Elle était la première athlète de l'histoire des JO à s'aligner à la fois en ski alpin et en planche à neige et c'était un exploit. La Tchèque Ester Ledecka peut désormais entrer dans la légende de l'olympisme si elle ajoute à sa médaille d'or du super-G celle du slalom géant en parallèle en planche, qu'elle abordera en immense favorite à partir de jeudi.

La sensation est venue samedi. Tout le monde pensait que l'Autrichienne Anna Veith était championne olympique du super-G et la grande chaîne américaine NBC avait même déjà rendu l'antenne.

Mais pour un centième de seconde, avec son dossard 26, c'est bien Ledecka, nettement plus connue des amateurs de planche à neige que des suiveurs de la Coupe du monde de ski, qui a raflé l'or olympique.

Au fond, même elle n'en est pas revenue. « Jusqu'à aujourd'hui, je pensais que j'étais meilleure en planche à neige », a-t-elle reconnu après la course. Car si elle s'impose à nouveau sur sa planche lors du géant parallèle, il n'y aura cette fois pas de surprise.

« Chez les planchistes, elle est complètement au-dessus du lot. Elle a pris six départs cet hiver et elle en a gagné cinq. Le seul qu'elle n'a pas gagné, c'est du slalom. En planche, c'est un monstre », témoigne le Français Sylvain Dufour, qui disputera lui aussi à partir de jeudi les qualifications du géant parallèle.

« J'ai été surpris comme tout le monde, même si je savais qu'elle était forte. C'est une machine, une machine d'entraînement, une machine physique. Mais de là à miser sur une médaille, j'aurais misé sur la planche, bien sûr, où elle déchire tout depuis quelques années », ajoute-t-il.

« Ce qu'elle a fait en alpin, c'est tout simplement énorme. C'est un exploit exceptionnel. Les filles en ski s'entraînent toute l'année, en planche elles s'entraînent toute l'année aussi et elle, elle arrive à faire deux choses différentes. Ça paraît complètement fou », juge encore le Vosgien.

Rockstar et hockeyeur

Fou mais pas complètement inexplicable non plus, car selon Dufour, « il y a des similitudes et des passerelles » entre les deux disciplines pratiquées par la Tchèque.

Tomas Bank, son entraîneur de ski, explique ainsi que « la planche lui donne beaucoup d'équilibre et de toucher ».

« Et le ski l'aide en planche parce que ça va plus vite. En planche elle doit avoir l'impression d'être au ralenti et ses adversaires n'ont jamais été aussi rapides qu'elle a pu l'être sur les skis », ajoute-t-il.

Sylvain Dufour confirme que pour les planchistes, le ski, au moins le géant et le super-G, peut être « une mine d'or d'informations ».

« On reste des gens qui tournent autour de piquets, même si eux sont dans l'axe alors que je suis un peu de travers. Le géant et la planche alpin sont presque plus proches que la planche alpin et le snowboard cross par exemple », assure-t-il.

« Ils ont deux carres, donc plus de puissance et plus de vitesse. Il nous faut un peu moins de pente, parce qu'on est un peu plus un sport d'équilibristes. On joue plus avec notre centre de gravité. Mais on regarde leur placement parce que le placement du bassin peut être plus ou moins reporté en planche alpin », explique-t-il.

Pour Ledecka, les questions techniques sont assimilées. Reste à savoir si elle aura digéré son succès de samedi et les attentes énormes qui l'accompagnent désormais.

Si c’est le cas et qu'elle s'impose comme prévu samedi en finale, elle deviendra l'une des plus grandes championnes des Jeux d'hiver. Et dépassera peut-être en notoriété deux membres illustres de sa famille, son père, rockstar très célèbre en République tchèque, et son grand-père Jan Klapac, champion du monde et double médaillé olympique en hockey sur glace. Mais pas en or.