PARIS - Si la partie entre Gaël Monfils et Roger Federer attire l'attention côté français, l'autre demi-finale à Roland-Garros entre Rafael Nadal et Novak Djokovic s'annonce somptueuse et lourde en enjeux.

Au-delà d'une place en finale, la rencontre déterminera l'identité du prochain no 2 mondial, une position que Nadal occupe sans interruption depuis 150 semaines, soit presque trois ans, et que Djokovic rêve de lui ravir.

Cette lutte pour la place de dauphin de Roger Federer donne encore un peu plus de sel à une rencontre qui, déjà, n'en manquait pas. Si Nadal-Federer reste le classique des temps modernes (seize rencontres dont les deux dernières finales à Paris), l'arrivée au plus haut niveau de Djokovic n'est pas loin d'en proposer un autre.

Depuis sa victoire à l'Omnium d'Australie en janvier, le jeune Serbe de 21 ans est passé du rang de poil-à-gratter à celui de cador du circuit où il s'est déjà confronté à dix reprises à Nadal. Djokovic s'est imposé trois fois, mais reste bredouille en quatre rencontres sur terre battue, dont deux à Roland-Garros, en quarts de finale 2006 et en demi-finale 2007.

Sa dernière défaite, épique (7-5, 2-6, 6-2) en mai à Hambourg, lui offre cependant des raisons d'y croire. "A Hambourg j'ai vraiment joué de malchance, à un tel point que ça ne peut plus se reproduire. Si j'arrive à jouer le même tennis, j'aurais une bonne chance."

Reste que c'est un mur qui se dresse désormais devant lui, avec Nadal qui, en quatre participations, n'a jamais été poussé ne serait-ce que dans un cinquième set à Roland-Garros.

Incontestable et irrésistible maître des lieux, le Majorquin semble en plus dans la forme de sa vie, comme en témoignent les misérables 25 petits jeux abandonnés à ses adversaires lors de ses cinq premiers matches.

Soit une moyenne de 1,6 jeux par manche, comparable seulement aux promenades de santé d'un Björn Borg au sommet de sa gloire, comme en 1978 lorsque le Suédois avait gagné le titre en perdant seulement 32 jeux.

"Ce ne m'intéresse pas, pour moi l'unique motivation est de gagner ce match, le reste on verra plus tard", balaye Nadal qui a l'occasion d'égaler le record de Borg de quatre victoires consécutives à Paris.

Gaël Monfils devra sans doute se hisser au niveau d'un Nadal pour atteindre ce qui serait la première finale pour un Français depuis 1988. Seul un provocateur, cependant, oserait donner le 59e à l'ATP favori devant l'un des plus grands joueurs de l'histoire, vainqueur de douze titres du Grand Chelem, no 1 mondial depuis 227 semaines, à peine moins redoutable sur l'ocre que sur les autres surfaces.

Il ne faut pas s'y tromper, c'est un formidable joueur de terre battue que le jeune Français de 21 ans va affronter pour sa première demi-finale en Grand Chelem. Si Roland-Garros est le dernier tournoi majeur qui se refuse au Suisse, c'est par la faute d'un seul joueur, Nadal, qui l'a stoppé trois fois lors des trois dernières années.

Justement, Monfils possède en commun avec le Majorquin quelques unes des qualités qui lui permettent de faire régulièrement tourner Federer en bourrique.

La première est le pouvoir de faire durer l'échange grâce à des jambes à la fois explosives et endurantes. La deuxième est son aptitude à frapper des balles très lourdes en coup droit pour pousser Federer à la faute sur son coup le moins fort, le revers. La troisième est la force mentale. Innée chez Nadal, elle est beaucoup plus récente, voire circonstancielle, chez le Français.

Tout ceci étant dit, Federer reste archi-favori. Certes le Suisse arrive avec plus de défaites que les années précédentes (7). Mais il clame que tout est rentré dans l'ordre après ses problèmes de santé du début de l'année.