ZHANGJIAKOU, Chine - En haut de la piste, Lewis Irving a vu tous les sauts jusqu'ici en cette première finale de l'histoire du saut acrobatique par équipe mixte des Jeux olympiques.

Le Suisse Noe Roth venait tout juste de réussir un triple périlleux ponctué de cinq vrilles, un saut au degré de difficulté - 5,00 - plus élevé que le sien. Ses coéquipiers, Marion Thénault et Miha Fontaine, lui avaient procuré une mince avance de 13 points au total sur les Helvètes. Il sait que s'il gaspille ce coussin, le Canada sera exclu du podium des Jeux de Pékin.

Il s'est élancé sur la piste du Parc de neige de Genting, à Zhangjiakou. Au moment d'entrer sur le tremplin à plus de 60 km/h pour effectuer son double périlleux arrière triple vrille (coefficient de difficulté: 4,525), il n'a pas ressenti plus de pression qu'à l'habitude. Quand il a touché la neige, quelque cinq étages plus bas, il avait accompli sa mission.

« Je voyais Miha et Marion dans l'aire de podium en bas. Je savais que si j'atterrissais, on restait sur le podium. On s'entraîne tellement et je vis un peu pour ces moments-là; donc ça a bien fonctionné. »

Avec 290,98 points, le Canada était ainsi assuré de terminer sur le podium de cette finale à quatre équipes. Ils ont finalement été devancés par les Américains (338,34) et les Chinois (324,22).

Les représentants du Comité olympique russe et du Bélarus ont été éliminés à l'issue de la finale 1.

« J'ai du mal à réaliser que je suis une médaillée olympique. Je suis tellement fière de notre équipe, on a tellement travaillé fort », a indiqué Thénault, rayonnante au moment de rencontrer les médias.

« On ne voulait pas dire qu'on allait gagner une médaille, mais quand on en parlait, on le voulait tous, a ajouté la Sherbrookoise de 21 ans. Nous n'avions jamais fait la finale auparavant, mais comme nous sommes une jeune équipe, nos degrés de difficultés augmentent rapidement. Miha et moi avons fait un saut avec un plus grand coefficient de difficulté que la dernière fois. On savait qu'on était capables, mais on n'était peut-être pas aussi confiants. Il y a parmi les meilleurs athlètes au monde ici; les autres équipes sont tellement fortes. Mais on l'a fait! »

S'ils ont encore de l'expérience à prendre chacun de leur côté, les trois Canadiens estiment que cette compétition par équipe fait ressortir leurs forces respectives.

« Je ne veux tellement pas décevoir mes coéquipiers, a dit Thénault. En plus, j'ai fait une erreur en finale. C'est difficile, car on veut tous faire le mieux. C'est arrivé dans les autres épreuves par équipe que quelqu'un soit tombé et on ne s'en veut pas: on sait tous qu'on fait de notre mieux. C'est ça la beauté d'être une équipe: quelqu'un peut faire une erreur et on le rattrape. »

« C'est la beauté de la compétition par équipe: tout peut arriver. Marion a un peu raté son saut en finale, Lewis et moi l'avons appuyée, a noté Fontaine. On n'avait rien à perdre, on est allé le tout pour le tout. »

Une place de choix

Cette médaille de bronze et le dossard 5-2 de Fontaine trouveront une place de choix dans la maison familiale. Miha est le fils de Nicolas Fontaine, membre de la "Québec Air Force" et médaillé d'argent aux Jeux de 1992, alors que le sport en était un de démonstration.

« En bas, on a tous les trophées de Coupes du monde et Championnats du monde. Dans l'escalier, il y a ses quatre trophées et la médaille d'Albertville aussi. Juste avant de partir, je lui ai demandé ai j'allais pouvoir mettre mon dossard à côté des siens. Là, au moins, ce sera mon dossard et une médaille; ça va être assez hot! »

Fontaine avait un peu de son père avec lui en Chine: des gants de l'équipe nationale des Jeux de Nagano, en 1998.

« C'est pour la chaleur: si j'avais voulu qu'ils me portent chance, j'aurais plus mis les gants que j'avais à Deer Valley, quand j'ai réussi un saut parfait! Je me suis dit que ce serait plus froid en Chine, alors j'allais porter ceux-là. »

« Juste avant de partir, je suis allé dans le garage et je les ai pris. Ils sont neufs, mais ils datent de Nagano. Ils sont plus chauds que les nouveaux gants aujourd'hui; c'est pour cela que je les mets! Je ne pense pas qu'ils aient été portés à Nagano, mais il en avait des pareils. »

Une première

Cette discipline est présentée aux Jeux olympiques pour la première fois, mais elle fait partie du programme de la Coupe du monde depuis la saison 2014-15. En 2019, elle a fait son apparition aux Championnats du monde, mais le Canada n'a jamais grimpé sur le podium.

Chaque équipe est composée de trois skieurs avec au moins un homme et une femme. La composition exacte est laissée à l'appréciation de chaque nation qui peut choisir d'avoir deux femmes et un homme ou l'inverse. Les scores réalisés par chaque skieur sont additionnés et l'équipe qui obtient le plus grand total l'emporte.

Le groupe se préparera maintenant pour les compétitions individuelles, qui s'élanceront dans deux jours.

« C'est certain que ça ajoute un cachet. C'est la première fois que cet événement est aux Jeux olympiques, de terminer avec la médaille de bronze, ça motive beaucoup pour l'épreuve individuelle qui s'en vient », a indiqué Irving, pour qui il s'agissait d'une première compétition cette saison, lui qui a soigné une blessure à un genou subie en décembre.

« Va falloir prendre un petit pas de recul, faire redescendre les émotions et repartir à zéro dans deux jours. »