LAUSANNE - La Fédération internationale de l'industrie du médicament (FIIM), qui regroupe les grands groupes pharmaceutiques, a signé mardi avec l'Agence mondiale antidopage (AMA) un accord de coopération, destiné à rattraper plus facilement les tricheurs pensant avoir une molécule d'avance.

"Ce n'est pas un traitement mais c'est une flèche de plus à notre arc", a estimé David Howman, le directeur général de l'AMA.

Après Interpol l'an dernier, l'Agence s'est trouvée un nouveau partenaire clé dans la lutte antidopage avec les poids lourds de l'industrie pharmaceutique via la FIIM, la principale association professionnelle du secteur qui compte parmi ses membres Bayer, GlaxoSmithKline, Bristol-Myers Squibb, Novartis, Sanofi-Aventis, Pfizer, Roche ou encore Merck.

"Les médicaments, c'est la base essentielle du dopage dans le sport", a rappelé Olivier Rabin, le directeur scientifique de l'AMA. "On sait malheureusement que les athlètes sont très attirés par les médicaments en développement parce qu'ils pensent qu'ils ne sont pas détectables."

Sous cette "Déclaration commune de collaboration" signée mardi, repose la volonté d'identifier toute substance ayant un potentiel dopant avant sa mise sur le marché et de permettre ainsi la mise au point de méthodes de détection par les laboratoires antidopage en amont.

"Mais l'intérêt de cet accord est aussi de sensibiliser l'industrie pharmaceutique au fait que leurs substances puissent être mal utilisées par des athlètes à des fins d'amélioration de la performance. Nous avons des cas concrets de détournement de ces médicaments bien avant leur mise sur le marché", a ajouté Olivier Rabin.

"En tant qu'industrie, nous prônons un usage des médicaments fait dans l'éthique et la transparence, et le dopage est vraiment en totale contradiction avec cela", a insisté Haruo Naito, président de la FIIM et PDG du groupe japonais Eisai.

Si les instances antidopage ont pu dans le passé bénéficier de manière ponctuelle de la collaboration de tel ou tel fabricant comme AmGen lors des JO de 2002, elles se sont le plus souvent heurtées à des refus.

L'affaire du Cera, cette EPO de troisième génération qui fut utilisée par des coureurs sur le Tour de France 2008 et des athlètes aux Jeux de Pékin, a contribué à l'évolution des mentalités.

Le groupe suisse Roche, alerté sur la possibilité de fuites par l'AMA dès les essais cliniques en 2004, avait pris le parti de fournir la molécule et un test médical. Des clés précieuses pour les laboratoires antidopage qui avaient ainsi pu anticiper son apparition dans la panoplie de produits dopants.

"au cas par cas"

"Cette exemple a montré qu'une telle collaboration pouvait peut-être fonctionner dans l'intérêt commun", a souligné Yves Juillet, un des conseillers de la FIIM. "Dans le comité que je préside, un représentant de Roche a travaillé avec nous, et cela nous a aidé à élaborer l'accord d'aujourd'hui, qui se base en fait sur des aspects pratiques et non simplement de la théorie", a-t-il expliqué.

Cette Déclaration de collaboration devrait faciliter tout nouveau partenariat, qui se fera comme le précise le texte "au cas par cas" sur "une base volontaire" et sera assorti d'accords de confidentialité.

Prudence oblige, l'Agence mondiale antidopage reste discrète sur ses champs d'action, même si elle ne cache pas son intérêt particulier pour les différentes formes d'EPO, qui favorisent l'endurance, et les SARMS, ces modulateurs de récepteurs aux androgènes qui permettent de décupler la force musculaire. "Nous avons signé déjà plusieurs accords, mais plusieurs encore sont dans les tuyaux", a simplement dit David Howman.