DONETSK - Il l'avait promis et ne s'est pas défilé : le Français Renaud Lavillenie a battu samedi le record du monde de saut à la perche en salle, effaçant 6,16 m à Donetsk (Ukraine) sur les terres de l'ancien recordman, Sergueï Bubka.

L'Auvergnat, qui affirmait depuis plusieurs semaines se sentir capable de cette performance, est entré dans l'Histoire en franchissant la barre dès le premier essai, reléguant une fois pour toutes le tsar derrière lui dans les tablettes.

L'Ukrainien avait sauté 6,15 m en 1993 en salle et 6,14 m en 1994 en plein air. Son successeur est donc bel et bien devenu l'homme le plus haut du monde, même si pour être homologué comme tel, il devra rééditer cet exploit hors de l'atmosphère protégée d'une salle.

Se prenant la tête à deux mains en descendant du tapis en courant, hilare, celui que ses fans surnomment « Airlavillenie » pouvait jubiler et se féliciter d'avoir changé de perche au milieu du concours.

« C'était totalement incroyable! Je n'ai jamais utilisé cette perche pour 6,16 m. Pour ma première tentative, je souhaitais réaliser le meilleur saut possible. J'ai demandé 6,16 m parce que c'est le meilleur endroit pour battre le record de Serguei Bubka, 21 ans après son record », a-t-il déclaré.

La légende de la perche mondiale, présent au meeting Pole Vault Stars en costume-cravate, a été parmi les premiers à féliciter le Français, regardant avec admiration la barre désormais de référence.

« Une nouvelle ère dans ce sport est arrivée. Aujourd'hui, le vainqueur est un champion olympique, une personne qui a déjà obtenu de nombreux succès. Nous nous attendions à cet événement et nous sommes ravis que cela se soit passé précisément ici, à Donetsk », a déclaré Bubka à l'AFP.

« J'ai beaucoup de sympathie pour ce gars. Je suis sûr que ce n'est pas le dernier sommet qu'il atteint et que d'autres succès brillants l'attendent », a-t-il souligné.

Lavillenie a ensuite tenté - en vain - une barre à 6,21 m devant une salle entièrement acquise à sa cause. Mais l'aisance avec laquelle il a franchi les 6,16 m laisse espérer d'autres records.

Sur tous les podiums

Le champion olympique avait déjà amélioré son record par deux fois en janvier, effaçant 6,04 m à Rouen (France) puis 6,08 à Bydgoszcz (Pologne). Sa progression, répétait-il, devait logiquement le conduire au record du monde. Sûr de ses qualités, le perchiste de poche (1,77 m/70 kg), était en effet obsédé par la performance du monstre physique qu'était Bubka.

Décrit comme d'autant plus fier qu'il porte les couleurs de son pays, il se présente comme ayant « horreur de la défaite ». « Je suis une pile qui ne se décharge jamais. Dans la vie, je vais toujours avoir l'envie de gagner. Pour la moto, le tennis, le basket, la piscine, le ping-pong. Dès que je fais quelque chose je me mets à fond », déclarait-il en mai dernier à l'AFP.

Âgé de 27 ans, il est d'ores et déjà monté sur tous les podiums depuis 2009, l'année de son éveil international, et conquiert avec ce record la légitimité des géants.

Il ne manque au Charentais de naissance que l'or des Mondiaux en plein air. Troisième en 2009, il dut encore se contenter de cette place en 2011, mais cette fois dans la peau du favori. Il a été une nouvelle fois deuxième en 2013 à Moscou, derrière l'Allemand Raphael Holdzeppe.

Sa brillante carrière s'inscrit dans un riche pedigree familial : chez les Lavillenie, on est en effet perchiste de génération en génération. Le grand-père entraînait déjà le père, et Renaud conseille son frère cadet Valentin, déjà un des meilleurs de la discipline dans l'hexagone.

Renaud Lavillenie a laissé tomber, après le sacre olympique, l'entraîneur qui l'avait fait éclore, Damien Inocencio, pour le plus connu Philippe d'Encausse. Un choix délicat qui a manifestement porté ses fruits.

Samedi soir, les réactions abondaient sur les réseaux sociaux pour saluer cette performance majuscule. « Record du Mooonnndeeee! Chapeau l'Artiste », écrivait notamment sur Twitter l'athlète Stéphane Diagana.

Le président François Hollande a salué un « exploit historique ».