(Collaboration - François Parenteau) - Selon le Centre d'intégration à la vie active pour les personnes ayant un handicap physique, l'activité physique est l'un des éléments-clés du développement de l'autonomie et d'une vie en santé. Mais quoi faire quand les installations sportives ne sont pas adéquates pour la clientèle handicapée?

« Les installations sportives québécoises pour les personnes handicapées sont désuètes et pas très accessibles », déclare Bruno Haché, joueur de goalball vivant avec un handicap visuel. « Pour les handicapés visuels, le manque de points de repère est préoccupant. »

M. Haché donne l'exemple des douches. « Il est très rare qu'on y retrouve des murs de séparation. On n'est tout de même pas pour s'accrocher aux autres personnes pour s'orienter », ironise-t-il.

Ce constat de désuétude et d'inaccessibilité s'applique également aux installations desservant des sports pratiqués par des gens vivant d'autres handicaps. « Il y a peu d'installations sportives, et les bâtiments n'ont pas été construits selon les codes de l'accessibilité universelle », explique Maxime Gagnon, gestionnaire des opérations pour le Défi sportif.

« La plupart des installations ont été construites durant les années 70 et n'ont pas du tout été conçues en fonction de l'accessibilité aux personnes handicapées », dit M. Gagnon. « Le réflexe de rendre les installations plus accessibles lors des rénovations des bâtiments n'est pas automatique. »

José Malo, directrice générale de l'Association québécoise des sports en fauteuil roulant, déplore le fait que le code du bâtiment n'inclut pas la notion d'accessibilité universelle. « Les règles ne sont pas assez strictes pour permettre une participation physique adéquate des personnes handicapées », souligne-t-elle. « C'est bien beau de pouvoir entrer à l'intérieur de l'aréna, mais si l'accès à la patinoire n'est pas facilité, si les dimensions des portes de chambres de joueurs et des salles de bains ne sont pas modifiées, les gens ne sont pas plus avancés. »

Jean Labonté, joueur de hockey sur luge, connaît bien la situation des arénas. « À ma connaissance, aucun aréna au Québec n'est complètement adapté pour le hockey sur luge. Beaucoup le sont pour l'accès aux fauteuils roulants, mais pour ce qui est de l'adaptation de la patinoire pour le sport lui-même, aucun ne l'est. » M. Labonté déplore le fait que les arénas ne soient pas accessibles en entier. « Un aréna a été construit près de chez moi récemment. Malheureusement, l'accès aux fauteuils roulants a été permis seulement pour les estrades, pas pour les chambres des joueurs ni pour la glace. »

Malgré ce constat peu reluisant, certains complexes sportifs offrent un niveau d'accessibilité plus élevé. Hélène Simard, joueuse de tennis en fauteuil roulant, juge le stade de tennis intérieur du parc Jarry, à Montréal, exemplaire. « Comparativement à d'autres stades que j'ai expérimentés partout dans le monde, celui-ci se démarque de belle façon. Presque tout est parfaitement adapté : l'entrée principale, l'accès aux douches et aux terrains… En fait, il ne manque que des stationnements intérieurs pour faciliter l'accès durant l'hiver », note-t-elle.

Selon Nathalie Chartrand, directrice générale de l'Association sportive des aveugles du Québec, plusieurs installations sportives ont subi quelques petites modifications, mais il y a encore de gros changements à effectuer. « Par exemple, la piscine olympique n'offre aucun trottoir pour se rendre à l'entrée principale. Une personne aveugle utilisant une canne blanche se perd donc facilement pour s'y rendre. Tellement l'espace est grand, si la personne s'approche trop du stade, elle se prend la structure qui sort du bâtiment en pleine figure, de quoi décourager le plus convaincu des athlètes à l'entraînement », explique-t-elle.

En 2001, les données de l'Enquête sur la participation et les limitations d'activités démontraient qu'environ 6 % des personnes handicapées ont déclaré avoir de la difficulté à participer à des activités de loisir, en raison de la conception et de l'aménagement des immeubles et des lieux dans leur communauté. Ce pourcentage représentait alors environ 30 000 personnes au Québec.

Depuis l'été 2006, un programme d'aide financière soutient les installations sportives et récréatives pour parer cette problématique. Administré par le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, il dispose d'un budget annuel de 24 millions de dollars.

« Le Centre Pierre-Charbonneau fait partie des complexes sportifs qui ont bénéficié de ce programme », dit M. Gagnon. « L'entrée principale a été refaite en un seul palier, dans l'optique d'une accessibilité universelle. Dorénavant, comme il n'y a plus de marches, tout le monde peut passer facilement au même endroit, et ce, sans discrimination. »

Ces changements sont de bon augure pour Mme Chartrand. « Une partie de notre rôle est de faire la promotion de l'activité physique auprès des personnes handicapées. Or, souvent, les gens arrêtaient et préféraient faire autre chose, tellement les installations étaient peu adéquates », dénonce-t-elle.

Bien que le réflexe de l'accessibilité universelle soit de plus en plus présent, il n'est pas toujours appliqué. « Des gymnases possèdent un revêtement de sol synthétique, ce qui, en raison du caoutchouc, empêche les gens en fauteuil roulant de profiter des installations sportives. L'idéal est un plancher en bois franc, mais comme les coûts sont plus élevés, lors des rénovations, ce n'est pas toujours le revêtement utilisé », déplore Mme Malo.

M. Haché et son équipe de goalball ont dû changer de gymnases pour leurs entraînements à la suite de rénovations. « Le centre sportif où nous nous entraînions n'était pas très grand. Pour une raison inexpliquée, des rénovations ont été effectuées dans le but d'enlever les tapis qui recouvraient les murs. À la suite de cela, l'écho est devenu infernal à l'intérieur du gymnase, si bien qu'on a dû déménager nos activités. En raison de la hausse du bruit, notre oreille ne nous permettait plus de bien nous orienter », raconte-t-il.

Même si la situation des installations sportives pour les personnes handicapées n'est pas excellente au Québec, elle n'est pas plus rose ailleurs au pays. « En ce moment, les installations de la Colombie-Britannique profitent beaucoup de la prochaine tenue de Jeux olympiques à Vancouver en 2010. Beaucoup d'argent est investi. Par contre, la situation d'autres provinces, l'Ontario par exemple, est très similaire à celle du Québec. Mais comme chaque province se développe de façon différente, les comparatifs sont quasi impossibles », juge Mme Malo.

« Il faut comprendre que les personnes handicapées ne sont pas exclues de la réalité sportive quotidienne au Québec, explique Mme Malo. Il n'y a pas assez d'installations sportives, et ce, peu importe si l'on est handicapé ou non. La situation est cependant empirée pour les personnes handicapées quand les installations existantes ne leur sont pas accessibles. »

*Pour commentaires ou suggestions, vous pouvez contacter M. Parenteau à cette adresse : francoisparenteau@live.ca