ATHENES (AFP) - Deux ans après son triomphe à l'Euro 2004, le football grec, empêtré dans ses querelles de personnes, fait face à la plus grave crise de son histoire avec la décision de la Fédération internationale de football (Fifa) de suspendre le pays de toute compétition.

Alors que les supporteurs grecs étaient déjà attristés par l'échec de l'équipe nationale menée par le sélectionneur Otto Rehhagel à se qualifier pour le Mondial en Allemagne, la Fifa a voulu sanctionner une tentative du gouvernement conservateur de renforcer son contrôle sur le monde du sport.

Dès lors, la guerre ouverte que se livrent le président de la Fédération grecque de football (HFF), Vasilis Gagatsis, et le secrétaire d'Etat aux Sports, Georges Orphanos, a encore gagné en intensité.

Le conflit entre les deux hommes avait démarré peu après la victoire de la Grèce en 2004, lorsque la question s'était posée de savoir qui de l'Etat ou de la fédération devait payer les primes des joueurs.

C'est finalement l'Etat qui a fini par verser l'argent, mais Georges Orphanos en a profité pour lancer une réforme visant à restreindre les aides publiques au football et renforcer le contrôle des activités financières des clubs, dont certains frisent en permanence la banqueroute.

"Ingérence"

Ainsi accusée par le gouvernement d'être incapable de mettre elle-même de l'ordre dans ses affaires, la HFF a crié au scandale, dénonçant "l'ingérence" d'un pouvoir politique ayant pour ambition "d'isoler le football grec de la famille internationale" du ballon rond.

En suspendant lundi la Grèce pour provoquer une réaction du gouvernement, la Fifa lui a donné raison. Depuis, Georges Orphanos a mangé son chapeau en excluant la HFF des dispositions de son projet de loi controversé, espérant une levée des sanctions de la fédération internationale.

Le patron de la fédération grecque, lui, ne cesse d'enfoncer le clou. "Deux ans après le plus bel accomplissement du sport grec, nous ne sommes pas en train de parler des performances de notre équipe nationale mais de la façon dont ce gouvernement a réussi à nous exclure de la compétition!", dit Vasilis Gagatsis.

Les présidents des clubs eux ne cachent pas leurs craintes.

"La HFF est l'autorité légitime du football et elle doit créer sa législation. Les deux parties doivent aplanir leurs différends afin que la suspension soit levée, sans quoi nous n'aurons plus qu'à jouer au football entre nous", estime le patron du Panathinaïkos, Yiannis Vardionoyannis.

Image déplorable

Petros Kokkalis, vice-président de l'Olympiakos Le Pirée, juge lui que la crise que traverse le football grec est "une catastrophe sans précédent", promettant que son club ira devant les tribunaux pour obtenir des compensations financières s'il ne joue pas la Ligue des Champions cette année.

Paradoxalement, Georges Orphanos et Vassilis Gagatsis s'étaient mis d'accord cette année pour créer un nouveau championnat comptant 16 équipes, baptisé Super Ligue, prévoyant un nouveau mode de partage des revenus des retransmissions télévisées et plus de transparence.

Le secrétaire d'Etat et certains clubs se sont également engagés à lutter plus efficacement contre les violences dans les stades, endémiques en Grèce, pays où le hooliganisme est rarement sanctionné.

Les responsables du football grec espèrent aussi à terme rehausser leur image dans l'opinion, où règne largement l'idée que la triche et la corruption dominent la discipline.

Selon une récente étude de l'Université de sciences économiques d'Athènes, qui interrogé un panel de 1500 personnes, seulement 8,5% d'entre elles pensent que le football grec professionnel est propre. Et 47% ne font pas confiance à ses représentants.