PARIS - L'attaquant de l'équipe de France Karim Benzema manquera l'Euro-2016 si son dossier judiciaire n'évolue pas : « Il n'est plus sélectionnable », a tranché jeudi Noël Le Graët, président de la Fédération française de football (FFF), au sujet de Benzema mis en examen dans l'affaire du chantage au sex tape contre l'autre international Mathieu Valbuena.

« Karim Benzema n'est plus sélectionnable jusqu'à ce que la situation évolue, jusqu'à ce qu'il y ait du nouveau dans ce dossier », a annoncé M. Le Graët, costume sombre, devant une affluence exceptionnelle d'une soixantaine de journalistes accrédités pour l'occasion au siège de la FFF à Paris.

« Je respecte la décision et ai confiance en notre président Noël Le Graët », a tweeté Karim Benzema.

L'équipe de France va donc préparer et jouer l'Euro à domicile sans son meilleur attaquant, sauf rebondissement judiciaire en faveur de Benzema d'ici là. À bientôt 28 ans (il les aura le 19 décembre), le joueur du Real Madrid est le meilleur buteur en activité de la sélection (27 réalisations en 81 sélections).

« C'est une décision que j'ai prise en tant que président de la fédération, dans un dossier compliqué, en cours devant la justice », a poursuivi le patron du football français, à six mois jour pour jours du match inaugural de l'Euro-2016 en France (10 juin-10 juillet). « Il n'est pas banni », a insisté M. Le Graët. Mais son avenir en équipe de France est bien sombre.

 

Le poids des écoutes

Pendant longtemps, M. Le Graët avait insisté sur la présomption d’innocence de Benzema, mis en examen le 5 novembre dans cette affaire pour « complicité de tentative de chantage » et « participation à une association de malfaiteurs ». Ces faits sont passibles de cinq ans de prison. Et le contrôle judiciaire imposé à Benzema lui empêche d'entrer en relation avec Valbuena.

Qu'est-ce qui a fait changer d'avis l'homme fort de la FFF? « Prendre des sanctions, ce n'est jamais ma tasse de thé, mais en tant que président de la fédération, je ne peux rester insensible aux écoutes téléphoniques qui sont parues dans les journaux dans cette affaire », a exposé M. Le Graët.

Le 10 novembre, la radio française Europe 1 avait retranscrit une écoute téléphonique du 6 octobre entre Benzema et Karim Zenati, son ami d'enfance écroué depuis dans cette affaire. Benzema y racontait l'entrevue qu'il avait eu la veille avec Valbuena à Clairefontaine, lors d'un rassemblement de l'équipe de France : « Je lui ai dit "moi je vais t'arranger la sauce. Faut que tu vas voir le mec (sic). Il va venir. Il va te parler. Mais je te donne ma parole que y a pas d'autre copie (du sex tape, ndlr)" ».

Cette conversation liée à une tentative de chantage présumée, dans le centre d'entraînement national, a pesé lourd.

Valbuena, la victime, encensé

Avant de lâcher la sentence, M. Le Graët a fait un long préambule, évoquant d'abord « Mathieu Valbuena, la victime ».

« Qui peut dire que ce joueur exceptionnel n'ait pas été à la hauteur en équipe de France? Bien sûr, Valbuena est sélectionnable. Il pourrait l'être dès demain s'il le fallait », a assuré M. Le Graët. La presse française lui a reproché de ne pas avoir exprimé assez tôt dans ce dossier sa solidarité avec la victime. « Il a l'amitié totale de la FFF et le respect complet de Didier Deschamps le sélectionneur », a encore souligné Le Graët.

Le président de la FFF a cependant reproché à Valbuena « l'imprudence d'avoir laisser traîner son téléphone portable » où la sex-tape a sans doute été récupérée par les maîtres-chanteurs présumés.

Le chef de la FFF a ensuite qualifié Benzema de « type bien », « totalement irréprochable au Real Madrid », qui « vient d'un quartier difficile, qui n'a pas changé de copains » et qui « n'a pas une communication extraordinaire ».