Le maire de Vancouver, Gregor Robertson, ambitionne de faire de sa ville la ville la plus verte au monde d'ici 2020. Un objectif peu surprenant. Après tout, c'est à Vancouver qu'est né l'organisme



Le maire de Vancouver, Gregor Robertson, ambitionne de faire de sa ville la ville la plus verte au monde d'ici 2020. Un objectif peu surprenant. Après tout, c'est à Vancouver qu'est né l'organisme Greenpeace en 1971 et la Fondation David Suzuki 20 ans plus tard. La protection de l'environnement fait partie du quotidien dans cette ville. Parfois difficile de concilier développement lié à l'organisation de Jeux olympiques et protection de l'environnement. Est-ce que le Comité d'organisation des Jeux de Vancouver a bien fait à cet égard? Voici ce qu'en pense la Fondation David Suzuki...

La Fondation David Suzuki est l'auteure du rapport intitulé On the ice, un rapport dans lequel vous prévenez que les changements climatiques sont une menace pour les Jeux olympiques d'hiver si rien n'est fait. Disparition possible, d'ici 2050, du patinage extérieur, du ski de fond et du ski alpin en basse altitude. Certains avancent que les Jeux les plus durables sont pas de jeux du tout. Est-ce que la Fondation croit que les Jeux olympiques, peu importe où ils sont organisés, sont et seront toujours le problème ? Au contraire, croyez-vous que les Jeux olympiques peuvent être une partie de la solution?

À la Fondation, nous sommes partis du constat que les Jeux olympiques de Vancouver sont une réalité, un fait que nous ne pouvons éviter. Les changements climatiques sont l'enjeu de notre époque. Peu de gens le savent, mais l'environnement est le troisième pilier du mouvement olympique, après le sport et la culture, et ce, depuis 1994. Nous croyons donc que les Olympiques représentent une excellente oppurtunité de parler des changements climatiques, de sensibiliser la population à la question et d'influencer leur comportement. Après tout, les Jeux olympiques sont regardés par plusieurs milliards de personnes sur la planète.

Les Jeux ont un impact direct sur le développement de la région où ils sont tenus. Pour nous, comme les Jeux sont un fait, nous voulons en profiter au maximum pour faire passer notre message. Nous voulons être un intervenant actif sur la question des changements climatiques. Nous voulons offrir nos idées sur la question. Nous représentons les intérêts du climat.

Dans un autre rapport produit par la Fondation, Meeting the Challenge, en 2007, vous avez donné au COVAN des trucs sur les moyens de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Quelle a été la réponse du COVAN à votre rapport ? Les choses ont-elles changé depuis ?

Dans ce rapport, nous avons aidé le COVAN à élaborer une stratégie sur la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Oui, sur certains points, le COVAN a écouté nos recommandations. Par exemple, grâce à notre support, ils ont calculé une bonne partie des émissions de carbone des Jeux (notamment les déplacements en avion des gens qui se rendront à Vancouver). À cet égard, le COVAN a fait plus que n'importe quel Comité d'organisation auparavant.

Nous avions également suggéré au COVAN de trouver une compagnie qui procéderait à la compensation des émissions de carbone. Ils l'ont fait. Et la compagnie responsable de la compensation des émissions est Offsetters, une société de la Colombie-Britannique. Nous avions aussi recommandé au COVAN de rechercher la certification Gold Standard Offset, la référence mondiale en la matière. Chose qu'ils ont faite, encore une fois. Avoir cette certification est une très bonne chose.

Quelle est l'évaluation que fait la Fondation de la gestion des transports faite par le COVAN ? Pendant les Jeux, le COVAN fait usage de la Chevrolet Equinox, un véhicule à l'hydrogène. Bombardier a prêté à la ville de Vancouver un tramway pour la période des Jeux, le COVAN augmente son offre de transport en commun de 30% pour inciter les gens à moins prendre leur véhicule. La Fondation est-elle satisfaite de ces initiatives ?

La Fondation est heureuse de constater que, pendant les Jeux, le COVAN met l'accent sur l'utilisation des transports publics, autant le nombre accru d'autobus sur le territoire de Vancouver que le système d'autobus permettant de relier Vancouver à Whistler. Autre truc intéressant, les gens qui se rendront à une épreuve pourront prendre le transport en commun tout à fait gratuitement en montrant leur billet au chauffeur et il n'y a aura pas de stationnement privé sur les sites de compétition. Donc, le COVAN s'active pour que les gens prennent le transport public.

Le COVAN a aussi décidé de fermer certaines rues du centre-ville pour les transformer en rues piétonnières, une mesure qui très populaire.

Ceci étant dit, la situation n'est pas parfaite. Nous déplorons le fait qu'il n'y ait pas vraiment d'héritage de durabilité pour la région en matière de transport. Après les Jeux, ça redeviendra comme avant.

Les organisateurs avaient une chance en or de revaloriser le vieux chemin de fer reliant Vancouver et Whistler. Au lieu d'avoir un nouveau train entre les deux villes, nous avons une autoroute plus large qu'auparavant. Une autoroute plus large signifie plus de voitures sur la route et potentiellement plus de maisons le long de l'autoroute.

En ce qui concerne la construction de la Canada Line, un projet de train reliant Richmond et l'aéroport et le centre-ville était déjà dans les plans. La réalisation du projet a été accélérée en raison des Olympiques. En contre-partie, le projet de la Evergreen Line, qui doit se rendre dans l'est, est maintenant sur la glace. Donc, côté train, c'est comme si on avait échangé quatre trente sous pour un dollar.

Quelle est l'évaluation que fait la Fondation de la gestion de la construction faite par le COVAN ? Chaque bâtiment du village olympique possède la certification LEED, le Centre des congrès de Vancouver possède un toit vert, le plafond de l'Anneau olympique de Richmond a été construit à l'aide de bois endommagé par le dendroctone du pin ponderosa...

En matière de construction des sites, le COVAN a fait un travail colossal. Les sites seront un héritage très positif du passage des Jeux à Vancouver. La certification LEED de tous ces bâtiments signifie qu'ils sont très éco-énergétiques. Les gens qui utiliseront ces sites économiseront argent et énergie.

Autre avantage de ces sites, ils seront transformés pour être retournés aux communautés après les Jeux.

Et ces sites se trouvent à proximité des transports publics.

Le COVAN s'est associé au développement durable. Est-ce que les actions sur le terrain sont conséquentes avec les discours? Ces actions sont-elles réelles ou n'est-ce qu'un beau discours ? Quel sera l'héritage pour Vancouver?

Dans son cahier de candidature, le COVAN s'est fixé certains objectifs en matière de développement durable (efficacité énergétique des sites, utilisation d'énergies renouvelables pendant les Jeux). Ils ont pris la tâche au sérieux et répondu aux attentes. Les sites de compétition en sont un bel exemple.

Là où le COVAN aurait pu en faire plus, c'est au niveau de l'implication du public par rapport aux solutions pour contrer les effets des changements climatiques. Comme nous expliquions plus tôt, les Jeux sont l'occasion d'éveiller la conscience populaire. Le COVAN aurait pu mettre sur pied un vaste programme d'approche auprès de la population pour mettre en lumière les enjeux reliés aux changements climatiques.

Le but d'une telle stratégie est de faire passer le message. Pendant les Jeux, le but est de faire en sorte que les gens sachent que le COVAN est engagé en matière d'environnement. En parler pendant la cérémonie d'ouverture, par exemple. S'associer avec des partenaires médias, CTV et NBC notamment, pour que le message passe. Pour que tout le monde pense et parle des changements climatiques aux Jeux.

À Sydney, tout le monde parlait des panneaux solaires. Ici, il n'y a pas ce buzz.

Ils devraient faire la promotion de leurs propres initiatives. À Vancouver, lorsque vient le temps de parler de transport, ce qu'on comprend du message que le COVAN livre à la population, c'est « Oui, les fermetures de rues vont rendre la situation chaotique pendant les Jeux. Restez à la maison. Mais ne vous en faites pas, une fois les Jeux terminés, vous pourrez reprendre votre voiture ». Où est le message positif que l'on pourrait lancer à la population ? « Pourquoi ne prenez-vous pas le transport en commun ? Vous irez plus vite. Prenez votre vélo, marchez, c'est bon pour votre santé. » Le message pourrait être positif.

Quelle note la Fondation David Suzuki donne-t-elle au COVAN pour l'ensemble de sa gestion de la question environnementale ?

Pour l'ensemble du dossier environnement et leurs efforts pour réduire l'impact de l'événement sur l'environnement, la Fondation David Suzuki accorde une médaille de bronze au COVAN.

Malgré quelques ratés, les engagements pris par les organisateurs sont la preuve que les solutions au problème sont réalistes, abordables et durables.