BERLIN (AFP) - Livrer son tout dernier match de footballeur lors d'une finale de Coupe du monde: l'étoile Zinédine Zidane, 34 ans, ne pouvait rêver sortie plus sublime en conclusion d'une somptueuse carrière dont le sommet fut précisément une autre finale, celle du Mondial-98.

Un dernier combat pour résumer tous les autres. En un mois en Allemagne, Zidane aura revisité les plus belles pages de sa vie de footballeur.

Il aura mis en vacances la prétentieuse Espagne, son pays d'adoption depuis 2001, qui voulait le mettre en retraite. Il aura ébloui une dernière fois le monde par une prestation magique face au Brésil, pays aux "cinq étoiles" qui lui doit ses deux dernières défaites en Coupe du monde. Il aura réussi un penalty décisif contre le Portugal, comme il y a six ans lors de l'Euro-2000 où il avait alors livré son match le plus complet.

Et le voilà, pour ses 90 dernières minutes, face à cette Italie où, sous le maillot de la Juventus, il s'est fait un nom hors de France. "J'ai passé là-bas un palier que je n'aurais jamais franchi ailleurs", avait-il avoué en avril 2005 à L'Equipe magazine.

Pour une finale en guise d'épilogue, un moment dont rêvent tant de joueurs et que lui aura vécu deux fois.

Pari fou

Le 12 juillet 1998, Zidane, en propulsant la France vers son premier titre de championne du monde, était définitivement entré dans la catégorie de ceux qui font basculer les grands matches. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si c'est cette année-là qu'il a remporté son seul Ballon d'or.

Quelle que soit l'issue de sa seconde finale, dimanche, il dira adieu au ballon en ayant réussi un pari fou: faire revivre à la France entière les frissons de 1998 en chassant ceux de 2002.

Ce tour de force illustre la force de caractère et la détermination d'un joueur à qui il fut souvent reproché de ne pas être hors du terrain le leader qu'il était dans le jeu. Depuis son retour en sélection, à l'été 2005, même cela aura changé. La dernière touche au portrait d'un joueur hors normes.

Rien ne semblait pourtant prédestiner le timide "Yazid", né d'un père kabyle dans les quartiers nord de Marseille, à un tel destin. S'il manie bien la balle, il n'a pas tout à fait le physique à la hauteur. Son éternel point faible, a-t-il parfois reconnu, d'autant qu'une thalassémie bénigne, une maladie génétique, le fatigue naturellement.

Mais plusieurs hommes vont croire en lui et accompagner son éclosion. Jean Varraud, son "père spirituel", qui le fait venir au centre de formation de Cannes, où il découvre la 1re division à 16 ans, en 1989. Rolland Courbis, son entraîneur à Bordeaux, qui le fait grandir tranquillement.

Aimé Jacquet, ensuite, qui lui offre sa première sélection - et quelle sélection!, avec deux buts face à la République tchèque à Bordeaux le 17 août 1994 - et décide de reconstruire les Bleus autour de lui. A l'Euro-96, Zidane est déjà le meneur de jeu alors que Cantona reste à la maison.

Zidane rejoint la Juventus Turin juste après cet Euro, quelques semaines après avoir disputé - et perdu - la finale de la Coupe de l'UEFA avec les Girondins aux côtés de ses amis Dugarry et Lizarazu.

La "Juve" découvre un joueur de classe mais Zidane reste encore un magnifique perdant, battu en finale de Ligue des champions en 1997 et en 1998.

La finale du Mondial-98 va tout changer. Sous ce maillot de l'équipe de France où il confesse avoir vécu ses plus beaux moments, le N.10 marque deux fois en première période. Un million de personnes scandent "Zizou, président!" sur les Champs-Elysées et le visage de Zidane devient un emblème, pour la ville de Marseille comme pour une France qui se voit multiculturelle.

Zidane est devenu "Zizou" pour toujours: un symbole pour les politiques, un Français idéal pour les sondages, une icône pour les publicitaires qui raffolent de son image de bon père de famille et de ses yeux clairs.

A l'Euro-2000, le joueur atteint sa plénitude technique et l'équipe de France remporte son deuxième trophée en deux ans.

"Transmettre"

Mais Zidane ne connaît pas la même réussite à la Juventus, qui le laisse filer vers le Real Madrid en 2001 pour le plus gros transfert de l'histoire du football: 75 millions d'euros!

Madrid l'adopte et Zidane, dès la première saison, peut enfin brandir la "coupe aux grandes oreilles" en réussissant une reprise de volée d'anthologie à Glasgow face au Bayer Leverkusen, en mai 2002. Quelques jours plus tard, il rejoint les Bleus en Asie pour le Mondial et la France ne voit pas comment, avec un tel "Zizou", elle peut ne pas doubler la mise.

Et pourtant. Zidane se blesse à la cuisse gauche lors du dernier match de préparation et manque le début du tournoi. La France, victime de sa "Zidane dépendance", joue à l'envers et le retour du maître contre le Danemark n'empêche pas le désastre.

Ce fiasco de 2002 laissera longtemps des marques chez "ZZ", qui, après un Euro-2004 sans flamme et l'arrivée d'un encadrement renouvelé sous l'impulsion de Raymond Domenech, dit adieu aux Bleus pour se consacrer au Real Madrid.

En Espagne, où il est orphelin de Makelele, il ne prend toutefois plus de plaisir dans un club égaré dans sa politique "galactique" et voit les Bleus menacés de rater le Mondial. Alors Zidane, à l'été 2005, revient tel Zorro avec "Make" et Thuram pour finir une histoire et peut-être répondre à ce voeu d'Aimé Jacquet qui lui demande de "transmettre" avant de partir.

Le pari est osé, mais, comme guidé par une force mystique, il y croit: non seulement il qualifie les Bleus, mais il décide, quelques semaines avant le tournoi, de faire du Mondial sa tournée d'adieux.

C'était risqué. Il a notamment tremblé dans le vestiaire de Cologne quand, suspendu pour le match décisif de poules contre le Togo, il a failli vivre une sortie indigne de lui et de sa carrière.

Mais c'est finalement, sur le terrain, aux yeux de la planète entière, mais pas ceux de son maître, Jean Varraud, décédé le 24 juin, que Zidane va en finir avec le football. Le football, lui, n'en aura pas fini avec "Zizou", dont le nom appartient désormais pour toujours à l'histoire du jeu.

Zinédine Zidane en bref

Nom: Zidane
Prénom: Zinédine
Date de naissance: 23 juin 1972
Lieu de naissance: Marseille
Nationalité: française
Taille: 1,85 m
Poids: 78 kg

Sport/poste: Football/milieu de terrain

Clubs successifs: Cannes (1988-1992), Bordeaux (1992-1996), Juventus Turin (ITA/1996-2001), Real Madrid (ESP/2001-2006)
1er match en 1re division: 20/05/1989, Nantes-Cannes (1-1)
506 matches de championnat, 95 buts
108 matches de coupes d'Europe (82 en C1, 26 en C3), 18 buts

Equipe de France:
Sélections: 107 (100 fois titulaire, 7 fois remplaçant, 25 fois capitaine)
Buts en sélection: 30
1re sélection: 17/08/1994, France-République tchèque (2-2)
1er but en sélection: 17/08/1994, France-République tchèque (2-2)
Dernière sélection: 05/07/2006, Portugal-France (0-1)
Dernier but en sélection: 05/07/2006, Portugal-France (0-1)

Palmarès:
Coupe du monde 1998
Euro-2000
Ligue des champions 2002
Coupe intercontinentale 1996, 2002
Supercoupe d'Europe 1996, 2002
Championnat d'Italie 1997, 1998
Supercoupe d'Italie 1997
Championnat d'Espagne 2003
Supercoupe d'Espagne 2001, 2003

Palmarès individuel:
Ballon d'Or 1998
Meilleur joueur mondial Fifa 1998, 2000, 2003
Meilleur joueur UEFA 2002