PARIS (AFP) - "Zidane nous ressemble": dans les cités et un peu partout en France, les gens pardonnaient lundi à leur héros national son coup de tête lors de la finale du Mondial-2006 de soccer mais réclamaient malgré tout une explication.

"La première chose que l'on s'est dite, c'est que Zidane nous ressemble, c'est un mec de quartier qui démarre au quart de tour. C'est un coup de sang qui renvoie à son histoire, à sa jeunesse dans une cité".

Par ces mots, Samir, membre de l'association de Dammarie-lès-Lys "Bouge qui bouge" en grande banlieue parisienne, résume l'état d'esprit qui règne dans plusieurs cités après la défaite de la France battue en finale du Mondial 2006 de football face à l'Italie (1-1, 5 t.a.b. à 3).

Mais le désormais tristement célèbre coup de tête de Zizou en pleine poitrine de l'Italien Marco Materazzi, fait craindre en même temps des mauvaises répercussions dans ces quartiers sensibles, dont Zidane est lui-même issu.

"Zidane a répondu à une provocation qui peut inciter à faire un mauvais geste, on essaie de souligner auprès de jeunes qu'aucun mot ne mérite un tel geste", fait valoir dans la région marseillaise (sud-est) Youcef Moussaoui, éducateur sportif en stage avec des adolescents de 14 à 17 ans.

"Geste impardonnable"

"On a vu dès ce matin des jeunes s'amuser à faire ce geste-là, ça va très très vite", déplore M. Moussaoui. "La moindre des choses, estime-t-il, serait que Zidane s'excuse publiquement pour ce geste qui reste impardonnable", sinon, "c'est le geste qui va rester".

Samir est moins alarmiste: "Est-ce que cet événement peut porter préjudice aux banlieues?" Non, répond-il, "c'est du football !"

"Est-ce que ça porte préjudice aux bons Français quand tel ou tel chanteur raconte n'importe quoi? Les grands joueurs sont issus de banlieues, de favelas, où ils ont parfois dû se battre pour se faire respecter", insiste le jeune homme, reconnaissant comme les autres que "c'est un geste inexcusable", mais qu'"il ne faut pas oublier le racisme des Italiens".

Au centre social de Belsunce, quartier défavorisé de Marseille, Annick Marondo, responsable du secteur "enfance", attend aussi une explication: "Il serait intelligent que Zidane prenne la parole pour expliquer son geste et pour le condamner lui-même. Tout le monde a besoin de savoir !".

"Il arrête sa carrière sur une fausse note, j'espère qu'il va donner une explication valable, ce serait le minimum", renchérit Philippe Schaefer de l'association pour l'animation du Neuhof (APAN), dans une des cités de Strasbourg (est).

"Comme tout le monde"

Pour Moussa Becherif, membre de l'association d'insertion dans la banlieue Toulousaine (sud-ouest), le coup de tête de Zidane est certes "triste", mais il "ne va pas changer l'image que les jeunes ont de lui".

Il est juste "un peu plus humain, il est comme tout le monde", dit-il.

Abdellatif Mellouki, vice-président du Conseil régional du culte musulman (CRCM) de la région Midi-Pyrénées, reconnaît que l'on "ne peut pas attendre cela d'un grand joueur", "mais on ne peut pas résumer une carrière sur ce coup de tête, Zidane restera un exemple" pour les jeunes.

A Vaux-en-Velin dans la banlieue de Lyon (centre-est), un centre de loisirs a lancé le débat avec les jeunes, explique la directrice du centre, Zohra Kellas.

"Nous encadrons tout au long de l'année des équipes de foot, nous ne tolérons aucun geste de violence. On a tous été un peu surpris par son geste, que l'on ne peut cautionner, mais tout le monde fait des bêtises et c'est de cela que nous allons débattre avec les enfants", a-t-elle souligné.