Revenu de son rêve de devenir une rock star, le roi de la planche à neige Shaun White a fini par digérer son échec des JO 2014 de Sotchi pour reprendre son envol et viser à partir de mardi un troisième titre olympique en demi-lune, à PyeongChang.

L'hiver du rachat ne pouvait pourtant pas plus mal commencer : en octobre, en stage d'entraînement en Nouvelle-Zélande, White rate la sortie d'une figure et percute de plein fouet, tête la première, le bord de la piste.

Le neige se macule de sang, il reste immobile. La vedette mondiale, double champion olympique et détenteur du record de victoires (13) aux X Games d'hiver, reprend conscience, mais il est à peine reconnaissable.

Son nez et sa lèvre supérieure pendent lamentablement (« comme si j'avais avalé une grenade et qu'elle avait explosé », a-t-il expliqué récemment au site Bleacher Report), et il doit être hospitalisé d'urgence. Embolie pulmonaire, 62 points de suture, il restera cinq jours sous surveillance.

Quatre mois plus tard, cette chute n'est plus qu'un mauvais souvenir. Mi-janvier, White fait son show à Snowmass (Colorado) et décroche son billet pour les Jeux avec une descente exceptionnelle, crédité du score parfait de 100 points, un exploit qu'il n'avait accompli qu'une seule fois auparavant et qu'il est le seul à avoir réussi dans l'histoire de la discipline.

Quatrième à Sotchi

« On me demande souvent quelle est ma plus belle victoire : pour moi, c'est d'être toujours au sommet depuis si longtemps dans un sport qui est en évolution constante », lâche-t-il, entre rires et pleurs.

« C'est incroyable, cette faculté qu'on a de guérir de tout », poursuit le Californien, en référence à ses blessures mais aussi à sa désillusion des Jeux de Sotchi.

Il y a quatre ans, White avait vu gros : il visait un troisième titre consécutif en demi-lune et voulait décrocher le premier or olympique de l'histoire en descente acrobatique. Mais vivant mal son statut de favori, en délicatesse avec une cheville, il avait dû, après quelques frayeurs à l'entraînement sur une piste jugée dangereuse, se contenter de la 4e place en demi-lune, avant de faire une croix sur la descente acrobatique.

« C'était tout simplement trop, je ne savais plus où j'en étais et ce qu'on attendait de moi », a-t-il avoué depuis.

En skate à Tokyo

« L'obstacle le plus dur à franchir était mental. Physiquement je me sens plus fort que jamais, je me connais bien, je connais ma façon de surfer et mes capacités », a-t-il expliqué jeudi lors d'une conférence de presse à PyeongChang. « Mais il faut un certain état d'esprit pour gagner après avoir gagné, et continuer à gagner encore et encore. C'est un super problème à avoir mais il faut cette motivation. »

Avant même la déroute de Sotchi, pour retrouver un peu de l'insouciance qui lui a valu le surnom de « Flying tomato » (la tomate volante, en référence à sa chevelure rousse), il s'était jeté à corps perdu dans son autre passion, la musique, et avait entamé une tournée avec son groupe, Bad Things.

Fortune faite (elle est estimée à 40 millions de dollars grâce à ses partenariats avec des équipementiers et des éditeurs de jeux vidéo), il a aussi lancé un rendez-vous mêlant musique et sports extrêmes, Air + Style.

Libéré et régénéré, White a retrouvé des ailes à 31 ans et aborde les JO 2018 en favori, sans avoir oublié son précédent échec. « Des gens me demandent si j'ai oublié Sotchi, mais les mecs, je ne digérerai jamais, ça fait partie de moi », a-t-il rappelé.

Il restera ensuite au phénomène un autre défi à relever : conquérir l'or, encore, mais cette fois en planche à roulettes en 2020 à Tokyo, où sa deuxième discipline de prédilection fera ses débuts olympiques.