MONTREALÂ -- Dès qu'il saute sur la patinoire, Patrick Chan subjugue les foules. Il faut reconnaître qu'il est très doué sur patins. Mais sa grâce, il la doit aussi beaucoup à sa personnalité,



MONTREAL -- Dès qu'il saute sur la patinoire, Patrick Chan subjugue les foules. Il faut reconnaître qu'il est très doué sur patins. Mais sa grâce, il la doit aussi beaucoup à sa personnalité, à son charisme.

Et malgré son ascension fulgurante avec la conquête d'une médaille d'argent aux derniers championnats du monde, le jeune patineur artistique de 18 ans convient que sa personnalité enjouée ne lui suffira pas pour combler tous les espoirs qu'on place en lui.

"Je suis quelqu'un d'heureux de nature, confie-t-il. Ce que je reflète quand je patine, c'est ce que je suis. Mais je travaille à développer chez moi une autre forme de charisme. Car dans mon sport, il faut parfois démontrer un autre type de personnalité, plus sérieux et intense, comme lorsque je fais un tango. Ce n'est pas alors le temps de sourire tout le temps."

Chan patine avec un tel abandon, avec une telle passion, que toute compétition semble pour lui une partie de plaisir. Qu'il ne semble jamais écraser par la pression du résultat. Et pourtant.

"A chaque fois que j'attends mon tour avant de sauter sur la patinoire, je suis tellement nerveux comme c'est pas possible, avoue le jeune patineur artistique de 18 ans. Je suis le genre de personne à me parler en silence. Je me dis, 'qu'est-ce qui va arriver si je manque ce saut, si quelque chose rate.'"

Chose certaine, cette insécurité est imperceptible pour l'amateur.

Chan, originaire d'Ottawa, a été propulsé sous les projecteurs très rapidement. Il est devenu le plus jeune champion canadien de l'histoire à 17 ans après avoir devancé Jeffrey Buttle, triple tenant du titre, en 2008. Et quand Buttle a annoncé sa retraite l'an dernier, Chan s'est retrouvé encore plus à l'avant-scène. Avec son titre de vice-champion du monde, ses deux victoires en Grand Prix et le Championnat des quatre continents, il est pressenti comme un grand espoir de médaille pour le Canada aux prochains Jeux olympiques de Vancouver en février 2010.

Un "quad" dans son sac

Critique envers le Français Brian Joubert qui s'est plaint du manque de courage des autres concurrents pour ce qui est de tenter des sauts quadruples aux championnats du monde, Chan reconnaît qu'il lui faudra en insérer un dans son programme s'il veut monter sur la plus haute marche du podium à Vancouver.

"Pour gagner aux Jeux olympiques, je crois qu'il est vraiment important d'avoir un quadruple dans son programme. Les récents champions olympiques ont tous réussi un quadruple. Les juges vont chercher un champion olympique capable de le réaliser à Vancouver. C'est mon plan d'en mettre un dans mon programme."

Le nombre de concurrents réalisant un quadruple est en nette régression depuis l'instauration du nouveau barème de notation instauré par la Fédération internationale il y a cinq ans.

"C'est un saut qui représente un grand risque, poursuit Chan. Si tu le réussis, tu obtiens beaucoup de points. Malheureusement, si tu le manques, tu en perds aussi beaucoup. C'est un choix qui comporte beaucoup de risques."

Il y a deux semaines à Philadelphie, Chan a tenté pour la première fois en compétition d'effectuer une quadruple boucle piquée alors qu'il dévoilait son programme libre olympique en patinant sur la musique du "Fantôme de l'opéra" d'Andrew Lloyd Webber. Il a toutefois chuté à la réception.

"Voici la façon dont je vois les choses. Tiger Woods possède un bois numéro 1 dans son sac mais il ne l'utilise pas à chaque coup. J'ai la même approche avec le quadruple. Je le veux dans mon sac. Je peux choisir de le laisser de côté si cela ne va pas bien, mais je veux avoir le choix."

D'ici les Jeux, il veut aussi se montrer plus constant dans l'exécution de ses triples Axel, qu'il considère comme le saut le plus difficile.

"Je rate toujours trop de triples Axel à l'entraînement. Présentement, j'en réussis sept sur 10. Mais je dois viser le 10 sur 10 car tous les autres patineurs olympiques auront ce taux de réussite. C'est l'un de mes plus grands objectifs cette année."

Carrière de hockeyeur

Plus jeune, Chan rêvait d'une carrière de hockeyeur. Les bons conseils de ses parents, Lewis et Karen, tous les deux nés à Hong Kong, l'ont plutôt amené au patinage artistique à l'âge de six ans.

"Le patinage artistique, c'est le choix de mes parents. Moi, je voulais jouer au hockey. Ils m'ont conseillé de commencer par le patinage artistique, ce qui me permettrait d'apprendre à bien patiner et d'être plus rapide que les autres. Après, il ne me resterait plus qu'à apprendre le maniement du bâton."

C'est également grâce à son père si Chan parle un très bon français.

"Mon père a vécu et fait ses études à Montréal. Avec ma mère, qui ne parle pas français, ils ont décidé qu'il serait avantageux pour moi de faire mes études en français -- à l'école Etienne-Brûlé à Toronto", explique Chan, qui parle également un peu le Chinois cantonais.

Même s'il a son propre style, Chan voue admiration et respect au Russe Alexei Yagudin et au Canadien Kurt Browning, à qui on le compare d'ailleurs souvent.

"J'apprécie beaucoup la gentillesse de Kurt. Je partage mes émotions avec lui", note Chan, en parlant de celui avec qui il s'est lié d'amitié pendant les années où ils s'entraînaient ensemble au Granite club de Toronto.