Pendant 10 ans, Roland Mailhot a savouré ses rencontres avec Yves Létourneau
Sports divers mercredi, 27 mai 2020. 19:25 dimanche, 15 déc. 2024. 03:28MONTRÉAL - Roland Mailhot n'avait pas eu de nouvelles de Yves Létourneau depuis environ 15 ans quand il a croisé son épouse au hasard lors d'une fête publique à Saint-Lambert en 2009. Cette rencontre fortuite a été le point de départ de retrouvailles et d'une touchante relation d'amitié qui a duré plus de dix ans entre Mailhot et son ancien collègue à CKAC.
Mailhot a relaté l'anecdote un peu moins de 24 heures après l'annonce du décès de M. Létourneau de causes naturelles, à l'âge de 94 ans, mardi au CHSLD Marcelle-Ferron à Brossard.
« J'ai parlé à Paulette et je lui ai dit si jamais, Yves, ça lui tente, j'aimerais qu'on aille dîner ensemble. De là a commencé notre série de rencontres hebdomadaires. C'était le vendredi midi, j'allais le chercher chez lui à Saint-Lambert tous les vendredis, ou presque. On se choisissait un endroit à Saint-Lambert, on allait manger, on se tirait la pipe, un peu; 'c'est à mon tour à payer, non c'est à ton tour' », relate-t-il en ricanant.
Lors de ces dîners, M. Létourneau passait rarement inaperçu auprès d'autres clients qui pouvaient se souvenir, par exemple, de la joie qu'il leur avait probablement apportée grâce à ses rôles dans des émissions pour enfants, ou, peut-être, de ses percutants commentaires qu'il avait l'habitude d'émettre à la radio de CKAC à titre de journaliste sportif.
« Les gens le reconnaissaient dans le resto, ils venaient le voir, ils étaient un peu gênés, mais ils avaient tellement un bon souvenir de lui que plusieurs personnes osaient s'approcher de lui pour le saluer: 'M. Létourneau, je vous ai tellement aimé à la télévision' et dire autres choses du genre. Yves prenait ça avec beaucoup d'humilité. Yves était très mal à l'aise avec ces choses-là », confie Mailhot.
Ce dernier enchaîne avec une anecdote qui a l'heure de surprendre quand on sait à quel point M. Létourneau a été un géant non pas dans un domaine - celui du journalisme sportif - mais aussi celui du niveau des arts et de la culture.
« Quand il était à Marcelle-Ferron, je pouvais dire à Yves, 'J'ai parlé à Réjean Tremblay, j'ai parlé à Bernard Brisset, j'ai parlé à Richard Morency - qui a été notre patron - et ils veulent que je te salue'. Et il me disait, 'Je suis tellement ému de savoir que ces gens-là se souviennent de moi.' »
« C'était quelque chose », ne peut s'empêcher d'ajouter Mailhot, qui a toujours été fasciné par la grande culture de M. Létourneau.
Sur le plan professionnel, Mailhot a vécu auprès de M. Létourneau ce qu'il considère être un moment significatif dans sa carrière. C'est arrivé peu de temps après son transfert à CKAC, en janvier 1979, après près de cinq ans passés à la station affiliée de Télémédia à Hull.
« Au printemps ou au début de l'été de 1979, je ne me souviens pas de la date, ç'a été le premier marathon de Montréal. C'étaient Yves et moi qui allions assumer la couverture du marathon à CKAC. J'ai eu à travailler vraiment étroitement avec lui et une partie de moi a beaucoup grandi cette fin de semaine-là », a avoué M. Mailhot, qui considère M. Létourneau comme un mentor.
« Par sa générosité, par le fait qu'il était ouvert à tout ce que je faisais et qu'il me donnait champ libre, j'ai appris que je pouvais m'imposer moi aussi, ajoute-t-il. Que je pouvais être ce que j'étais à Hull même si j'étais à Montréal et même si je côtoyais des gens comme Yves Létourneau. »
C'est en soirée, mardi, alors que Mailhot se rendait voir sa mère, qu'il a appris la nouvelle du décès de M. Létourneau, dont l'état de santé s'était détérioré dans la nuit de dimanche à lundi, selon ce qu'a confié son grand ami.
Leur dernière rencontre remonte au vendredi 6 mars, soit environ une semaine avant que la pandémie n'entraîne la fin des visites dans les centres de soins de longue durée et résidences pour aînés du Québec.
« Yves, c'était un homme de conviction, un homme de passion et quelqu'un d'absolument spécial. De mener une seule carrière de front, et de la mener avec brio, c'est déjà beaucoup. Mais lui, il en menait deux de front."
« Hier, je me posais la question: est-ce que je connais beaucoup de gens qui ont mené une double carrière comme ça, non seulement mener une double carrière, mais être top dans ces deux carrières? Il ne me vient pas de noms pour l'instant. Ça va peut-être venir plus tard cette semaine, mais il ne m'en vient pas. »