WENGEN - Avec ses 4,4 km, qui en font la plus longue piste de Coupe du monde, la descente de Wengen, samedi, est un marathon de quelque 155 secondes pour les skieurs, qui en ressortent poumons et cuisses brûlés.

Cette course, dont la toute première édition remonte à 1930, appartient au patrimoine du ski alpin, tout comme l'autre grande classique de l'hiver, Kitzbühel en Autriche, qui se court une semaine plus tard.

Tout y est spécial, à commencer par le petit train à crémaillère que les skieurs empruntent pour rejoindre le départ à 2.315 m, près du terrible mont Eiger (l'Ogre en allemand).

Malgré le renforcement des mesures de sécurité en ski alpin, elle a pu conserver ses passages clés qui lui assurent son identité. La « Tête de chien », impressionnant rétrécissement entre deux rochers, l'étroit petit chemin borné par deux virages à 90 degrés, ou le petit tunnel sous la voie ferrée, dans lequel s'engouffrent les coureurs, ne seraient certainement plus homologués aujourd'hui.

« C'est une course que je rêve de gagner depuis ma jeunesse », confie le Canadien Erik Guay. Le champion du monde 2011 n'est pas le seul. L'Italien Dominik Paris adore cette piste parce qu'elle est « complète », explique-t-il. « Elle est longue, il y a des virages techniques, des sauts, il faut aller vite, savoir glisser. »

Avec son long tronçon de glisse, où les coureurs sont en position de recherche de vitesse, la piste est propice à affoler les compteurs. Trois fois l'an dernier, le record du monde de vitesse de ski alpin était tombé. Le Français Johan Clarey, qui en est toujours le détenteur, l'avait poussé à 161,9 km/h.

« On est cramé »

Si Wengen n'est ni la descente la plus redoutable, ni la plus technique du circuit, elle est la plus épuisante physiquement avec ses quelque 30 secondes de plus. Trente secondes qui n'ont l'air de rien mais qui font toute la différence.

« On arrive en bas, on est cramé », résume Adrien Théaux, autre prétendant français au podium. « À partir de deux minutes, il y a vraiment une barrière. On commence à sentir que les jambes brûlent très, très fort. On essaie de s'entraîner à fond pour ne pas connaître ce phénomène, mais il n'y a pas de remède miracle! », raconte le Pyrénéen.

Après 120 secondes, les mauvaises pensées commencent à entamer la lucidité. « Il faut éviter de penser qu'on a mal aux jambes. On souffre, on a de l'acide lactique plein le corps et il faut continuer à pousser », explique Clarey.

Ce n'est pas pour rien que les descendeurs affichent des cuisses impressionnantes, qu'ils ont fuselées dans les salles de musculation cet été.

« Physiquement, personne ne la dompte vraiment, estime Théaux. L'expérience permet cependant d'y laisser beaucoup moins d'influx car la piste, on la connaît par coeur. »

La victoire se joue parfois dans les deux ultimes virages qui surgissent à quelques mètres de la ligne d'arrivée. Après 2 minutes 15 d'effort, une porte ratée et la course est réduite à néant. L'Américain Bode Miller, l'un de ceux à avoir son nom au palmarès (2007 et 2008), en sait quelque chose : il avait vu un autre podium s'envoler en chutant là, en 2010.