MARSEILLE - Le projet de vente du club de soccer de l'Olympique de Marseille (L1) à l'homme d'affaires canadien Jack Kachkar a tourné court, après six mois de contacts, a annoncé jeudi son propriétaire actuel Robert Louis-Dreyfus qui, toujours déterminé à quitter l'OM, se dit prêt à étudier d'autres offres.

"Robert Louis-Dreyfus confirme avoir mis un terme définitif aux discussions avec Jack Kachkar relatives à la reprise de l'Olympique de Marseille", a indiqué son porte-parole.

Depuis le refus le 22 mars de Robert Louis-Dreyfus d'accorder un nouveau délai de paiement au candidat repreneur, le sort de la transaction qui portait sur 115 millions d'euros, apparaissait presque scellé.

Ce jour-là, son porte-parole avait indiqué que "RLD" laissait cependant une infime chance à Kachkar: "Robert Louis-Dreyfus se décidera dans les prochains jours sur la vente du club, en fonction de sa conviction quant à la capacité de Jack Kachkar à assurer la pérennité du club".

Le lendemain, alors que tout semblait terminé, Kachkar assurait rester "cependant très engagé dans le projet de rachat de l'Olympique de Marseille".

Le Canadien d'origine arménienne qui était allé jusqu'à danser dans les vestiaires un soir de victoire de l'OM, semble donc être allé vite en besogne. S'il n'a pu rassurer "RLD" sur la pérennité et la portée de son engagement, les recherches des services de la DST et des Renseignements généraux sur l'origine de sa fortune (qui ont indiqué n'avoir "rien à signaler" sur le sujet), ainsi que des informations de presse sur l'ouverture d'une enquête par Tracfin (Traitement du Renseignement et Action contre les Circuits Financiers clandestins), ne sont peut-être pas totalement étrangères à l'échec de la transaction.

Le Canadien n'en a, du reste, pas totalement fini avec le dossier car il existe une clause de dédit contractuelle de 8 millions d'euros, "négociable", précise-t-on de source proche du club.
Le président de la Ligue de football professionnel (LFP) Frédéric Thiriez qui a aussitôt réagi, a estimé que la décision de "RLD" était "une sage décision qui préserve les intérêts de l'Olympique de Marseille d'abord mais aussi du soccer français dans son ensemble".

- club de L1 à vendre -

Apparaissant comme un semi-échec pour le milliardaire suisse, cette fin de partie ne résout rien pour lui. "Robert Louis-Dreyfus est toujours déterminé à quitter l'OM", précisait-on jeudi de source proche du dossier assurant que "s'il y a d'autres offres, il les étudiera".

"RLD" n'a officiellement reçu pour l'heure "aucune autre offre de reprise", précisait-on. "Il faut maintenant du sérieux en face. Un partenaire d'affaires capable d'apporter 115 millions d'euros puis 20 millions d'euros par an, c'est difficile à trouver", ajoutait la même source.

Mais sa volonté de quitter le club demeure aussi forte, même si les sommes en jeu sont peu importantes à l'échelle de sa fortune. Il pourrait donc rester le garant du club un certain temps, au moins jusqu'au début de saison prochaine. Et il ne le vendra sans doute pas à un groupe d'investisseurs conseillés par l'ex-président de l'OM Jean-Michel Roussier qui ne l'a pas épargné en mars 2006 lors du procès des transfert suspects entre 1997 et 1999.

"L'hypothèse d'une seconde offre circule dont l'identité des auteurs n'est pas précisée", a ajouté cette source proche du club.

Mais pour "RLD", cet épisode pourrait être un mal pour un bien. Si l'OM venait à remporter la Coupe de France et à décrocher en championnat une place qualificative pour la Ligue des champions, la valeur du club pourrait en être rehaussée. Sur le plan judiciaire, "RLD" pourrait de plus se présenter avec l'image d'un homme qui n'a pas voulu brader son club, en juin au procès en appel des transferts suspects à l'OM. "RLD" a été condamné à 3 ans de prison avec sursis en première instance.

Le feuilleton

Après six mois de contacts et d'annonces contradictoires, Robert Louis-Dreyfus, actionnaire principal de l'Olympique de Marseille, a mis un terme définitif au projet de vente du club à l'homme d'affaires canadien Jack Kachkar. "RLD" devrait désormais assurer l'avenir immédiat de l'OM mais, déterminé à abandonner, étudiera d'éventuelles nouvelles offres.
Voici les principales étapes de ce processus:

- Fin août 2006: par l'intermédiaire du cabinet d'avocats londonien Allen and Overy, Kachkar entre en contact avec "RLD".

- 20 décembre 2006: l'entourage direct de "RLD" confirme la piste Kachkar, tout en indiquant "se donner le temps d'y réfléchir".

- 8 janvier 2007: "RLD" laisse à Kachkar jusqu'à mi-janvier pour apporter les garanties bancaires.

- 16 janvier: Kachkar apporte ces garanties, à hauteur de 115 millions d'euros, rencontre à Paris le sénateur-maire de Marseille Jean-Claude Gaudin que lui présente Robert Louis-Dreyfus, puis le président de l'OM Pape Diouf dans la soirée, sur le tarmac de l'aéroport de Marignane (près de Marseille). Dans un communiqué, Kachkar explique que le football le "passionne" et que l'OM est un "club mythique".

- 18 janvier: première visite de Kachkar au siège du club et première conférence de presse où il annonce qu'il sera "plus actif" au quotidien que "RLD". Il fait part de son souhait de conserver et compléter le management en place.

- 26 janvier: Kachkar rencontre le comité d'entreprise du club, qui se range unanimement derrière son projet.

- 27 janvier: il assiste à son 1er match de l'OM en tant que candidat à la reprise du club, au Mans (défaite 2-0).

- 31 janvier: avant le match de coupe de France contre Lyon, Kachkar fait un tour d'honneur au Vélodrome, puis danse sur la table des vestiaires après la victoire.

- 26 février: un rendez-vous prévu entre Kachkar et RLD pour la signature par celui-ci de l'acte de vente est reporté, à la demande de Kachkar.

- 28 février: Kachkar apporte de nouvelles garanties financières

- Fin février: le quotidien Le Monde explique qu'une enquête sur le repreneur canadien conduite par la cellule de renseignement du ministère des Finances sur le blanchiment d'argent Tracfin pouvait être l'une des causes du retard pris dans la négociation. Tracfin, selon Le Monde, tentait notamment d'éclaircir ses liens avec des personnes ayant fait l'objet d'investigations financières pour des mouvements de fonds suspects.

- 1er mars: Kachkar annonce un "accord définitif de vente". Un porte-parole de Robert Louis-Dreyfus nuance aussitôt, en précisant que la vente du club de football ne sera finalisée "que lorsque M. Kachkar aura payé le prix convenu".

- 2 mars: un porte-parole de Kachkar indique que ce dernier et RLD sont "sur la même longueur d'ondes pour dire que l'opération sera considérée comme close et finalisée une fois que le transfert des titres aure été effectué contre le paiement final, dans les prochaines semaines".

- 12 mars: le comité d'entreprise de l'OM demande à l'homme d'affaires canadien des "éclaircissements" sur ses projets présumés de partenariat avec la société de droits sportifs Sportfive.

- 16 mars: Kachkar "rassure" le comité d'entreprise de l'OM, affirmant qu'il ne compte pas externaliser la régie publicitaire du club et qu'il s'active pour finaliser l'acquisition du club.

- 22 mars: Robert Louis-Dreyfus annonce qu'il a refusé un nouveau délai de paiement demandé par Jack Kachkar. Dans l'entourage du milliardaire suisse, on estime que la vente à l'homme d'affaires canadien est désormais "très fortement compromise".

- 23 mars: Malgré le refus d'un nouveau délai, Kachkar se dit toujours "très engagé dans le projet de rachat de l'OM". Mais de source proche du dossier, on confirme qu'il "n'y a quasiment plus aucune chance que la vente aboutisse".

- 29 mars: RLD annonce qu'il a mis un "terme définitif aux discussions avec Jack Kachkar relatives à la reprise de l'OM".