MONTRÉAL – En février 2016, moins d’un mois avant le début de sa saison, l’Impact avait annoncé l’arrivée d’un prometteur milieu de terrain. Harry Shipp n’avait que 24 ans et venait de connaître deux solides campagnes avec le Fire de Chicago. À première vue, son acquisition représentait un excellent coup d’Adam Braz, le directeur technique de l’époque.

La transaction avait toutefois été un choc difficile à encaisser pour Shipp, un natif de Chicago qui avait son club et sa ville dans le sang. Le jeune Américain avait peiné à s’intégrer à son nouvel environnement et n’avait finalement jamais trouvé sa zone de confort à Montréal. Moins d’un an après ses premières foulées en bleu-blanc-noir, l’Impact constatait l’échec et l’échangeait aux Sounders de Seattle.  

Bilan de saison de l'Impact : Henry et Renard

Il peut être tentant, naturel même, de faire un lien entre cette expérience ratée et celle tentée plus récemment par Olivier Renard. Comme Shipp, Djordje Mihailovic a grandi dans la Ville des Vents et a réalisé son rêve d’enfance lorsqu’il a rejoint la première équipe du Fire à l’âge de 18 ans. Mais après avoir discuté avec le nouveau venu, lundi, on a compris que les parallèles s’arrêtaient là.

Shipp était arrivé à Montréal à reculons. Mihailovic s’en vient en courant.

« Évidemment que ça a été un peu aigre-doux, a convenu le nouveau milieu de terrain de l’Impact en conférence vidéo avec les médias montréalais. J’ai grandi en regardant jouer le Fire, je suis passé par son académie, j’ai fait ma place dans la première équipe. Ça a été mon rêve à une certaine époque. Mais maintenant, je crois que je suis prêt pour un nouveau défi. »

Mihailovic n’a pas voulu entrer dans les détails, mais on comprend que ses liens avec son club formateur se sont effrités en 2020. Il y a eu un changement de position qui ne semble pas lui avoir plu, puis cette impression que les patrons étaient réticents à lui confier les responsabilités qu’il convoitait. À un certain moment au cours de la saison, un consensus sur la nécessité d’un changement de décor s’est formé entre la famille et les agents du jeune homme.

Mihailovic était avec l’équipe nationale américaine, au début décembre, lorsqu’il a reçu un appel de Thierry Henry. Ce dernier l’a fait sentir désiré et l’a convaincu qu’il trouverait à l’Impact les conditions qu’il ne croyait plus pouvoir obtenir à Chicago.

« Je veux prendre plus de place, je veux assumer un plus grand leadership, demande l’athlète de 22 ans. Ces quatre dernières années à Chicago, je sentais qu’on me voyait comme un petit frère. Même si j’amassais ma part de points et que j’étais appelé en équipe nationale, j’avais toujours l’impression qu’on me considérait comme le jeune joueur formé au club dont on n’attendait pas grand-chose au final. Un joueur qui pouvait faire le travail, mais qu’on pouvait aussi facilement laisser tasser. C’est ce que je ressentais. »

« Mais en arrivant à Montréal, je sens un réel engagement envers moi, a-t-il poursuivi. Je ressens les attentes et cette pression sur mes épaules dont j’ai besoin et qui m’aidera à m’améliorer en tant que joueur. C’est ce dont j’ai besoin à cette étape de ma carrière. »

Porte ouverte au milieu de terrain

Mihailovic a pris part à 20 des 23 matchs du Fire, dont 14 dans un rôle de partant, en 2020. Il a amassé sept passes décisives, la meilleure récolte de sa carrière et un sommet au sein de l’équipe.

Malgré cette hausse de production, on le sent agacé par la décision du nouvel entraîneur du Fire, Raphael Wicky, de l’utiliser à l’aile gauche plutôt que dans une position plus axiale en milieu de terrain.

« Je pense que la meilleure position pour moi est au milieu du terrain, où je peux toucher davantage au ballon. Je me sens bien avec la balle aux pieds, j’aime faire des jeux, c’est ce que j’ai fait toute ma vie. La saison dernière, je jouais plus à l’extérieur, mais ça n’a rien changé. Je n’ai pas changé mon style juste parce que j’étais 30 mètres plus à gauche sur le terrain. »

Le prochain camp d’entraînement fournira les premières pistes de réponses, mais on peut imaginer qu’avec l’absence de Saphir Taïder et le départ attendu de Bojan, Mihailovic se verra offrir toutes les opportunités de solidifier sa place à sa position préférentielle. Il se dit déjà enthousiaste à l’idée de combiner avec Romell Quioto, la révélation offensive de l’Impact en 2020. Peut-être se découvrira-t-il aussi des atomes crochus avec son compatriote Mason Toye, un autre morceau de ce mouvement jeunesse qui s’opère à Montréal.

« Mais je ne m’attends pas à recevoir de passe-droit, précise-t-il. Il y a de la qualité dans ce groupe, c’est une équipe qui s’améliore. Je sais qu’ils ont mis plusieurs jeunes joueurs sous contrat, des jeunes qui ont faim et qui veulent faire leurs preuves. Je devrai faire la même chose. »