PEKIN (AFP) - Depuis 2000, l'Afrika United Football Club est une Afrique en réduction sur les terrains de football de Pékin, la seule formation réunissant la plupart des nations du continent noir en Chine.

"Nous avons des joueurs de Madagascar, de la Namibie, du Nigeria, du Liberia, de la République démocratique du Congo, de la Tanzanie, du Cameroun, du Sénégal, de la Côte d'Ivoire, de la Libye, de l'Ouganda, de la Guinée équatoriale, mais aussi des Brésiliens, un Belge et un Français", témoigne l'entraîneur Kagashani, un Tanzanien de 38 ans, qui vit en Chine depuis 12 ans.

Venu étudier l'informatique, il travaille désormais dans une petite société, tout en veillant sur sa formation chérie, dont il fut l'un des fondateurs il y a six ans, fruit de la fusion entre deux équipes africaines concurrentes.

Depuis, l'équipe, où jouent beaucoup d'étudiants, domine la ligue régionale dans laquelle elle évolue et qui regroupe des formations de différents pays.

Pour célébrer à sa manière le sommet sino-africain de ce week-end, auquel vont participer plus de 40 chefs d'Etat et de gouvernement d'Afrique, l'Afrika United a organisé mercredi soir un match amical, dans la froide température de ce début novembre, contre les chauffeurs de taxi de Pékin, une rencontre aisément remportée sur le score de 4 à 1.

"C'est bien de faire quelque chose entre les gens, pas seulement entre les dirigeants", explique Ian Bustamante, un Belge de parents cubain et espagnol ayant vécu en Afrique, l'un des responsables de l'équipe et occasionnellement le gardien de but.

Pour soutenir son équipe, il agite le drapeau basque, un emblème fédérateur car s'y trouvent toutes les couleurs africaines, "sauf le jaune". Sur le brassard du capitaine figure aussi un petit drapeau basque. Leur cri de guerre est "Akuna Matata!", ce qui en swahili signifie "pas de problème".

Autour du terrain, sommet sino-africain oblige, de nombreux journalistes chinois étaient venus voir et interroger cette équipe d'Africains en Chine.

Si à la fin des années 1980, des étudiants chinois avaient organisé des manifestations contre leurs homologues africains, aujourd'hui, selon eux, la situation a bien changé.

"A cette époque, la plupart des Chinois n'avaient aucune idée de l'Afrique, je crois que les Chinois sont plus ouverts, surtout dans les grandes villes", estime Samuel Ahadu, 43 ans, l'un des piliers de l'équipe, qui est arrivé en Chine en 1997 après avoir vécu aux Etats-Unis, où il a été notamment chauffeur de taxi à Los Angeles.

"Toutes les sociétés exercent un certain racisme, la Chine n'est pas indemne, mais les Chinois sont trop pratiques pour être ouvertement racistes, ils aiment faire de l'argent, que ce soit avec les Noirs ou les Blancs", ajoute-t-il.

Pour tous, le sommet ne peut qu'être bénéfique, surtout, relève l'entraîneur Kagashani, si cela permet aux leaders africains "d'apprendre comment les dirigeants chinois ont pu développer la Chine aussi rapidement".

"Je souhaite la bienvenue au modèle chinois en Afrique", lance l'attaquant nigérian Steven Mark Nwamkpa, 20 ans, qui a joué à Chypre (Limassol) et en Géorgie (Tbilissi) et gère aujourd'hui une boîte de nuit à Pékin.

Lorsque les Anglais ont construit les chemins de fer dans son pays, son père ou son grand-père n'avaient pas les moyens de les emprunter ; aujourd'hui, quand les Chinois le font, c'est le peuple qui en profite, assure-t-il.

De son côté, Ahadu souligne qu'à partir du moment où l'engagement chinois "est basé sur des besoins mutuels, cela ne peut être mauvais", tout en dénonçant l'"hypocrisie" des anciennes puissances coloniales ou des Etats-Unis, qui critiquent la politique chinoise.