Voilà bientôt quatre semaines que le monde entier vit à l'heure de la Nouvelle-Zélande pour suivre la Coupe du monde de rugby. Au-delà d'un simple évènement sportif, c'est toute la communauté des mordus du ballon ovale qui vit au rythme des différentes rencontres. Parmi les dizaines de milliers de spectateurs qui ont fait le déplacement dans ce pays où le rugby est une religion, les partisans se sont regroupés en une multitude d'agrégats à travers l'Île de manière à être au plus proche de leur équipe nationale. Pour comprendre les différentes mentalités, un rapide tour du monde des partisans de rugby a été improvisé. Peut-être cela nous éclairera-t-il davantage sur la façon de se fondre dans la masse de la planète rugby.

Le rugby est un univers; celui des gens qui veulent s'amuser, se rassembler, se déguiser, se rencontrer et surtout fêter, fêter une seule et même passion. C'est l'univers des gens qui vibrent pour leur équipe mais qui savent partager avec l'adversaire la bonne humeur et les repas bien arrosés. Ainsi sur la planète ovale, des nations excellent dans ces domaines et savent transmettre les valeurs propres à ce sport mieux que quiconque.

Sans pouvoir tous les citer mais sans pour autant les oublier, parmi tous les pays pour lesquels le rugby est de tradition, notre première escale de ce « petit » tour du monde est en Europe, là où les Celtes et les Vikings firent eux aussi escale eux à une certaine époque.

Très loin des farfadets et des traditions gaéliques, les Irlandais savent vraiment faire la fête. Par exemple, cette petite histoire d'actualité : Deux heures avant le coup d'envoi du match Irlande-Australie à l'Eden Park d'Auckland samedi dernier, une foule de quelques 500 fans aux visages peints aux couleurs de l'Irlande, trèfles blancs sur fond vert, se sont réunis devant un bar sur l'Auckland Dominion Road, à 10 minutes à pied de ce qui allait se révéler être le « terrain des rêves ».

Un vigile, qui s'est senti bien seul pour l'occasion, contrôlait les entrées. Quatre-vingt-dix pour cent de supporters irlandais essayaient de pénétrer en même temps dans le pub pendant que l'autre partie des fans faisait la fête devant le bar.
À 100 mètres de là, un autre pub aux couleurs irlandaises, bondé, au parterre, à l'étage, au balcon. Cent mètres de plus et c'était une autre armée verte qui se trouvait devant un magasin de boissons alcoolisées et qui approvisionnait toute la foule en bière et en vin.

Au milieu de tout ce joyeux manège : deux policiers, le sourire aux lèvres. Et on dit qu'il n'y a que des brutes dans ce sport… Si ce n'est pas une preuve que le rugby est un sport de partage et de convivialité!

La horde verte s'est ensuite dirigée vers l'Eden Park pour vivre ce qui allait être une victoire historique. Deux heures plus tard, la foule en délire était encore plus bruyante qu'à l'arrivée. Il ne faisait aucun doute que tous les supporters irlandais s'en retournaient dans les pubs qu'ils venaient de quitter pour y passer une bonne partie de la nuit à chanter, boire et faire la fête, et tout cela sans aucun débordement. Et ils s'en sont retournés, vous l'aurez deviné, accompagnés... des supporters australiens!!

L'équipe du trèfle est une icône de ce qu'est « l'univers rugby ». Facilement reconnaissable par leur couleur verte, leurs barbes rousses et leurs chants traditionnels, il vous sera aisé de vous glisser parmi les partisans. Peigniez-vous un trèfle sur la joue, buvez beaucoup de bières et criez aussi forts qu'eux!

Continuons notre tour du monde pour atterrir en Amérique du Sud au pays des Pumas. L'Argentine, elle aussi terre de rugby, est une nation qui ne cesse de monter en puissance ces dernières années. Peut-être moins connue à travers ses partisans, elle n'en reste pas moins que c'est toute une population qui pousse derrière leurs joueurs. Pour l'occasion, il faudra quitter le vert de l'Irlande pour le bleu ciel rayé de blanc et apprendre la « Marcha Patriotica », l'hymne national argentin. Pays dont la combativité et la hargne leur ont permis de décrocher la 3ème place de la dernière Coupe du monde, ils ne sont pas les derniers pour mettre l'ambiance dans les tribunes. Oubliez les cornemuses et les violons celtes pour une ambiance beaucoup plus latine et… brûlante! C'est un raz-de-marée bleu et blanc qui viendra happer quiconque se trouvera sur son chemin. Au son des fanfares et des « Vamos! Vamos! », les pumas argentins rentrent aussi dans les incontournables des pays qui savent fêter à la façon rugby.

Traversons maintenant l'hémisphère sud d'Ouest en Est et revenons en terres Néo-Zélandaises. Comment parler de ce pays sans évoquer le rugby ? Plus qu'un mode de vie, c'est une religion, une culture, une façon de penser inévitable. Pays hôte pour la 7e édition de la Coupe du monde de rugby, la Nouvelle-Zélande sera soutenue par tous ses habitants.

Équipe très connue et populaire du fait qu'elle a pour coutume de commencer ses parties par une danse appelée « Haka » comme celle qu'effectuaient les guerriers Maoris devant leurs ennemis pour les intimider et les marquer psychologiquement avant de combattre, elle est sans conteste la grande favorite pour le titre suprême cette année. Comme preuve de l'engouement que cette équipe suscite, les partisans sont des milliers à se déplacer aux pratiques autant qu'aux rencontres. Ceux-ci arrivent des heures en avance maquillés de noir, la fougère blanche par-dessus pour encourager leurs héros même lorsqu'il s'agit du plus simple jogging d'échauffement.

Le lien qui est en train de se créer entre joueurs et partisans est extraordinaire, celui-ci doit être certainement plus fort à l'heure actuelle que pour tous les autres participants du tournoi. Alors que le pays des kiwis s'apprête à passer à l'heure d'été, c'est la destination parfaite pour aller passer du bon temps sous le soleil du Pacifique et s'imprégner de l'ambiance rugby que la population néo-zélandaise transmet bien chaleureusement.

Lors de ce très rapide tour du monde des partisans, il aurait peut-être été plaisant de citer les partisans canadiens trop peu nombreux derrière leur équipe. Bien que certains joueurs canadiens se soient démarqués en se faisant pousser toute une barbe de bûcheron, la feuille d'érable n'est pas encore suffisamment agitée dans les stades face à la performance actuelle du Canada qui est passé du 14e au 11e rang des meilleures nations mondiales. Alors que le Canada a fait une belle Coupe du Monde, l'actualité se centre plus sur la capacité d'Andrei Markov à pouvoir s'entraîner. Le Canada a une notoriété reconnue dans le rugby mondial. Bien que le pays ne soit pas dans le top de l'élite international, le Canada n'a jamais eu à rougir de ses prestations… au contraire. Ce sont des joueurs qui jouent avec le cœur et une envie débordante, ne faiblissant jamais devant la difficulté. Peut-être qu'avec un public plus conséquent et des partisans prêts à se forger une personnalité qui défiera toute concurrence, le XV de l'érable pourrait atteindre des sommets jusqu'ici jamais ambitionnés…

- Michel Mira