WENGEN - La descente de Wengen, disputée samedi, est la plus longue de la Coupe du monde mais aussi l'une des plus vénérables, qui égrène au long de ses 4,480 km plus de 80 ans d'histoire du ski alpin avec comme emblème, son saut de la Tête de chien.

« Elle fait partie du patrimoine du ski alpin. C'est une descente mythique », estime le Suisse Patrice Morisot, l'entraîneur de l'équipe de France de vitesse. « Il n'y a plus qu'ici en fait qu'on trouve des passages hors normes. Si on voulait construire une piste de descente aujourd'hui avec ce genre de passages, la Fédération internationale de ski dirait non par rapport à la sécurité ».

La « Tête de chien », cet impressionnant passage entre deux rochers, l'étroit petit chemin borné par deux virages à 90 degrés, mais aussi le tunnel sous le viaduc du petit train à crémaillère, dans lequel s'engouffrent les coureurs, sont les marqueurs de cette course qui se dispute depuis 1930 avec trois majestueux sommets en toile de fond, l'Eiger (l'Ogre), le Mönch (Le Moine) et la Jungfrau (La Vierge).

« C'est un petit peu comme le Grand Prix de Monaco en F1 », estime Fredy Fuchs, à la veille de tirer sa révérence après 42 ans dans le comité d'organisation.

Cette piste a inspiré les plus grands, Jean-Claude Killy, Franz Klammer ou Marc Girardelli. « C'est une classique, elle a une si longue histoire. La piste elle-même est un plaisir. C'est là que certaines années, j'ai skié à mon meilleur. Parfois, elle est source d'inspiration, mais parfois non », souligne Bode Miller, l'actuelle star américaine du ski qui l'emporta deux fois de suite, en 2007 et 2008.


Un mort en 1991

L'Italien Kristian Ghedina en détient le record depuis 1997, avec un temps de 2 min 24 sec 23. Trente à 40 secondes de plus que la plupart des autres descentes du circuit, qui mettent les jambes à bloc.

Guy Périllat, l'un des rares Français à avoir remporté cette classique, en 1961, se souvient qu'il y a cinquante ans la course se jouait alors environ en 3 minutes 20 secondes.

« C'est celle parmi toutes les victoires de ma carrière, où je me suis imposé avec le plus grand écart, 4 sec 6 ! », raconte le double médaillé olympique. Pour lui, même si certaines portions ont été modifiées, elle n'en est pas pour autant édulcorée: « Elle suit l'évolution du ski moderne. On va beaucoup plus vite, et les questions de sécurité prennent des proportions énormes. À l'époque c'était des militaires qui préparaient les pistes, pas des dameuses. »

Certaines portions de la piste ont été renommés au fil des anecdotes, telles l'« Österreicherloch » (le trou aux Autrichiens), là où s'écroulèrent curieusement en 1954 tous les Autrichiens sauf un... Christian Pravda qui remporta l'épreuve.

Ce n'est pas là mais dans les deux virages du final que perdit la vie en 1991 l'Autrichien Gernot Reinstadler, après avoir heurté un piquet de sécurité. « On pouvait voir des traces de sang couler jusque dans l'aire d'arrivée », raconte le chef de presse Hugo Steinegger. « Nous avons tellement été touchés, que par la suite, on a pensé à tout arrêter ».

Depuis cette tragédie, les mesures de sécurité ont été bien renforcées.