La commission d'éthique de la Fifa a absous mardi le président de la Fédération, Sepp Blatter, dans l'affaire de corruption ISL, sans parvenir à dissiper certaines zones d'ombre.

Non, selon la commission d'éthique, "le comportement du président Blatter ne peut aucunement être qualifié de mauvaise conduite à l'égard des règles d'éthique", même s'il "peut avoir été maladroit".

Rongée ces dernières années par de sombres histoires en tous genres, la Fifa a entrepris de régler ses affaires, à travers notamment la mise en place d'une nouvelle commission d'éthique en juillet dernier.

L'une de ses premières missions a été d'examiner du point de vue éthique l'épineux dossier ISL, cette entreprise de marketing sportif qui gérait les droits médias de la Fifa jusqu'à sa faillite en 2001.

Le dossier, sur le plan pénal, avait été classé par la justice suisse en 2010, même s'il démontrait que Joao Havelange, qui présidait la Fifa jusqu'en 1998 et Ricardo Teixeira, patron de la puissante fédération brésilienne jusqu'en 2012, avaient reçu de juteuses rétro-commissions d'ISL en échange des contrats passés pour la Coupe du monde.

Au final, la conclusion de la commission d'éthique est la même que celle du procureur du canton suisse de Zoug trois ans plus tôt: "l'affaire ISL est close".

Havelange, Teixeira et Leoz égratignés

Si le procureur avait dû tenir compte des lacunes du droit suisse en vigueur à l'époque, les présidents de la chambre d'instruction de cette commission, Michael Garcia, et de la chambre de jugement, Hans-Joackim Eckert, ont dû prendre en considération le fait que la Fifa n'avait aucun code d'éthique avant l'automne 2004.

La commission pointe bien "le comportement répréhensible" de Havelange, Teixeira et du Paraguayen Nicolas Leoz, le tout frais ex-président de la Confédération sud-américaine (Conmebol), qui ont clairement perçu des "montants considérables" à travers des sociétés écrans à titre de "pots-de-vins".

Mais elle note que l'acceptation de pots-de-vin n'était ni interdite par le droit pénal suisse, ni par un code d'éthique de la Fifa, et surtout que les trois Sud-Américains n'occupent plus aucun mandat à la Fifa.

À l'approche de la publication de ce rapport, Joao Havelange a démissionné de son poste de président d'honneur le 18 avril dernier, et Leoz, du comité exécutif le 24 avril.

"Toute démarche ou suggestion supplémentaire est donc superflue", conclut la commission, pour qui "des procédures supplémentaires relatives à l'affaire ISL ne sont justifiées contre aucun autre officiel du football".

"Point d'interrogation"

Cependant, elle laisse un point d'interrogation sur le degré de connaissance que Sepp Blatter, secrétaire général de la Fifa entre 1991 et 1998, avant d'en devenir président, pouvait avoir de ces pratiques.

"Une partie de l'affaire reste inexplicable", fait valoir la commission, qui n'a pu établir s'il y avait eu conflit d'intérêts autour d'une transaction de 2,5 millions de francs suisses, en avril 2004, dans le cadre du règlement de la faillite d'ISL .

"On peut raisonnablement juger plausible que les plus hauts officiels de la Fifa à l'époque aient été impliqués dans les négociations de cette transaction, d'autant que celle-ci permettait en quelque sorte de tirer un trait sur les transgressions de Teixeira et Havelange et, en fait, de tous les officiels du soccer, ces personnes étant tenues de rembourser les pots-de-vin qu'elles avaient perçus", souligne-t-elle.

Mais là encore, c'était avant la mise en place du code d'éthique. "Il n'y a donc officiellement aucune violation qui puisse faire l'objet de poursuite", selon la commission.

Sepp Blatter a aussitôt fait part de sa "satisfaction" d'être ainsi dédouané: "Je suis convaincu que la Fifa, grâce au processus de réforme de sa gouvernance, que j'ai moi-même proposé, dispose désormais de mécanismes et outils adéquats qui aideront à éviter qu'un tel cas, qui a tant terni l'image de notre institution, ne se reproduise".