MONTRÉAL - S'il y en a une qui est bien heureuse des principes de jeu que Carolina Morace a instauré au sein de l'équipe canadienne de soccer féminin, c'est bien Marie-Ève Nault. Après tout, c'est ce qui permettra à la Trifluvienne de 29 ans de disputer la première Coupe du monde de sa carrière, à l'occasion du tournoi mondial qui s'amorcera ce week-end en Allemagne.

Même si elle a eu droit à quelques sélections en 2004, Nault n'a jamais pu se tailler une place au sein de l'équipe canadienne qui était dirigée à l'époque par Even Pellerud. Celui-ci privilégiait le style «kick and run», et il recherchait donc des milieux de terrain de grande taille aux qualités athlétiques, ainsi que des défenseurs qui se bornaient à projeter le ballon loin devant lors des relances.

L'embauche en 2009 de Morace a toutefois rouvert une porte pour Nault. L'entraîneure de 47 ans, qui a marqué 105 buts en 153 matchs avec la sélection italienne lorsqu'elle était joueuse, favorise un style axé sur le contrôle du ballon. Elle a donc besoin de milieux de terrain et de défenseurs dotés d'une bonne vision du jeu, qui sont à l'aise ballon au pied.

Comme Nault, par exemple. La preuve, c'est que celle-ci a été rappelée régulièrement en sélection nationale depuis que Morace est en poste. Ce milieu de terrain naturel, qui occupe officiellement le poste de défenseur avec l'équipe canadienne, a eu droit à une quarantaine de sélections depuis deux ans et demi.

«J'étais surprise que (Morace) me rappelle, parce que je ne m'attendais plus à avoir de nouvelles de l'équipe nationale», a reconnu Nault au cours d'un récent entretien téléphonique avec La Presse Canadienne. «Mais j'ai participé à mon premier camp en janvier 2009 et je n'en ai pas raté depuis.

«Elle a un style qui me sied pas mal plus, a ajouté Nault. Le jeu de l'équipe est énormément axé sur le contrôle du ballon. Beaucoup plus que dans les années précédentes, quand les joueuses tapaient dans le ballon en espérant que (Christine) Sinclair, qui se retrouvait inévitablement contre quatre joueuses adverses, fasse quelque chose de bien.»

Rhian Wilkinson, un milieu de Baie d'Urfé, en sera à sa troisième Coupe du monde lorsque le tournoi s'ébranlera ce dimanche, à l'occasion du match d'ouverture entre l'Allemagne et le Canada. Celle qui a 100 sélections en carrière a eu un rôle important à jouer sous l'égide de Pellerud, mais elle savoure la façon de faire de Morace.

«Even mérite vraiment le crédit d'avoir mis le Canada sur la carte au chapitre du soccer féminin, a souligné Wilkinson. Bien des gens étaient frustrés par sa façon de faire vers la fin de son séjour avec nous. Et comme joueuse, je ne trouvais pas que c'était le jeu le plus beau à jouer. Mais il nous a vraiment amenées à un autre niveau, tout comme Carolina l'a fait.

«Ce qu'Even a fait, c'est de développer la force mentale des joueuses. Avec lui, on a remporté des matchs qu'on n'aurait jamais dû gagner, a ajouté Wilkinson. Carolina, elle, a amené les joueuses à avoir confiance dans leurs habiletés individuelles. C'est là quelque chose qu'on ne peut pas inculquer du jour au lendemain, mais elle a pris la peine de le faire.»

Wilkinson, qui a vécu l'ivresse de la quatrième place acquise au Mondial de 2003 et la déception d'une élimination rapide au tournoi de 2007, chaque fois avec Pellerud, espère renouer avec le succès lors du prochain tournoi.

Une place en demi-finale est fort possible pour le Canada, qui est classé sixième au monde. Car les deux équipes qualifiées du groupe A, celui du Canada, se retrouveront en quarts de finale contre des formations du groupe B, théoriquement plus faibles.

Mais selon Wilkinson et Nault, le plus grand défi sera de «sortir» du groupe A. En plus de l'Allemagne, celui-ci compte la France et le Nigeria.

«On se trouve dans un groupe qui est extrêmement difficile, a souligné Nault. Il va falloir disputer trois gros matchs. L'Allemagne, c'est le meilleur programme féminin au monde en ce moment.

«Les joueuses françaises ont l'avantage de disputer un championnat de clubs qui dure 10 mois, a par ailleurs noté la Trifluvienne. Elles vont avoir sept ou huit joueuses de l'Olympique lyonnais, le club qui vient de gagner la Ligue des champions du côté féminin. Elles vont donc miser sur une majorité de joueuses qui évoluent ensemble à l'année longue.

«On ne sait pas trop à quoi s'attendre du Nigeria, mais il s'agit toujours d'une équipe athlétique, qui bataille ferme», a par ailleurs indiqué Nault.

Avant d'affronter la France le 30 juin, à Bochum, et le Nigeria à Dresden, le 5 juillet, le Canada se mesurera à l'Allemagne ce dimanche à Berlin.

Devant 70 000 spectateurs

Plus de 70 000 billets ont été vendus en vue du match d'ouverture du tournoi, mais les Canadiennes entendent bien profiter de l'occasion pour soutirer au moins une nulle face aux Allemandes. On le sait, les équipes de tête ont parfois tendance à amorcer lentement un tournoi comme celui de la Coupe du monde.

«Oui, ça peut être un avantage, a reconnu Nault. On n'aura rien à perdre. Les Allemandes sont les championnes du monde et elles seront à la maison devant leurs partisans. Elles auront donc plus de pression que nous.

«Il va falloir disputer un de nos meilleurs matchs individuellement et collectivement, mais je pense que c'est possible d'aller chercher un bon résultat.»

«On dit que pour gagner, il faut battre toutes les bonnes équipes, a noté Wilkinson. Il n'y a pas de meilleure manière de commencer le tournoi, selon moi, même s'il va falloir se regrouper en défensive et essayer de tenir le rythme. Mais quelle opportunité d'affronter une équipe aussi fantastique, devant une foule aussi importante!»