PARIS (AFP) - Le Britannique Jonathan Edwards (triple saut), l'Américaine Gail Devers (100 m haies), le Namibien Frankie Fredericks (100 et 200 m) ont dépassé les 35 ans ou s'en approchent, mais restent au sommet: les raisons de ce phénomène, qui va s'amplifiant en athlétisme, sont à la fois médicales, psychologiques et économiques.

Aux jeux Olympiques de Sydney, la discobole bélarusse Ellina Zvereva avait remporté le titre à bientôt 40 ans, alors que l'Allemande Heike Drechsler avait conquis l'or du saut en longueur à près de 36 ans, 8 ans après son succès à Barcelone.

Il y a peu de temps encore, cet âge canonique semblait convenir exclusivement aux seuls athlètes de fond et aux lanceurs. Les meilleurs exemples étaient le Portugais Carlos Lopes, champion olympique du marathon à 37 ans en 1984 à Los Angeles, et l'Américain Alfred Oerter, couronné au disque quatre fois de suite entre 1956 (Melbourne) et 1968 (Mexico).

Désormais, les années qui passent sont une eau de jouvence également pour les sprinteurs. "On disait qu'on pouvait garder des qualités de résistance, d'aérobie plus longtemps, et qu'on perdait avec l'âge les qualités musculaires, de force et de vitesse. Mais je ne peux rien affirmer sans connaître les dossiers médicaux des cas cités", remarque prudemment Philippe Deymié, médecin de la Fédération française d'athlétisme (FFA).

"Concernant Edwards, petit gabarit très costaud, je remarque qu'il sait se préserver. A Saint-Denis (vendredi dernier ndlr), convaincu d'avoir gagné, il n'a pas effectué ses deux derniers essais", ajoute-t-il néanmoins.

"Une meilleure préparation, un meilleur suivi médical, certainement. Il y a pas mal d'exemples d'athlètes qui durent, car il ont su se ménager des plages de repos à cause de blessures", souligne Gérard Rousselle, organisateur de la réunion de Saint-Denis.

"Je crois que c'est la raison principale, plus déterminante que l'aspect financier", ajoute-t-il en citant le cas du Français Stéphane Diagana, bientôt 33 ans.

Médecine et motivation

"On a une meilleure gestion de l'alimentation. Et la chirurgie a fait des progrès. Fredericks s'est remis d'une opération à un talon d'achille. Ce qui était inimaginable il y a quelques années encore", remarque l'intéressé. Pour "Diag", "la force de l'exemple, l'effet boule de neige sont aussi déterminants".

"J'ai eu l'exemple de Edwin Moses, qui a poursuivi une carrière de haut niveau au-delà de 30 ans. En sachant qu'on peut être performant à 35 ans, ça laisse l'opportunité. Mais, à ce stade, entrent en jeu d'autres éléments, en particulier la motivation", explique le sociétaire de Franconville (Val-d'Oise).

Edwards, lui, se dope à la concurrence de ses jeunes adversaires, en premier lieu le Suédois Christian Olsson, qui le menacent de plus en plus, mais ne sont pas encore parvenus à le détrôner.

A l'âge d'Edwards (36 ans et 2 mois), le mythique Australien Herb Elliot, champion olympique du 1500 m à Rome, détenteur du record du monde et invaincu pendant sept ans sur la distance, avait raccroché les clous depuis 15 ans. Mais c'était le temps des étudiants amateurs. La Golden League et son jackpot de lingots d'or n'existait pas encore.