PARIS - Loïck Peyron (Gitana Eighty), l'un des grands animateurs du premier mois du Vendée Globe, a démâté mercredi dans le sud de l'Océan indien, laissant la course autour du monde en solitaire orpheline de l'un de ses principaux favoris.

"J'étais à l'intérieur quand j'ai entendu un énorme bruit. Je suis sorti immédiatement, tout était un peu écroulé, le mât en plusieurs parties, la bôme sur le pont, toutes les voiles dans l'eau", a raconté Peyron, après avoir assuré qu'il était indemne.

Au moment de l'accident, Gitana Eighty occupait la troisième position. Mais Peyron avait impressionné ses adversaires depuis le départ, monopolisant la tête de la course presque pendant 16 jours consécutifs durant toute la descente de l'Atlantique.

Six skippeurs, sur les trente engagés, avaient déjà abandonné depuis le départ le 9 novembre, dont trois sur démâtage. Mais le Baulois, qui avait fêté ses 49 ans le 1er décembre, est le premier des grands favoris éliminés de ce Vendée Globe sans précédent, où plus d'une douzaine de coureurs sont encore groupés et en position de gagner après un mois de mer.

Sur le moment, Peyron ne s'expliquait pas son démâtage, survenu dans environ 30 noeuds (55 km/h) de vent, avec une surface de toile tout à fait adaptée aux conditions.

Tout juste pouvait-il rappeler que Gitana Eighty, comme les autres bateaux, avait souffert dans la tempête des premiers jours dans le Golfe de Gascogne. Là où les trois premiers démâtages se sont produits.

Marie-Kerguelen

Lors de son contact radio avec l'organisation, quelques heures seulement après son abandon, Peyron le beau parleur choisissait des mots très sobres pour dire sa déception: "C'est tout simple, c'est rapide. Ca fait un peu mal (...) mais bon, il y a plus malheureux que moi".

Et puis, tout de suite, une pensée pour son équipe à terre, ses proches et son mécène, le groupe LCF Rothschild: "En général, on pense beaucoup plus fort à ceux grâce à qui on est sur l'eau quand on a un problème que quand tout va bien. Je pense à tout le monde en ce moment".

Peyron possède le plus beau palmarès de la voile française, mais n'a jamais gagné le Vendée Globe. Avant le départ aux Sables d'Olonne, quand on lui rappelait qu'il venait de remporter les quatre dernières courses auxquelles il avait pris part, il relativisait: "Il faut se dire qu'une victoire c'est toujours totalement aléatoire et extrêmement exceptionnel, surtout sur un Vendée Globe. Finir une course comme celle-là c'est déjà exceptionnel".

Mercredi soir, Peyron s'efforçait de bricoler un gréement de fortune, mais n'avait pas encore décidé de la route qu'il prendrait pour regagner la terre. La solution la plus simple lui semblait de piquer plein nord, soit vers l'Afrique du sud soit vers Madagascar, à 1.600 milles (2950 km) devant lui. Pour se rapprocher d'un port et ensuite solliciter un remorquage.

Peyron le sentimental s'est dit déçu, aussi, de ne pas avoir atteint les îles Kerguelen, vers lesquelles les leaders continuent de faire voile. Lors du premier Vendée Globe, en 1989, sa fille est née alors qu'il passait au large de ces îlots désertiques. Elle se prénomme Marie-Kerguelen.