Toute une gamme d'émotions à Indian Wells
Tennis dimanche, 20 mars 2022. 21:42 jeudi, 12 déc. 2024. 16:45COLLABORATION SPÉCIALE
Rafael Nadal se présente en finale à Indian Wells pas mal amoché en raison d'une nouvelle blessure à la poitrine en plus de devoir vivre avec son pied gauche de plus en plus douloureux depuis 3 matchs. Taylor Fritz quand à lui se foule la cheville droite en demie et se demande même s'il sera en mesure de disputer cette première ronde ultime dans un tournoi de la série 1000.
Aussi incroyable que cela puisse paraitre, Taylor accepte le défi, on lui fait un gros taping solide alors qu'il livre une superbe bataille au 1e set qu'il gagne 6-3. Nadal est tellement mal en point que je me demande s'il sera en mesure de poursuivre. Le Majorquin fait venir le physio et le médecin qui lui offrent des anti-douleurs et traitements alors qu'il repart à la bataille avec une énergie renouvelée et des idées plein la tête. Cela le mène à la porte du 2e set alors qu'il mène 5-4 au bris d'égalité avec service à suivre. Malheureusement il laisse passer ce moment ce qui permet au Californien de 24 ans de vivre un rêve d'enfant en gagnant ce titre d'envergure chez lui, devant sa famille et amis. C'est pleinement mérité car match après match, c'est évident que Taylor compétitionne férocement en rajoutant des schémas d'attaque bien ficelés.
Un mot ou deux (ou trois...) sur la jeune merveille de 18 ans Carlos Alcaraz qui perd en demie face à son idole Rafael Nadal. Tout le monde s'entend pour dire qu'il se battra pour les plus grands titres très bientôt. Il est fort physiquement, intense, explosif, rapide et extrêmement talentueux. Le meilleur reste à venir et cela sera fort intéressant de le voir s'épanouir alors qu'il prendra de l'expérience au fil de cette saison 2022. Il est une perle de grand prix et c'est un délice de le suivre.
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Du côté de nos Canadiens, on ne peut pas dire que les matchs se développent tel qu'espéré. Félix Auger-Aliassime se casse les dents sur un joueur qui démontre une grande solidité pendant toute la durée de la rencontre. Botic Van de Zandschulp apprivoise les conditions spéciales du désert de la Californie au premier tour en disposant facilement de Tennys Sandgren en 1 h 16. Le nNéerlandais ne rate pas et excelle dans tous les départements du jeu. Puis, face à notre québécois il est encore plus robuste et résistant.
Le problème principal c'est que Félix n'arrive pas à bien servir sur une base régulière ce qui lui aurait permis d'acheter du temps pour stabiliser le reste de son jeu. En fait dans tous les domaines, FAA manque d'assurance et de contrôle. D'ailleurs, il ne se cache pas pour dire les vraies choses en conférence d'après-match, conscient que pour un joueur de son statut, c'est inacceptable de ne pas avoir trouvé les bons réglages surtout au début du 3e set. Il dispose tout de même de 3 h 15 pour trouver les solutions qui s'imposent. Ceci étant dit, c'est impossible d'être au sommet à toutes les rencontres et c'est ce que cela aurait pris. Je vous rappelle que Botic a tout de même battu l'an passé Rublev, Ruud, Hurkacz, et Schwartzman ce qui est extraordinaire puisqu'il s'agit seulement de sa 2e année à avoir accès aux plus grands tournois du circuit.
Denis Shapovalov commence lui aussi l'épreuve au 2e tour devant l'Espagnol Alejandro Davidovich Fokina. Denis a besoin d'un set pour ajuster son jeu. Parfois, il surjoue d'autres fois il hésite. Justement les chiffres parlent fort alors que notre canadien commet 22 fautes au 1e set, 12 à la manche suivante pour finalement exceller au 3e avec un très beau différentiel de +6. Plus le match avance, plus Shapo progresse. Tout comme Van de Zandschulp, Fokina peut être dangereux alors bravo d'avoir éteint l'espagnol petit à petit.
Puis c'est le géant de 7 pieds qui l'attend de pied ferme au tour suivant. En un an, Reilly Opelka démontre des progrès immenses dans l'échange. Suivant les conseils de son bon copain John Isner, Reilly passe beaucoup plus de temps en gymnase maintenant et cela le garde fort sur le court et encore plus important, lui permet d'éviter les blessures. Dans ce domaine, Isner sait de quoi il en retourne pour avoir trainé des pépins à un genou pendant presque toute sa carrière.
Face à ces immenses serveurs, si tu as des opportunités de briser il ne faut pas les manquer parce qu'habituellement elles sont rares. Shapo mène un set à zéro et se donne balle de bris dès la première partie au service d'Opelka. On appelle cela un moment important! Malheureusement notre canadien n'en profite pas et pire se fait briser tout de suite après. Denis se bat et possède une autre chance de niveler le set à service égal mais passe à côté de sa balle de bris à la toute fin du set. C'est dans les petits détails que cela se joue alors qu'après 2 manches Shapovalov est 0/4 en balles de bris. Cela est bizarre à dire mais le match Denis l'a perdu alors qu'il mène 7-6, 1-0 avec cette fameuse balle de bris à suivre. Après cela il est un peu découragé et forcément son énergie n'est pas la même. Le fait de perdre son service d'entrée 3e manche est la goutte qui fait déborder le vase...Honnêtement il est courageux mais manque d'opportunisme. Cruel ce sport s'il en est un...
Pour sa part, Leylah Fernandez continue d'être un exemple d'ardeur et de détermination. Notre Canadienne se bat si farouchement à son premier match devant Amanda Anisimova pour sauver plusieurs balles de match au 2e set! Cela est tellement décontenançant pour l'américaine qu'elle prend ses cliques et ses claques et quitte le terrain après le 2e set prétextant être malade et faisant fi du protocole qui stipule qu'un médecin ou soigneur doit d'abord constater les faits avant l'abandon. Étonnant!
Puis au 3e tour notre Canadienne livre une autre super bataille pour disposer en 3 sets de la puissante Shelby Rogers avant de céder devant la championne en titre Paula Badosa. Ce qu'il faut mentionner une fois de plus c'est que ces 3 dames affrontées à Indian Wells, sont toutes plus grandes, plus fortes, plus expérimentées que notre Leylah. Peu importe, p'tit train va loin. Championne des revirements utilisant tous les trucs dans sa boite à outils, Fernandez arrive souvent à subjuguer ses adversaires lorsque celles-ci sont en fin de set ou match. Il fallait voir la mine réjouie de Badosa après la victoire en ronde des 16 jusqu'à quel point elle est soulagée d'avoir su mettre fin à la rencontre en deux sets. On la comprend puisque Fernandez a quand même sauvé 9 balles de bris sur 12 avec panache et détermination. L'idéal tout de même serait de trouver la manière de garder la dragée haute pendant tout de match pour éviter d'être au bord du précipice trop souvent. Je le sais, plus facile à dire qu'à faire...
Dans un autre ordre d'idées, moment cocasse en conférence de presse durant le tournoi lorsque Nick Kyrgios se présente dans la salle de presse fier comme un paon d'avoir battu le 8e mondial Casper Ruud. En 2019 à Rome, ces deux belligérants s'affrontent alors que Kyrgios mène 2-1 au 3e set mais il est frustré de la qualité de son jeu et de l'arbitrage. Il perd le contrôle et lance une chaise à bout de bras. Il est illico presto disqualifié. Ruud ne se gêne pas pour dire que son comportement est inexcusable et réclame une lourde sanction. L'australien finit par avoir le dernier mot en le dominant cette semaine en 1:16 et je le cite: « Bof, vous savez, j'aime mieux voir la peinture sécher que regarder jouer Ruud... » Sacré Nick...
Impossible cependant de ne pas être ému devant une autre épisode de détresse de Naomi Osaka qui s'incline au 2e tour face à Veronika Kudermetova 6-0, 6-4. Durant le match alors que les choses ne vont pas bien pour la Japonaise, une spectatrice se permet de crier ceci: « Naomi, you suck! » qui veut dire Naomi, tu es nulle mais qui est tout de même, à l'origine, une expression vulgaire et donc forcément méchante et déplacée.
Osaka fond en larmes alors qu'elle tient à s'exprimer devant la foule après la défaite. Voici quelques commentaires des meilleurs à ce sujet. Daniil Medvedev est compatissant: « Je l'ai vécu à Melbourne en finale face à Nadal, crois-moi que ce n'est pas facile... » Plus spirituel Gael Monfils en rajoute: « Pour tenir face à cela, il faut trouver une plus grande paix intérieure ». Plus pragmatique, Andy Murray mentionne que cela fait partie du sport et qu'il faut s'y préparer ET résister. Finalement, à tout seigneur tout honneur: Rafael Nadal, homme de combat par excellence qui fait preuve d'humilité dans la vie comme sur le terrain et qui simplifie pour mieux raisonner: « Autant je suis désolée pour elle, il faut aussi réaliser que cela arrive dans la vie de tous les jours. Si on accepte l'immense soutien que l'on reçoit et le fait que nous gagnons beaucoup d'argent, il faut être prêt à vivre l'envers de la médaille tout en étant assez fort pour accepter et aller de l'avant ».
Merci Rafa, c'est bien vrai qu'il faut savoir faire la part des choses et comme toi se façonner une carapace pour devenir roi et reine de l'abnégation. Sur ces propos remplis de sagesse de tout ce beau monde, je vous donne rendez-vous ce mercredi à 14 h pour d'autres aventures et leçons de vie en provenance de Miami.