Trois podiums, dont une victoire au prologue, sur un total de six courses. Voilà ce qu’a réalisé Alex Harvey au Tour de ski qui s’est conclu dimanche dernier, en Italie. Le fondeur de Saint-Ferréol-les-Neiges mérite donc le titre de l’Athlète Sportcom de la semaine du 6 janvier.

En début de saison, l’athlète avait expliqué qu’il comptait se servir de cette compétition comme rampe de lancement en vue de ses deuxièmes Jeux olympiques qui seront présentés dans moins d’un mois. Présentement en vacances avec sa copine en Suisse, Alex a pris une pause pour revenir sur la dernière dizaine qui a été fructueuse pour lui.

Au-delà des podiums, c’est surtout sa constance tout au long de l’épreuve de sept étapes réparties sur neuf jours dont il est le plus fier. « J’étais vraiment bien physiquement tous les jours et tous les éléments étaient là. C’est un signe que la base d’entraînement a été bien faite. Il n’y a que le 15 km classique qui a moins bien été, sauf que j’étais quand même physiquement bien. De faire preuve de constance à ce temps-ci de l’année, c’est important. »

« Oui, il y avait une toute petite inquiétude (en première partie de saison), sauf que les résultats obtenus par Alex ne sont vraiment pas une surprise pour moi », commente son entraîneur Louis Bouchard, en prenant soin de rappeler que son protégé était monté sur au moins un podium au cours des deux dernières éditions du Tour. « Avec la préparation que nous faisons, Alex commence toujours à rouler à ce moment-ci de la saison. Et après, il est lancé pour le reste de l’année! Ce n’est pas quelque chose de nouveau, sauf que cette année, son niveau était un petit peu plus élevé. »

Suivre le plan à la lettre

Comme il l’avait annoncé à l’aube de la présente saison, Alex a décidé de faire l’impasse sur la dernière étape, même s’il était quatrième au classement général provisoire. Le fondeur a encore des problèmes récurrents de circulation sanguine dans les artères iliaques lors de très longues montées, ce qui explique son absence sur le parcours de l’Alpe Cermis, où l’inclinaison atteint près de 30 % à certains endroits.

« Oui, la porte était un peu plus entrouverte pour que je prenne le départ, sauf que ce n’était pas le temps de scrapper mon corps à un mois des Jeux », commente celui qui se serait peut-être laissé tenter s’il était dans une année sans Jeux olympiques ou Championnats du monde.

L’autre partie de son plan s’est déroulée l’été dernier en salle de musculation. Pour une première fois depuis le début de sa carrière, le fondeur a mis les bouchées doubles pour développer sa puissance. « Si je connais une journée où mon VO2 max est moins bon, ma force musculaire pourra faire la différence », expliquait le principal intéressé avant le début de la saison.

Cette prédiction s’est concrétisée à la troisième étape, un sprint en style libre disputé à Lenzerheide. « Les skis n’étaient pas excellents et en qualification et j’avais fini 24e, à une demi-seconde de rater ma qualification. J’imagine que cela a fait la différence, car il y avait une longue montée que l’on faisait deux fois et où j’ai pu rester en technique one-skate, plutôt qu’en technique déphasée. »

Par la suite, le Québécois a réussi à se frayer un chemin jusqu’en finale où il a terminé deuxième.

Les moyens de ses ambitions

Alex Harvey fait maintenant partie des meilleurs fondeurs de la planète. Parallèlement à sa progression, les services de soutien de l’équipe canadienne de ski de fond se sont eux aussi améliorés au fil des ans. Et cela fait une différence selon Louis Bouchard.

« Les choses ont commencé à changer un peu avant les Jeux de Vancouver. Maintenant, en matière de soutien technique, nous sommes beaucoup plus compétitifs avec les meilleures nations. »

À titre d’exemple, l’entraîneur mentionne qu’il y a dix ans, l’équipe canadienne avait un ou deux farteurs alors qu’aujourd’hui, elle peut compter sur l’appui de sept ou huit techniciens selon les épreuves. Comme nouveauté cette année, l’équipe a fait l’acquisition d’un camion qui sera l’espace de travail des farteurs, ce qui leur permettra d’éviter de transporter du matériel vers les cabines de fartage, en plus travailler dans un espace mieux ventilé.

« Le ratio athlète/entraîneur/technicien est le même que la Norvège, ce qui fait en sorte que nous n’avons rien à envier aux autres », observe Alex, qui a aussi compté sur les services d’un ostéopathe, de deux massothérapeutes et d’un médecin sportif (NDLR : sa mère Mireille Belzile) pendant le Tour.

« L’équipe médicale, c’est la grande différence pour nous les athlètes. Leurs soins m’aident beaucoup, car les problèmes de dos que j’ai déjà eus sont maintenant chose du passé », poursuit celui qui a mis ses études de droit en veilleuse cet hiver afin de se concentrer pleinement sur les Jeux.

Rien n’est parfait

Si les athlètes canadiens en Coupe du monde n’ont rien à envier aux meilleurs, Louis Bouchard se dit inquiet pour les services offerts à la relève, notamment celle qui fréquente le Centre national d’entraînement Pierre-Harvey. Malgré des résultats qui sont concluants année après année, le vétéran entraîneur doit encore user de débrouillardise pour s’assurer que ses athlètes disposent d’un maximum de ressources.

« Nous sommes vraiment chanceux, car c’est B2Dix (un organisme privé) qui paye mon salaire. Si ce n’était d’eux, je ne suivrais plus le circuit de la Coupe du monde, je devrais mettre à pied trois de mes employés au centre national et je retournerais seul à aller farter des skis en Coupe Nor-Am. Notre défi est plus grand qu’ailleurs, car il faut offrir les services aux athlètes qui font le choix de s’entraîner ici. »

Autre exemple, la toute nouvelle piste d’entraînement de ski à roulettes du Parc du Mont Sainte-Anne a entièrement financée par le privé. Des entrepreneurs de la région de Québec ont même prêté des camions et une asphalteuse pour cette piste qui a été terminée l’automne dernier.

Louis Bouchard croit que le moment est venu que le Centre national d’entraînement Pierre-Harvey reçoive sa juste part, comme c’est le cas pour celui de Canmore, en Alberta. « Nous sommes contents des résultats d’Alex et des athlètes de notre groupe, sauf qu’il faudra que ça change dans les prochaines années, car nous sommes en déficit… même si mon salaire est payé par le privé. Si nous voulons continuer à suivre les pays scandinaves, ça en prendra plus. »