenant démontrer qu’il est de calibre pour poursuivre sa carrière à Binghamton, dans la Ligue américaine.

 « Vaincre la maladie représente probablement un plus bel accomplissement que se battre pour un poste dans un camp de la Ligue nationale, philosophe-t-il. Mais dès la seconde où on m’a appris que je souffrais de la leucémie, ma première question a été : "Combien de temps avant que je puisse jouer au hockey de nouveau?". C’est à ça que je m’accrochais, c’était ma motivation pour passer à travers. »

Sur les traces du paternel

Le père de Chris, Darren, est un ancien hockeyeur professionnel dont la carrière de 16 ans a pris son envol... à Ottawa! Les Rumble ont passé deux années dans la capitale canadienne après que le paternel, un défenseur à caractère défensif, eut été acquis par les Sénateurs par le biais du repêchage d’expansion de la LNH au tout début de leur histoire.

« Mon père était une sorte de soldat de la route quand il jouait, alors il y a un paquet de villes où j’aurais pu aboutir après qu’il y soit déjà passé! », ricane le fiston.

« Mais sérieusement, c’est l’un des endroits les plus favorables où on a vécu. La famille a encore des amis là-bas et j’ai rencontré quelques membres de l’organisation qui étaient là à cette époque. J’entends toutes sortes d’histoires au sujet de mon père que je n’avais jamais entendues auparavant! »  

Le jeune Rumble avait 4 ans quand sa famille a quitté Ottawa pour la prochaine étape du tour de l’Amérique de son père.

« J’étais jeune, mais il me reste quelques souvenirs vagues. J’ai revu quelques bonnes photos récemment et je me souviens entre autre que le responsable de l’équipement m’amenait parfois au cinéma quand mon père était sur la glace. »

Une vingtaine d’années plus tard, Chris Rumble est de retour à Ottawa. Tout en espérant que son histoire pourra donner le sourire à un enfant malade en quête d’espoir, il cherche à s’inspirer de celle de son père, qui poursuit aujourd’hui une carrière d’entraîneur avec les Wildcats de Moncton.

« Je suis le même genre de joueur qu’il était et je sais que ça peut parfois prendre du temps avant de faire sa niche à quelque part. Mais je ne suis pas pressé. Je suis prêt à travailler et je verrai où ça me mènera. »