LAUSANNE, Suisse - Dans quelques jours, l'Agence mondiale antidopage (AMA) sera dotée d'un nouveau régime de sanctions pour mieux surveiller les organisations sportives défaillantes ou tricheuses, une réponse au scandale russe, mais qui pose la question des moyens de l'agence pour l'appliquer.

En vigueur à partir du 1er avril, ce nouveau « Standard international », qui renforce les pouvoirs de l'AMA, définit les règles auxquelles les signataires au code mondial antidopage doivent se conformer: fédérations internationales comme la FIFA ou l'IAAF, Comité international olympique (CIO), organisations antidopage nationales. Parmi leurs obligations, mettre en place des programmes de contrôles efficaces; un « suivi rapide et approprié « de tout contrôle positif, des règles pour les autorisations à usage thérapeutique (AUT), des moyens d'investigation...

La grande nouveauté, c'est que des sanctions claires sont désormais prévues, comme pour les athlètes, en fonction de la gravité de la faute. Une fois la procédure de « non conformité » ouverte, l'AMA aura la main sur la « peine », qui pourra être contestée devant le Tribunal arbitral du sport (TAS). Avec, dans les cas les plus graves, l'arme ultime de priver de Jeux olympiques le pays dont l'organisation nationale antidopage est en cause.

« C'est une avancée majeure dans la lutte contre le dopage «, se félicite Olivier Niggli, le directeur général de l'AMA, qui tient un symposium cette semaine à Lausanne.

« Nous ne nous retrouverons plus jamais dans la situation que nous avons vécue avec la Russie, où nous n'étions pas préparés à ce qui s'est passé et où nous n'avions pas les instruments juridiques pour faire face », ajoute-t-il.

Éviter la confusion

L'AMA a suspendu l'agence russe antidopage Rusada dès novembre 2015. Mais malgré l'ampleur du scandale de dopage mis au jour par le rapport McLaren (échantillons truqués aux JO d'hiver 2014 de Sotchi, contrôles positifs « blanchis » au laboratoire de Moscou) l'appel de l'AMA à bannir le pays des JO de Rio en 2016 était resté lettre morte et le CIO avait laissé le soin à chaque fédération sportive internationale de trancher, un choix très critiqué à l'époque. 

Deux ans plus tard, le CIO a banni les symboles de la Russie des Jeux d'hiver des PyeongChang et ouvert la porte à une sélection d'athlètes neutres et triés sur le volet par un panel antidopage.

Ces nouvelles normes et les pouvoirs renforcés de l'AMA vont-ils améliorer le système?

« Ce sera toujours compliqué quand la participation d'un pays aux Jeux sera en question. Mais ce standard aura le mérite de rendre le processus clair, prévisible et transparent », explique à l'AFP Graeme Steel, le président de l'iNADO, l'organisation représentant les agences nationales antidopage.

Reste à appliquer un tel programme et à surveiller la totalité des organisations à travers le monde; une tache immense pour l'AMA, qui fonctionne avec un budget annuel de moins de 30 millions d'euros, apportés par les gouvernements et le CIO.

« Nous allons devoir investir de nouvelles ressources dans ce programme », a prévenu Olivier Niggli, alors que le budget « recherche scientifique » de l'agence a chuté ces dernières années.

« Aujourd'hui, on a un défi en termes de moyens financiers et humains pour superviser tous les signataires du code mondial antidopage. Mais c'est une de nos priorités », confirme à l'AFP le directeur des opérations de l'AMA, Frédéric Donzé.

Ciblage

En 2017, l'agence basée à Montreal a lancé la première phase du programme. Pour toucher l'ensemble des fédérations internationales et les organisations nationales antidopage, plus de 300 structures, l'AMA leur a d'abord soumis un questionnaire, avant de lancer des audits.

Résultat : des mesures de correction sont nécessaires pour tout le monde.

« De façon générale, là où l'on voit le plus de difficultés, c'est au niveau du ciblage des contrôles, qui nécessite une bonne évaluation des risques », explique M. Donzé.

« Pas mal d'organisations antidopage n'ont pas encore mis en place un programme de conservation et de réanalyse des échantillons », constate-t-il aussi, alors que certains produits dopants peuvent être décelés beaucoup plus tard grâce aux avancées dans les méthodes de détection.

Un tel système de supervision aurait-il permis d'éviter le scandale russe? « C'est difficile d'avoir une réponse [...] Mais c'est davantage le travail d'enquête de l'AMA qui aboutira à la découverte de cas très sérieux et sophistiqués tels que le cas russe », répond Frédéric Donzé.