VIENNE, AFP)- Une polémique s'est installée jeudi entre l'équipe de France de ski alpin et la justice autrichienne dans l'enquête sur l'accident mortel de la championne du monde française de super-G Régine Cavagnoud.

L'avocat autrichien de la Fédération française de ski (FFS) a affirmé jeudi que l'équipe allemande était informée du départ de Régine Cavagnoud pour sa dernière descente et aurait du prévenir l'entraîneur Markus Anwander et éviter leur collision fatale le 29 octobre dernier.

"Sur la base des informations dont je dispose, je pars du principe que les responsables allemands avaient connaissance du départ de Régine Cavagnoud", a indiqué à l'AFP Andreas Ermacora, l'avocat autrichien de la FFS joint au téléphone à son cabinet d'Innsbruck (ouest). "Il appartenait aux Allemands de transmettre par radio l'information du départ de Cavagnoud", a-t-il précisé.

Mercredi, le procureur du tribunal d'Innsbruck Heinrich Cede avait indiqué qu'un entraîneur français, Xavier Fournier, était soupçonné de négligence dans l'enquête judiciaire. "D'après nos premières informations, un soupçon pèse sur l'entraîneur français qui a autorisé le départ" de la descente fatale de Régine Cavagnoud, avait-il déclaré.

Le directeur de l'équipe de France féminine de ski alpin Jean-Philippe Vulliet avait aussitôt regretté ces déclarations. Celles-ci "m'étonnent, car nous n'avons pas l'habitude chez nous que le procureur s'exprime", avait-il dit à Copper Mountain (Colorado).

Présomption d'innocence

Selon l'avocat de la FFS, les déclarations du procureur Cede "ne sont pas sérieuses". "Il est trop tôt pour tirer des conclusions et pour dire s'il y a eu négligence", a-t-il affirmé en rappelant qu'en Autriche "la présomption d'innocence doit prévaloir".

Il a également jeté le doute sur la valeur des dépositions des entraîneurs français Xavier Fournier et Lionel Finance actuellement au dossier judiciaire. Celles-ci figurant à l'enquête judiciaire "n'ont pas été signées" et la gendarmerie autrichienne "a procédé aux auditions sans interprète", a-t-il souligné. Les connaissances d'allemand de Lionel Finance, qui a assuré la traduction pour Xavier Fournier, n'étaient peut-être pas suffisantes, a estimé M. Ermacora.

L'avocat a confirmé que des membres de l'équipe de France seraient interrogés par un juge d'instruction début janvier près de Saalbach, au sud de Salzbourg, à l'occasion d'épreuves de Coupe du monde de ski alpin qui s'y dérouleront du 11 au 13 janvier. "En Autriche, on ne peut pas contraindre des étrangers à venir témoigner, mais les Français se présenteront volontairement au juge", a-t-il expliqué.

Régine Cavagnoud, 31 ans, avait percuté à grande vitesse Markus Anwander, sur le glacier du Pitztal (Alpes autrichiennes) lors d'une descente d'entraînement. Elle était décédée deux jours plus tard à la clinique universitaire d'Innsbruck.

Selon le rapport de gendarmerie, le passage fatal de Régine Cavagnoud n'avait pas été prévu initialement par les équipes féminines française et allemande qui s'entraînaient en commun.

Pour expliquer la présence de Markus Anwander sur la piste, l'enquête doit déterminer si les entraîneurs français avaient omis d'avertir les Allemands du passage non planifié de Cavagnoud ou si une négligence ou un problème technique, du côté allemand, a empêché la transmission de l'information.

Le parquet d'Innsbruck a ouvert une information contre X "en raison de soupçon d'homicide par négligence dans des circonstances particulièrement dangereuses". Cette infraction est punie par des peines allant jusqu'à trois ans de prison ferme par le code pénal autrichien.