PARIS - Si une finale serbo-russe était quasi-inévitable cette année à Roland-Garros, les deux protagonistes du dernier match de la quinzaine féminine ne sont pas forcément celles que Paris attendait.

Ana Ivanovic avait déjà joué ce dernier acte l'an dernier sans crever l'écran, n'arrachant que trois jeux à Justine Henin. La revanche qu'elle vise samedi sur le court Philippe-Chatrier est aussi une revanche sur elle-même.

La jeune Serbe doit en outre confirmer le rang de numéro un mondiale que la retraite de la triple tenante du titre et la déroute de Maria Sharapova, qui s'était emparée de la place après les adieux de Henin, lui octroieront lundi.

Etre la première joueuse à occuper le sommet de la hiérarchie sans avoir remporté de titre du grand chelem est un privilège dont la jeune femme se passerait sans doute volontiers. Mais ce rang flatteur est déjà un acquis qui devrait lui permettre d'être un peu plus détendue cette année que la précédente.

"Quand j'ai appris que j'étais numéro un, ce fut un grand moment d'émotion. J'espère que je rends mon pays fier, a-t-elle dit. Il va falloir que je trouve un moyen d'oublier ça dès ce soir..."

Pour se concentrer sur l'objectif immédiat de devenir la première Serbe à remporter Roland-Garros.

Les amateurs de clichés et de reines de beauté auraient sans doute préféré un choc en finale entre Ana la brune et Maria Sharapova la blonde, mais Dinara Safina a déjoué ces pronostics.

Au jeu des poupées russes, elle est restée la dernière, la plus inattendue peut-être, si on oublie sa victoire cette année à Berlin, qui annonçait son beau parcours parisien.

En chemin, la soeur de Marat Safin a dépouillé ses compatriotes Sharapova, Elena Dementieva puis Svetlana Kuznetsova, toutes mieux placées sur le papier, pour brandir le drapeau russe en finale.

Ana Ivanovic est prévenue et ne prend pas du tout à la légère celle qui ne se présentait à Roland-Garros qu'au 14e rang mondial.

"Il va falloir que je bataille, car Dinara est en grande forme. C'est une combattante farouche. Je m'attends à un très, très beau match et moi, je participe pour gagner et j'espère m'amuser.

"J'ai beaucoup appris de mon échec de l'an passé. Je suis une meilleure joueuse aujourd'hui, une joueuse avec beaucoup plus d'expérience", assure-t-elle.

Safina, au contraire, a pour elle la fougue, la forme du moment et cette certitude que rien ne peut lui arriver dans cette première finale d'un tournoi majeur.

"J'ai déjà failli être éliminée deux fois et je suis toujours ici. Dieu a dû me conserver sur ce tournoi. Maintenant, j'ai décidé que je ne voulais plus être passive, que je serai agressive parce que je n'aurai pas une troisième chance. Quand on a traversé ce genre d'épreuves, on n'a plus d'émotions à l'intérieur, on fait ce que l'on a à faire, simplement", a assuré la jeune Russe, qui a sauvé des balles de match dans ses matches contre Sharapova et Dementieva.

Paradoxalement, alors qu'Ivanovic a déjà disputé - et perdu - deux finales du grand chelem, l'avantage psychologique est sans doute du côté de Safina. Parce qu'elle n'a rien à perdre, et que mentalement, elle a fait preuve depuis le début du tournoi d'une solidité peu commune.

"J'ai gagné des matches qui paraissaient désespérés. Maintenant, j'ai confiance en tout", dit-elle.

Une grosse incertitude concerne cependant la présence ou non de son frère Marat samedi. Avec ses quatre finales du grand chelem, il aurait pu apporter à sa soeur un peu de son expérience.

"Je crois qu'il est trop nerveux quand je joue. Mais qui, sait, peut-être me fera-t-il la surprise?", a-t-elle souhaité.