MONTRÉAL - Ce n'est pas un pari très risqué que d'affirmer que l'année 2011 a été marquée sous le sceau de la corruption dans le monde du foot international.

Bien que des scandales de matchs truqués et paris illégaux aient éclaté un peu partout, notamment en Italie, c'est surtout l'élection pour le poste de président de la FIFA qui a propulsé le dossier de la corruption à l'avant-scène.

Mohammed Ben Hammam, président de la confédération d'Asie qui avait obtenu de la FIFA l'organisation de la Coupe du monde de 2022 en décembre 2010, a commis le péché capital de se présenter comme candidat rival à Sepp Blatter.

Ce qui a amené le Suisse à l'écarter de manière plus ou moins élégante, en lui imposant une suspension à vie pour corruption. Une affaire de pots-de-vin impliquant des dirigeants du foot dans les Caraïbes est officiellement ce qui a entraîné la perte de Ben Hammam.

Suspendu en même temps dans cette affaire, Jack Warner, président de longue date de la CONCACAF, confédération qui regroupe les pays d'Amérique du nord et centrale et des Caraïbes, a remis sa démission en retour de la promesse qu'on abandonnerait l'enquête le visant.

Nouveau rebondissement le 5 décembre, alors que Joao Havelange, le président de la FIFA pendant que Blatter occupait le poste de secrétaire général, renonce à son poste au CIO. Le Brésilien s'est ainsi mis à l'abri d'accusations dans une affaire de pots-de-vin concernant la société de marketing ISL, ancienne partenaire de la FIFA.

Le prochain à écoper risque d'être Ricardo Teixeira, président de la Fédération brésilienne de foot et président du comité organisateur de la Coupe du monde de 2014 au Brésil. L'ancien gendre de Havelange aurait lui aussi été impliqué dans les combines d'ISL.

Et tout cela n'est sans doute que la pointe de l'iceberg. Le Montréalais Georges Schwartz, ancien analyste de foot à RDS, en sait quelque chose. Il a frayé pendant 11 ans dans les cercles de la FIFA, à titre de membre de différents comités, mais aussi comme membre du comité organisateur des Jeux olympiques de 1976 et président du comité de candidature du Canada en vue de la Coupe du monde de 1986.

Schwartz a été le témoin direct ou indirect de plusieurs gestes de corruption plus ou moins graves. Des délégués de la FIFA qui se font rembourser pour un billet d'avion de classe affaires alors qu'ils ont voyagé en classe économique, le Canada qui se fait inviter à présenter sa candidature pour le Mondial de 1986 alors qu'un proche de Havelange lui murmure — et pas en boutade — que c'est déjà dans la poche pour le Mexique...

« On commence par des petits gestes et de là, on va jusqu'à la corruption généralisée », affirme Schwartz, qui est d'avis que Ben Hammam et Warner n'auraient pas été sanctionnés si le premier n'avait pas présenté sa candidature à la présidence de la FIFA. Car avant cela ils étaient des alliés de Blatter.

« Quand Blatter s'est présenté au poste de président pour la première fois, en 1998, son élection n'était pas évidente, rappelle Schwartz. Jack Warner, qui lui a garanti toutes les voix de la CONCACAF, et Ben Hammam, qui portait les voix asiatiques, ont permis à Blatter de se faire élire. »

Blatter avait donc une dette morale à l'endroit des deux hommes. Plusieurs estiment que cela a culminé, dans le cas de Ben Hammam, par l'attribution du Mondial de 2022 au Qatar. Et selon Schwartz, Warner a eu tout le loisir de profiter d'un système laxiste instauré sous l'oeil aveugle de la FIFA.

Même s'il n'y a pas encore de preuves concrètes à l'appui, plusieurs soupçonnent fortement Blatter de ne pas être blanc comme neige. Mais d'après Schwartz, le président actuel de la FIFA n'en paiera pas le prix.

« J'ai l'impression que la justice suisse protège la FIFA et Blatter, avance-t-il. Blatter avait promis qu'il libérerait tous les documents qui étaient bloqués à la suite de la faillite d'ISL, et finalement la justice a répliqué en disant que ce n'est pas à Blatter de décider que ces documents-là seront rendus publics, c'est à elle... À la façon dont les choses se déroulent, ils pourraient être publiés seulement dans cinq ou six ans. Alors que dans trois ans et demi, au plus tard, Blatter ne sera plus président. »

Le directeur sportif du Bayern Munich, Karl-Heinz Rummenigge a d'ailleurs dit de Blatter, début décembre, que celui-ci « est comme une anguille que vous ne pouvez jamais vraiment attraper ».

Consécration du Barça

L'année 2011 aura par ailleurs été celle de la consécration du FC Barcelone. Le Barça a remporté la Ligue des champions, la Super Coupe d'Europe et la Coupe du monde des clubs, mais c'est surtout ses nombreux duels contre son plus grand rival, le Real Madrid, qui a frappé l'imagination.

Notamment, ces quatre clasicos en 17 jours du printemps dernier, en championnat d'Espagne, en Ligue des champions et à la Coupe du Roi. La domination des Messi et compagnie a provoqué une telle frustration chez les madrilènes qu'elle a amené José Mourinho à s'en prendre physiquement à Tito Vilanova, l'adjoint de Pep Guardiola, après la Super Coupe d'Espagne.

On peut sans hésiter comparer l'impact qu'a le Barça sur le football d'aujourd'hui à celui qu'a eu l'Ajax d'Amsterdam de Johan Cruyff, géniteur du football total, au début des années 1970.

Chez les femmes, la victoire surprise du Japon à la Coupe du monde disputée en Allemagne a été rafraîchissante puisqu'elle est venue bousculer l'équilibre des forces établi. D'autant que cette première victoire d'un pays asiatiaque n'est pas l'effet du hasard, mais bien d'un travail de développement entrepris il y a plus d'une décennie.