BARCELONE, Espagne - La vieille aristocratie du football tremble sur ses fondations: grand d'Espagne et d'Europe, le FC Barcelone accueille mercredi soir Manchester City, nouveau riche de l'opulent Championnat d'Angleterre, qui a débauché l'ex-entraîneur barcelonais Pep Guardiola pour bousculer l'ordre établi en Ligue des champions.

Au Camp Nou, dès 14 h 30 sur les ondes de RDS2, ce match au sommet de la poule C a comme un air de révolution de palais, entre un habitué du gotha européen et un nouveau venu aux dents longues.

Sur le papier, ce sont deux clubs plus que centenaires qui s'affrontent: le Barça a été fondé en 1899 quand City se targue d'origines remontant à 1880.

Mais à l'échelle européenne, leurs pedigrees n'ont rien à voir. Quand le blason blaugrana affiche cinq couronnes en C1, les « Sky Blues » ne comptent qu'une maigre Coupe des Coupes (la feue C2) à leur palmarès et ont connu une longue éclipse continentale dans les années 1980 et 1990.

C'est pour changer tout cela que City est allé chercher Guardiola, victorieux de l'épreuve-reine européenne en 1992 au sein du « Dream Team » barcelonaise de Johan Cruyff, puis double vainqueur de la « Coupe aux grandes oreilles » sur le banc du Barça en 2009 et 2011.

Recruté sur la durée (trois saisons), le Catalan sait mieux que quiconque que la tradition, en football, ne s'achète pas, malgré la manne financière dont dispose City, propriété d'un fonds d'investissement d'Abou Dhabi.

« On ne devient une équipe importante en Europe que quand on joue l'Europe régulièrement. C'est l'objectif pour Manchester City dans les cinq, six, sept prochaines années de pouvoir rivaliser chaque saison », a prévenu Guardiola mardi en conférence de presse.

« Un défi magnifique »

Avant Pep, City n'a jamais fait mieux que la demi-finale de C1 perdue la saison dernière face au Real Madrid (0-0, 1-0), autre antique maison du football européen.

Avec Pep, City espère jeter à bas l'ordre ancien. Le club a d'ailleurs intégré plusieurs anciens dirigeants barcelonais et plusieurs principes qui ont fait le succès de Barcelone, à commencer par son jeu de passes emblématique.

Mais un bastion comme le Camp Nou ne se prend pas si facilement. Le club catalan était présent au moins en quart de finale de C1 ces neuf dernières saisons. Et comme l'a dit mardi le défenseur Gerard Piqué, l'arrivée de Luis Enrique sur le banc en 2014 a « réactivé » le Barça post-Guardiola avec un nouveau sacre européen en 2015.

« Nous vivons désormais un autre âge d'or dont nous espérons qu'il va durer longtemps », a estimé Piqué.

Formidables compétiteurs dans le sillage de la star Lionel Messi, les Barcelonais ont l'orgueil de ceux qui refusent de déchoir. Pas question donc de chuter mercredi face à City, « un défi magnifique pour démontrer que nous restons au sommet », comme l'a résumé Piqué.

Liga contre Premier League

Au-delà de l'affrontement entre ces deux clubs, se dessine la rivalité croissante entre la Liga espagnole, victorieuse des trois dernières C1, et l'ambitieuse Premier League anglaise, forte d'un nouveau contrat mirobolant en matière de droits TV.

Le Barça, marque planétaire, reste pour le moment loin devant City au niveau financier avec un chiffre d'affaires record de 679 M EUR sur la saison 2015-2016, contre environ 436 millions d'euros pour le club anglais.

Mais la crainte des Catalans est de voir leur statut s'éroder et de finir par perdre leurs meilleurs joueurs, attirés sous des cieux plus rutilants.

« Cela ne me surprendrait pas que (City) essaie de recruter les joueurs d'ici », a commenté Piqué. « C'est normal de la part d'un club avec une telle capacité financière. »

Mardi, Guardiola a assuré n'avoir pas tenté d'attirer Messi l'été dernier. Qu'il soit contraint de démentir prouve qu'un tel mouvement, sans doute impensable hier, est peut-être devenu envisageable. Et que le vénérable FC Barcelone se doit d'étouffer la révolte au plus vite.