PARIS - Avec ses faux airs de Marat Safin, le Letton Ernests Gulbis est à 19 ans la révélation de l'année à Roland-Garros où il s'est hissé dimanche en quarts de finale.

Comme Safin en 1998, le joueur de Riga a choisi la terre battue parisienne pour confirmer au grand jour tout le bien qu'on pensait de lui en coulisses. Doté comme le Russe d'un gros service, d'un revers à deux mains et d'un jeu de fond du court solide, il partage également avec Safin une certaine aisance devant les micros, lui qui cherche à s'inscire à l'université à la rentrée.

"On le verra un jour dans le Top 10", avait prévenu le Français Michaël Llodra avant d'être enseveli dimanche sous une avalanche de services et de passings. On n'en est pas encore là, mais Gulbis va quitter dès lundi son 80e rang pour poursuivre son ascension vers les sommets.

"Je ne pensais pas réussir mon meilleur résultat en Grand Chelem sur terre battue. J'ai grandi dessus, mais mon jeu est plus efficace sur surface rapide", raconte le Letton, qui a renoncé aux tournois de Rome et Hambourg pour préparer Roland-Garros à Vienne, chez son nouvel entraîneur, l'Autrichien Karl-Heinz Wetter.

"Avec lui j'ai changé ma tactique. Il y a un an je jouais de façon stupide sur terre battue, je tentais les coups gagnants alors que ça ne s'imposait pas. Aujourd'hui j'ai appris à construire mes points et à être plus patient."

Gulbis poursuit ainsi un apprentissage commencé à l'âge de douze ans sous la coupe du grand formateur croate Niki Pilic, qui l'a fait venir dans son académie en Allemagne en compagnie d'un certain Novak Djokovic, qu'il pourrait retrouver mardi en quarts de finale.


Arrivé sur le grand circuit l'année dernière, Gulbis s'est signalé une première fois lors du dernier US Open en administrant une correction à l'Espagnol Tommy Robredo. A Roland-Garros cette année, le Balte au visage d'enfant a battu son deuxième joueur du Top 10 avec James Blake, au deuxième tour. Une saga qui commence à susciter de l'intérêt dans un pays sans tradition tennistique.

"En Lettonie, je suis le premier dans le Top 100. Il y a eu un 300e mondial mais le tennis n'a jamais été populaire, contrairement au hockey sur glace, le basket ou le foot", raconte Gulbis, issu d'une famille de cinq enfants, dont le grand-père a été champion d'Europe de basket avec la Russie.

"Quand je suis entré dans le Top 100, les journalistes ont commencé à écrire sur le tennis. Aujourd'hui, les courts sont pleins. Beaucoup de jeunes et d'enfants vont s'entraîner, mais le problème c'est que nous n'avons pas beaucoup de bons coaches en Lettonie. C'est dur quand on n'a pas d'argent. Si les résultats arrivent, j'espère que ça va aider."

Vu le jeu qu'il développe à Roland-Garros, c'est bien possible, d'autant qu'il garde la tête sur les épaules. "L'année dernière, c'était ma première année sur le circuit, la deuxième est plus dure. Personne ne me connaissait. Maintenant les gens savent comment je joue et c'est plus compliqué."

Conscient des difficultés qui l'attendent, il ne manque cependant pas d'ambitions. Interrogé sur ses chances face à Djokovic, il s'est contenté de répondre, "je me sens bien", avec un petit sourire qui en disait long sur les intentions de la petite sensation balte.