Félix Auger-Aliassime s'est avoué vaincu en demie du tournoi de Queen's aujourd'hui mais pour un début chez les pros sur herbe, c'est déjà extraordinaire d'avoir livré la marchandise pendant deux semaines consécutives.

 

J'ai toujours cru que notre Québécois serait encore meilleur sur surfaces rapides d'abord parce qu'il possède un sens inné de la créativité au filet avec la bonne technique pour chaque geste, un jeu de jambes trépidant avec une plus-value côté légèreté et surtout un service de feu!

 

Dès ses premiers pas à Stuttgart, j'aime son attitude d'attaquant qui, à la moindre occasion, part en mission vers l'avant, défiant et bluffant même l'adversaire. Cela s'avère extrêmement payant pour disposer du gros serveur Ernests Gulbis, du très régulier Gilles Simon et du spectaculaire volleyeur Dustin Brown en trois bris d'égalité. Ce dernier match nous rappelle que l'élément « chance » sur herbe est plus grand que sur les autres surfaces puisque les rebonds sont inégaux et le tapis gazonné souvent tellement glissant. D'ailleurs, sur balle de match en faveur de Brown, Félix peut vraiment remercier sa bonne étoile puisque l'Allemand y va d'un enchaînement service volée. Le retour de Félix est haut et s'en va fort probablement à l'extérieur. Le réflexe de Dustin est de laisser aller la balle, mais comme elle est haute, lente et facile, il change d'idée et décide de la jouer pour garder le contrôle de la situation. En soit, c'est la bonne décision, mais dans les faits, agir légèrement sur le tard, c'est dangereux sur herbe. Comme de fait, en faisant le geste vers la balle, son pied se dérobe un tantinet soit peu, juste assez pour perdre le contrôle de la volée haute. Brown vient de gaffer et il est tellement démoralisé que Félix se balade pour aller chercher le bris d'égalité de la 3e manche 7-2.

 

En finale devant l'Italien Matteo Berrettini, Auger-Aliassime part un peu la machine sur le tard, ce qui lui coûte le premier set. Même si Milos Raonic ne se présente pas pour défier Félix en demie, la semaine a quand même été longue et difficile. Combien de fois FAA se retrouve les quatre fers en l'air à la suite de longues courses. Croyez-moi, cela finit par vous user royalement. D'ailleurs, ça paraît en finale. C'est facile à voir lorsque le kid est fatigué car il devient impatient et surtout énervé par plein de petites choses dont les mauvais rebonds et les puissants services de Matteo qui lui coupent son rythme en retours. Par contre, on sait bien qu'un gagnant se bat en tout temps et comme Félix est né pour triompher, il se démène comme un forcené pour s'offrir plusieurs balles de deuxième manche. Il ne lui manque que quelques petits rien pour faire basculer la rencontre mais il peut être fier d'avoir tout essayé pour aller chercher le titre en série 250.

 

Rapidement, allez hop, on fait ses valises pour se retrouver à West Kensington, là où se joue depuis 1890 le championnat de Londres, disputé au Queen's club. Pour y avoir été membre un été il y a de cela des lunes, c'est un des plus beaux clubs du monde après, bien sûr, le All England à Wimbledon et le Monte Carlo Country Club. Les terrains du Queen's ont toujours eu la réputation d'être aussi beaux ou presque que ceux de Wimbledon. L'intérieur du Queen's club nous rappelle l'histoire du jeu avec des terrains intérieurs d'origine avec des murs et plafonds ornés de boiseries, des salles de réception d'un chic absolu et des rangées de terrains extérieurs en gazon, bichonnés à l'année par des maîtres en la matière. C'est dans ce décor mirifique, bourré de l'histoire du jeu de paume, que Félix Auger-Aliassime continue de se faire un nom. Ce tournoi de la série 500 commence sur les chapeaux de roues pour le jeune de 18 ans puisqu'il dispose en rafale de Grigor Dimitrov, Nick Kyrgios et la première tête de série Stefanos Tsitsipas qui sera d'ailleurs 5e mondial lundi. Pas mal hein? Surtout contre le piégeux Australien Kyrgios qui a tout fait pour déstabiliser notre étoile montante. Honnêtement, mais quel être narcissique ce pauvre Nick. Bravo à Félix qui reste d'un calme olympien jusqu'à la toute fin. Quelle sagesse aussi de ne pas démontrer trop de joie lorsque la victoire est acquise. De cette manière, il s'assure de ne pas s'en faire un ennemi et de toute façon c'est tout à son honneur de donner une touche de dignité au triomphe. Il est intelligent et sage le kid de 18 ans...

 

Dommage cependant en demie aujourd'hui devant Feliciano Lopez qu'il ne remporte pas le match. Oui « Deliciano » est majestueux au service et sait jouer sur herbe mais ce match et une potentielle place en finale s'offraient tellement à Félix! FAA gagne le premier set au bris d'égalité et début de deuxième, s'offre des balles de bris pour prendre le contrôle du match. L'Espagnol de 37 ans est à ce moment-là essoufflé. Malheureusement Félix devient nerveux et n'arrive pas à en profiter. Même chose au début du troisième set. Félix s'offrira huit balles de bris dans le match sans en convertir une seule! Triste constat tout comme le fait qu'à partir du milieu du deuxième set, notre Québécois ne monte plus au filet, ne défie plus Lopez dans l'échange comme s'il craignait les passings de l'Espagnol. Bien sûr, jouer deux semaines de suite sur herbe ça finit par vous ramollir les jambes… et le cerveau... 

 

C'est certain que cette défaite fait mal parce que le match appartenait à Félix mais en même temps, en deux semaines, il va chercher une tonne de repères sur herbe en disputant huit rencontres de très haut niveau avec au compteur six victoires. D'ailleurs, saviez-vous qu'Auger-Aliassime est 10e au classement de la course? Pas pire comme année n'est-ce pas? Vivement Wimbledon maintenant!!!